FIFM. David Cronenberg, entretien avec le maître incontesté de l’étrange

A la rencontre du maestro du thriller psychologique David Cronenberg

Le réalisateur canadien David Cronenberg. (A.Gadrouz/Le360)

EntretienLe réalisateur canadien David Cronenberg, auquel le 21ème Festival international du film de Marrakech a rendu un hommage solennel, s’est abandonné avec Le360 au jeu des questions-réponses. Dans cet entretien, le cinéaste de l’étrange et maître du «body horror» revient sur sa carrière prolifique, ses inspirations créatives et sa vision du cinéma contemporain.

Le 06/12/2024 à 10h02

Considéré comme l’un des réalisateurs les plus influents de sa génération, David Cronenberg, 81 ans, a marqué au fer rouge les grands écrans avec des œuvres explorant les zones troubles de l’esprit humain et les transformations du corps, dont on citera «Vidéodrome» (1983), «La Mouche» (1986), «Faux-semblants» (1988), «Crash» (1996) ou encore «A History of Violence» (2005).

Invité d’honneur du 21ème Festival international du film de Marrakech, cette figure emblématique du 7ème art a reçu un hommage à la hauteur de son immense contribution au mondial. À travers un entretien avec Le360, le réalisateur canadien revient sur son parcours, son approche des genres cinématographiques et son envie récurrente d’expérimenter de nouveaux formats.

Le360: Vous avez reçu un bel hommage lors de cette édition du Festival international du film de Marrakech. Comment ressentez-vous cette reconnaissance?

David Cronenberg: Il est toujours agréable de voir son travail apprécié. Le fait qu’une institution comme le Festival international du film de Marrakech décide de manifester publiquement son admiration pour votre œuvre est quelque chose de très gratifiant. Cela me motive à continuer de réaliser des films. C’est une reconnaissance très positive.

C’est votre première fois à Marrakech, mais vous êtes déjà venu à Tanger. Quel souvenir du Maroc?

Je ne peux pas prétendre tout connaître d’un pays après seulement une semaine. Cependant, j’ai trouvé le Maroc très chaleureux, généreux et accueillant. Mon expérience ici a été magnifique.

«Les séries permettent d’explorer davantage de personnages et de développer l’intrigue sur une plus longue durée. Ce n’est pas quelque chose que vous pouvez faire dans un film de deux heures.»

Votre dernier film, «The Shrouds», devait initialement être une série pour Netflix, n’est-ce pas?

Oui, j’étais curieux d’explorer le format des séries en streaming, alors j’ai proposé «The Shrouds» à Netflix en tant que série potentielle. Ils étaient enthousiastes au début, mais ont finalement décidé de ne pas aller plus loin. Et comme j’avais déjà écrit une grande partie du script, j’ai décidé de transformer ce projet en long métrage.

Avez-vous été déçu?

Oui, j’ai été vraiment déçu, car j’étais excité par l’idée d’expérimenter le format des séries. Les séries permettent d’explorer davantage de personnages et de développer l’intrigue sur une plus longue durée. Ce n’est pas quelque chose que vous pouvez faire dans un film de deux heures. J’espère que cette opportunité se présentera à l’avenir.

En compétition officielle au dernier Festival de Cannes, «The Shrouds» n’a pas décroché de prix…

J’ai présenté de nombreux films à Cannes, parfois on gagne un prix, parfois non. Cela dépend toujours du jury. À mes yeux, le plus grand honneur à Cannes est simplement d’être en compétition. C’est déjà une reconnaissance, car cela attire des journalistes et des spectateurs du monde entier. Le fait que votre film soit montré est ce qui compte le plus.

«La vie est une source infinie d’histoires. Tant que je serai curieux et inspiré par ce qui m’entoure, je continuerai à faire des films.»

Comment en êtes-vous venu à explorer, voire inventer, le genre du «body horror»?

Je n’ai jamais utilisé le terme «body horror». Ce n’est pas une idée que j’ai inventé ni un concept auquel je pense consciemment. Par exemple, dans des films comme «A Dangerous Method» ou «Cosmopolis», je ne vois pas d’éléments d’horreur corporelle. Ce terme a été créé par des critiques pour établir des connexions entre mes films, mais ce n’est pas quelque chose qui guide mon processus créatif.

Pourtant, vous êtes considéré comme un maître de ce genre. Qu’en pensez-vous?

C’est une interprétation critique, et c’est très bien. Mais, en tant que réalisateur, je ne pense pas en termes de genre. Ces étiquettes n’influencent pas mon approche créative.

Après une carrière de plus de 50 ans, qu’est-ce qui vous motive encore à raconter des histoires?

La vie elle-même. La vie est une source infinie d’histoires. Tant que je serai curieux et inspiré par ce qui m’entoure, je continuerai à faire des films.


Par Qods Chabâa et Adil Gadrouz
Le 06/12/2024 à 10h02