Derrière les effervescentes cascades de palmiers, les boulevards, aveuglants de blancheur, s’élèvent ivoirines façades nacrées vernissées de lumières, poétiques splendeurs chuchotant dans les vents mémoires art-déco ciselées têtes de lions ou myriades d’angelots mêlant leurs ailes opale aux ailes des oiseaux.
Derrière les palmiers ployant sous bouquets de fruits d’or, les boulevards exhibent leurs merveilles Belle-époque et mauresques, divines mosaïques de fleurons outre-mer et de frises mystiques auréolant balcons et délicats oriels ajourés fer forgé filé frêle dentelle.
Derrière les allées où les arbres se pâment sous les ciels diluviens et les souffles marins, les boulevards scintillent cristallins flambantes souvenances de Rome ou de Paname par frontons et colonnes néoclassiques, par géométriques motifs d’art décoratif, par grappes de fruits et ornements floraux, élégantes offrandes faites par l’art nouveau à une ville-monde tressée mille esthétiques sublimement mêlées.
Sobre majesté de l’hôtel Excelsior, de murs immaculés et lettres gravées or parmi azulejos et étoiles émeraude surplombant les devantures chaux creusées de fenêtres en arcades serties gemmes octogonaux mimant un ciel de nuit, blanche, comme une fleur de jasmin ou de lys. Un escalier déploie ses marches de marbre blanc, accueille les visiteurs dans le hall tapissé mosaïques reflétant en miroir les plafonds boisés. Succèderont à ce splendide édifice, construit entre 1914 et 1916, d’autres réalisations comme celle de l’hôtel Lincoln ou Immeuble Bessonneau, construit en 1917 par Hubert Bride.Un peu plus loin, l’immeuble-passage du Glaoui, commandité par l’homme du même nom et conçu par Jean Balois et Marius Boyer, déploie envoûtantes ses savantes façades, monumentales, spectaculaires, exhibant une colonnade de marbre réunissant deuxième et troisième étages et soutenant, plus haut, une galerie de moucharabieh.
Casablanca la belle, muse de tant d’artistes, rebelles, venus du Vieux Continent donner là libre cours à leur talent et, entre 1910 et 1960, cette ville vibrant promesses d’éruptifs devenirs verra fleurir en son sein de véritables chefs-d’œuvre d’architecture qui font encore la fierté de ses habitants. Des chefs-d’œuvre portant souvent l’empreinte de l’Ecole des Beaux-Arts de Paris, mais signés de grands noms aussi bien français qu’espagnols, italiens ou allemands comme Prost, Laprade, Marrast, Tournon, Desmet, Suraqui, Zevaco, Laforgue, Morandi…