Cette semaine, la chirurgie esthétique a fait une nouvelle victime au Maroc: une jeune femme de 32 ans, admise dans une clinique de Rabat pour une liposuccion. Sa mort prématurée rappelle celle d’une autre jeune femme, elle aussi décédée dans une autre clinique, cette fois-ci à Casablanca, également suite à une liposuccion, ayant entraîné une embolie pulmonaire.
La mort de ces deux jeunes femmes à quelques mois d’intervalle ne saurait rester vaine. Car au-delà de la responsabilité avérée ou pas des cliniques ayant pratiqué ces interventions, il est grand temps de se pencher sur ce dangereux phénomène qu’est devenue la banalisation à outrance de la chirurgie esthétique.
Aujourd’hui, de la même manière qu’on poste sa photo sur Instagram en changeant son apparence à coup de filtres, elles sont de plus en plus nombreuses, et surtout de plus en plus jeunes, à vouloir transformer leur apparence physique à coups de bistouri.
Un petit nez à la libanaise, des fesses à la Kim K., une taille de guêpe, des cuisses affinées, des seins fermes et rebondis, une bouche pulpeuse et glossy, un ventre aux abdominaux tracés, des bras plus fins, une mâchoire sans bajoues, des yeux moins fatigués, un front sans expression… Pas de régime, pas de sport, pas de travail sur soi-même, on veut tout avoir sans faire d’effort. A vitesse grand V, la longue liste des desideratas de femmes en mal d’apparence et de confiance en elles-mêmes ne cesse de s’allonger.
Alors aujourd’hui, dans cette société de consommation à outrance, où l’on change de visage comme on change de look, où l’on veut tout, tout de suite, et bien sûr facilement, l’heure est grave et l’heure est surtout à la prise de conscience. Car chacun se doit de prendre ses responsabilités et d’admettre les conséquences de ses actes.
D’un côté les cliniques et les praticiens, qui ont pour devoir de respecter une certaine déontologie. Par chance, certains médecins qui possèdent encore une éthique prennent le soin d’évaluer le profil psychologique de leurs patientes, leur âge aussi, et de les freiner dans leur élan quand une trop grande fragilité psychologique transparaît à fleur de peau. Mais tous ne prennent pas tant de précautions, tous n’ont pas cette même intégrité et tous ne prennent pas non plus le soin de bien expliquer à leurs patientes qu’une «simple» opération peut entraîner la mort et ce, quand bien même la personne est en bonne santé.
De l’autre côté, il y a aussi le merveilleux petit monde des réseaux sociaux où elle est belle, sympa, éternellement jeune, maquillée naturellement au réveil, fraîche malgré une nuit d’insomnie… #Iwokeuplikethis , #Ilovemylife, sérieusement les filles?
En échange d’un coffret de make-up, d’une injection de botox gratuite, d’un soin rajeunissant ou de cadeaux, on n’hésite pas à vendre son âme au diable pour chanter les louanges des plus offrants, quitte à faire de la pub à des cliniques de chirurgie esthétique. Une belle parade pour certains praticiens qui grâce à des écervelées en mal de reconnaissance et d’argent peuvent ainsi contourner la loi qui leur interdit pourtant de faire de la pub.
Il est grand temps aujourd’hui que les influenceuses tiennent compte de la responsabilité qui leur incombe. Car quand on est suivies par des centaines de milliers, voire par des millions de personnes, on se doit de faire très attention aux messages que l’on dispense. Dans cette foule de visages inconnus qui nous suivent, scrutent notre quotidien et nous prennent comme modèle, se cachent des profils fragiles et… Influençables, d’où le nom de cette «profession».
Alors de la même manière que la loi impose désormais aux personnes ayant fait d’Instagram un business de mentionner les contenus sponsorisés, il devient urgent que soit interdite la promotion de pratiques chirurgicales ou esthétiques qui tendent à banaliser dangereusement la transformation de son corps.