Ma fille, à 7 ans: «maman, je peux changer de Dieu? Je veux celui de Valérie».
Valérie, chrétienne, allait à l’église le dimanche pour des cours de catéchisme pour enfants de 7 à 11 ans, dans des locaux accueillants. Des activités d’éveil et un enseignement religieux avec une pédagogie adaptée: discussions, vidéos et chants. L’ambiance est attractive. On leur apprend que Dieu est amour, bonté, clémence…
Ma fille: «son Dieu est gentil. Notre Dieu est méchant. Si on ne travaille pas bien, si on désobéit ou on parle en classe, il nous jette dans le feu».
L’instituteur d’arabe leur a donné des détails atroces, dont âadabe al qabre (le châtiment de la tombe) pour les indisciplinés: un ange torture le mort au point que la tombe vacille. Dieu accroche les enfants turbulents par les cils, sous les flammes…
L’instituteur: «je les éduque, sinon ce seront des chmakrya (des clochards)». Je lui demande pourquoi les élèves doivent apprendre ce verset du Coran: «Faites entrer les gens de Pharaon au plus dur du châtiment». (40 : 46) »
Il répond: «pour les effrayer». Mais ma fille n’est pas une Pharaonne! Pourquoi sortir une phrase de son contexte et l’appliquer aux élèves? Je lui demande de se limiter au cours d’arabe et de laisser aux parents l’éducation religieuse. A ses yeux, j’étais une kafira (une mécréante).
L’enseignement religieux, dans les écoles coraniques (msid) et les établissements scolaires, se fait souvent par la terreur.
On donne aux enfants l’image d’un Dieu méchant, un bourreau, chadidou al ‘ikabe. On ne leur dit pas assez qu’Il est ghafouroun rahim (clément et miséricordieux). Pourtant, le Coran débute par Al Fatiha: «au nom de Dieu, le Clément, le Miséricordieux».
La formule religieuse que les musulmans récitent le plus est la Basmala: bismi Allah arrahmani arrahim (Au nom de Dieu le Clément, le Miséricordieux), dite en toute circonstance pour se protéger et rester connecté avec la divinité.
Le mot châtiment est évoqué dans le Coran, mais les mots clémence et pardon y sont bien plus nombreux.
Un enfant qui apprend la religion doit être rassuré, sécurisé. On doit lui dire que Dieu est d’abord amour; Il pardonne, Il est indulgent, bienfaiteur… On inculque des valeurs à l’enfant et on lui dit que s’il les respecte, Dieu le récompensera.
Les valeurs ne s’inculquent pas par la peur. L’enfant doit en comprendre les raisons et les intégrer, se les approprier et en faire des réflexes qui se reflètent dans ses actes. Il doit se sentir soutenu par un Dieu qui l’aime.
La religion doit aider les enfants à s’épanouir, à avoir confiance en eux. Mais souvent, on les culpabilise, les terrorise, les angoisse, sans répondre à leurs questions. Ils doivent juste mémoriser.
Les enseignants des études islamiques ne sont pas toujours spécialisés en la matière. Ils peuvent induire en erreur les élèves et briser leur ambition. Amine: «au collège, on nous disait que la vie n’est qu’une épreuve. Ce qui compte c’est le paradis. C’est démotivant!». Et l’ambition, l’effort, la réussite?
De nombreux enseignants remontent les enfants contre leurs parents. Une mère: «mon fils est arrivé de l’école en pleurant, me suppliant de cacher mes cheveux pour ne pas être brulée par Dieu».
Ces études devraient donner de la sérénité et un équilibre et non perturber.
Une enseignante: «nos collégiens disent des aberrations apprises dans le cours de religion. Si je les corrige, leur professeur me le reproche. Alors je me tais pour éviter les problèmes».
La philosophie fait partie du programme. Il est fréquent que des enseignants d’études islamiques la dénigrent et la présentent comme une apologie de l’athéisme. Imaginez l’incohérence que l’on créer chez ces jeunes!
L’enseignement religieux est censé éduquer à la paix, à la tolérance, au respect de l’Autre… Mais souvent, on inculque aux élèves la haine et l’intolérance. Les enseignants leur disent que les non-musulmans sont des koffar (mécréants) qui doivent être combattus. Ils leurs apprennent la haine des nassara (chrétiens) et des juifs.
Ils exploitent des querelles ou des guerres vieilles de 14 siècles, pour justifier la thèse du complot: «les mécréants ont maltraité le Prophète et ils continuent à nous persécuter».
Je constate les conséquences de cet enseignement sur mes étudiants à la faculté. A la question «de quelle religion étaient vos ancêtres avant l’Islam?», ils répondent: «musulmans». Je leur dis qu’avant 14 siècles l’Islam n’existait pas. «Si. On nous a enseigné que les Musulmans ont toujours été musulmans». Ô rage…
Le rejet des autres religions est tel que mes étudiants du département d’études islamiques sont choqués quand je leur demande de lire la Bible pour connaitre les autres religions monothéistes: «haram! Jamais!». Je leur dis de les lire comme références historiques, non pour s’y convertir. Mais il y a une forte résistance.
Le discours dégradant à l’égard «des femmes qui ont pris trop de libertés», «qui n’ont plus d’hommes pour les commander» n’est pas rare. Parfois, le professeur recommande aux garçons de surveiller leurs sœurs, «des menaces pour l’honneur».
L’enseignement religieux doit avoir des objectifs clairs que les enseignants devraient respecter. Quel type de croyant voudrions-nous former? Quelles valeurs voudrions-nous lui transmettre?
Un enseignement religieux performant renforce la personnalité et le charisme des jeunes. Il les forme à l’éthique, à la citoyenneté, au civisme et au vivre ensemble. Il leur apprend à être des bâtisseurs de paix et de tolérance.