Ce jeudi matin. Je me réveille furieuse, pressée d’en découdre avec deux imbéciles, deux crétins, j’arrête là, juste pour ne pas vous lasser, et le politiquement correct, je m’assois dessus.
Des noms d’oiseaux, j’en ai une série à leur service.
A cause de ces deux bipèdes, de ces deux plantigrades, de ces deux andouilles sur pattes, j’ai renoncé à exercer le métier formidable auquel je me destinais quand j’avais 21 ans, que j’avais encore des rêves et des idéaux plein la tête.
Le360 vous l’a appris hier soir: un journaliste du quotidien britannique The Guardian, une vénérable institution, a adressé à l’ambassade du Maroc, à Londres, un questionnaire particulièrement tordu, où il est question de défendre, par des formulations biaisées, et je ne grossis pas le trait, un immonde violeur en série, patron de presse de son état, actuellement en prison, et que tu y croupisses, petit immondice.
Hier soir, après avoir lu ça, j’ai dormi à poings fermés, un excellent Terra Vega chilien m’y ayant grandement aidée (leur cabernet sauvignon vaut celui de nos cépages, sans problème aucun –même soleil ardent, du raisin parfaitement maturé, et que vive l’Amérique Latine).
J’ai donc pas écrit hier soir, je n’en avais pas la moindre envie.
Mais c’est à vous dégoûter des médias.
Allons-y gaiement, donc: je ne suis pas, ou plus, journaliste. Oh que si.
Je suis une journaliste défroquée, et j’avais juré de mes grands dieux qu’on ne m’y reprendra plus.
Je travaille dans une rédaction, certes. J’y relis le travail de journalistes.
Ce n’est pas exactement la même chose.
Je suis une technicienne, dans ce métier.
Il y a un an encore, réfugiée chez des fils de pub, je vantais les mérites de lessives, de complexes immobiliers de luxe, et de je-ne-sais-plus-trop-quoi… Je me suis délibérément mise au service du grand capital, du fric-roi, du consumérisme-valeur suprême, bref, de ce qui fait cyniquement tourner cette planète.
Le journalisme, mesdames et messieurs, c’est tout le contraire de la com’, de la pub: c’est un appel, une vocation, un sacerdoce, une prêtrise.
Un journaliste détient un sacré pouvoir entre ses mains: celui de transmettre l’information à son public, de lui donner un sens.
Un journaliste se met au service de la vérité, celle de faits avérés, recoupés, au nom de valeurs suprêmes après lesquelles cette bande de pisseurs et de chieurs que nous sommes (éventuellement dotés d’un cerveau, mais ça reste encore à prouver dans certains cas, oui, je vous l’ai déjà dit, je suis furieuse)… sont encore en train de courir.
J’ai nommé: libertés, égalités, démocratie.
Un journaliste, c’est un humain d’exception. Ce n’est pas son ambition qui l’anime, mais les valeurs que je viens de mentionner.
Un journaliste n’est pas un sombre connard.
De la même manière qu’un médecin tient entre ses mains la vie de ses patients, et se doit donc d’être un humain irréprochable, porté par sa vocation, dévoué à elle, un journaliste n’est pas, ne doit pas, n’a pas le droit d’être, un p’tit con de merde.
Taoufik Bouachrine est un violeur, la justice du Maroc l’a prouvé et l’a condamné.
Et, en même temps, ce patron de presse d’un titre à succès, ce pourfendeur, ce défenseur d’immenses valeurs, les foule aux pieds.
Ça me rappelle quelqu’un.
Ce quelqu’un manipule justement, en sous-main, perfidement,
-un prestigieux avocat londonien
-une consultante senior en relations presse
-une pauvre femme trompée, bafouée, cocufiée, qui tient quand même, dans une forme terrible du syndrome de Stockholm, à continuer à défendre contre vents et marées le petit pervers qu’elle a épousé.
Il m’a fallu du temps, beaucoup de temps, pour me rendre compte de toute la portée de cette perversion.
Celle de ces types animés par l’ambition pour le pouvoir, et uniquement celui-ci, qui salissent ainsi les valeurs de cet immense métier.
Tu t’es reconnu.
Toi, oui, toi, qui tire les ficelles en sous-main de cette affaire, qui élabore d’incroyables scenarii (mais quel talent!) au point de réussir à berner The Guardian. The Washington Post.
Honte sur toi, petit pervers.
PS. Voilà, mesdames et messieurs, la raison pour laquelle je ne suis plus journaliste. On pourra discuter de ce métier quand une charte, celle de son éthique, sera posée. Je suis une chroniqueuse, une emmerdeuse, sur une planète qui marche sur la tête. Nuance.