Ainsi donc, un conseiller communal, ainsi qu’un député, tous deux issus de l’islamiste Parti de la Justice et du Développement –ce PJD qui a fait du poil sa suprême valeur, ce PJD que j’aime tant, que j’adule par-dessus tout–, viennent d’être pris en flagrant délit de triche au baccalauréat.
Ces tricheurs sont très certainement d’âge médian, mais ils avaient décidé de passer le bac.
J’entérine cette idée. Après tout, why not?
Quant à moi, j’ai 42 ans bien sonnés aujourd’hui.
Donc, flash-back, à cette lointaine époque de mes 18-19 ans.
La France, où j’ai fui (vite, vite) sitôt mon bac arraché, à Casablanca.
Grenoble. Rhône-Alpes.
La Clèmch’ me faisait chier.
La Clèmch’, une vieille bique, une prof de latin en lettres supérieures, section classique, une constipée aux cheveux déjà tous blancs, m’avait regardée de haut, car j’étais marocaine et je venais de Casa.
La Clèmch’ (c'était le surnom que lui avaient choisi les élèves de ma classe, eu égard aux chuintements mouillés qui concluaient chacune de ses sentences) ne m’avait donné aucune envie de continuer à faire du latin.
J’avais donc laissé tomber les versions latines, oublié tous mes savoirs acquis en termes de déclinaisons, de grammaire, de syntaxe, jusqu’à ce jour fatidique, où nous eûmes à traduire, en examen et en bon français, un extrait des Catilinaires, de Cicéron (un chieur, lui aussi, un tribun romain, un contemporain de César, d’ailleurs on se tape de ces deux-là comme de l’an quarante, où il ne se passa rien de particulier).
Je décidai, lors de cet exam’, de tricher. Avant tout, par mépris pour l’autorité de la Clèmch’.
Je sortis brusquement de la salle, prétextant une envie pressante.
Mais au lieu des toilettes, je me rendis chez moi (à deux minutes de là –la chance qu’elle a, elle habitait à 2 mn de là. Oui, oui, j’opine).
Arrachai les pages de l’extrait des Catilinaires en question.
Revins dans la salle d’examen.
Copiai avec succès l’extrait posé sur la chaise, niché entre mes cuisses.
Rendis ma copie.
Que la Clèmch’ refusa par la suite de noter.
A l’appel suivant, sur la liste de la classe, l’énoncé de mon nom fût incendiaire sous la voix chevrotante de la Clèmch’.
Ma tricherie n’ayant pu être établie, personne ne fut noté.
Oui, j’avoue aujourd’hui, plus de vingt ans plus tard, que j’ai triché, ce jour là.
J’avais, de toutes façons, abandonné ma pratique du latin, parce que j’avais un total mépris pour cette autorité qui m’avait, la première, méprisée à cause de ce que j’étais.
Revenons à présent au XXIe siècle, en cette année 2019, où un conseiller communal et un député de l’islamiste PJD ont tenté de passer le bac. Et au cours duquel ils ont été pris la main dans le sac, en flagrant délit de fraude.
Je ne leur en veux absolument pas d’avoir tenté de tricher.
A réfléchir un coup, quels sont donc leurs maîtres à penser?
Leurs figures d’autorité, en tant qu’affiliés à un parti, et donc à une obédience donnée?
Eh bien, d’abord, un psychiatre fou. Aujourd’hui, chef du gouvernement.
Un homme, qui a, un jour, sans doute au cours de ses études, pété un câble et qui croit que la pousse de poils sur son visage sera à même de résoudre les problèmes suscités par son surmoi trop développé (many thanks, Sigmund, tu fus chié, mais tu nous fus d’un grand secours).
Et puis, quelques années auparavant, en tant que premier chef d’un gouvernement islamiste marocain, un Fassi dévoyé.
Un Fassi issu de vieille souche, un Benkirane qui sautille, en ce moment même, via des vidéos postées sur les réseaux sociaux, pour tenter de se faire entendre, pour essayer, à la va-comme-je-te-pousse, de faire son grand retour sur la scène politique.
Allons donc, ces gens-là, ces Benkirane, ces El Othmani, ne sont pas crédibles, en tant que figures d’autorité.
Ce qu’ils sont, ce qu’ils prônent, est fondamentalement injuste.
Pour être un chef, il faut bien évidemment que l’autorité soit naturelle, et juste. L’islamisme prôné par le PJD n’est ni juste, ni naturel.
Au Maroc, l’islamisme n’est pas naturel. C’est là une greffe bien nouvelle.
De plus, à l’échelle de ce qu’est simplement être humain, l’islamisme est injuste.
Je n’ai eu, pour comprendre cela, il y a quelques années, qu’à regarder fugacement à la télé le sieur Abdelilah Benkirane, prier bras croisés, collé-serré, épaule contre épaule tout contre le roi, oublieux du séculaire rite sunnite, malékite, de ses ancêtres.
Mais ça, c’était avant que les règles du protocole ne viennent rappeler à l’ordre un autre islamiste, le psychiatre (fou) Saâd Eddine El Othmani, devenu à sa suite chef du gouvernement. Et qui, lui, est contraint de garder une respectueuse distance d’avec le roi. Saâd Eddine El Othmani se garde bien d’introduire, juste aux côtés d’Amir Al Mouminine, ses rites islamistes venus d’on ne sait où, nouvellement entrés au Maroc, que son Souss natal n’a pas connus jusqu’ici.
Et puis, peut-être plus grave encore, comment peut-on, en sus, en tant qu’islamistes, mépriser la moitié de l’humanité, chercher à avilir des femmes, proclamer sa supériorité en tant que mâles, et se croire, ensuite, justes?
Conseiller communal, issu du PJD?
Député du PJD?
Vous venez de faire une bêtise, identique à celle que j’avais faite face «l’autorité» de la Clèmch’.
Vous avez méprisé une autorité injuste et non-naturelle, celle de vos leaders qui vous jugent indignes d’être des humains.
Vous êtes, en ce qui me concerne, totalement pardonnés de votre acte de tricherie.
PS. Madame Françoise Clément, professeure de latin en lettres supérieures, section classique, était déjà très vieille quand elle m’avait eue comme élève. Elle a très certainement dû passer l’arme à gauche à l’heure qu’il est. Je ne lui en veux donc plus des préjugés ridicules qui furent les siens. Mais révisez, quant à vous, chers lecteurs, vos (sans doute nombreuses) stupides opinions préconçues. La remise en question, c’est beau et c’est possible.