Vidéo. Affaire Mohcine Fikri: voici d'où venait l'espadon saisi

Le360

Alors qu'une enquête est en cours sur la pêche illicite à Al Hoceima, il s'avère que contrairement à ce qui a été affirmé, ce ne sont pas les bateaux qui pêchaient de l'espadon, mais bien de petites barques. Les premières réponses sur l'origine du poisson saisi dans l'affaire Fikri.

Le 03/11/2016 à 13h39

Six jours après le drame, et malgré la mise en examen de 11 individus, plusieurs questions restent posées dans l’affaire Mohcine Fikri, dont celle relative à l’origine de la marchandise qu’il transportait.

Le ministère de l’Intérieur a, pour rappel, interpellé le département de la Justice pour mener une enquête approfondie sur la pêche illégale dans la région d’Al Hoceima et c’est le Procureur général près de la Cour d’appel de la ville qui en a été chargé. L’objectif est de remonter toute la filière de la pêche illégale, allant des pêcheurs, des intermédiaires jusqu’aux conservateurs et commerçants.

En attendant, les conclusions, Le360 a mené sa propre enquête au niveau du port d’Al Hoceima pour tenter de remonter à l’origine de la marchandise saisie dans l’affaire Mohcine Fikri.

Premier constat, et non des moindres: contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce ne sont pas les armateurs de grands bateaux qui ont réalisé ces captures, mais plutôt de petits pêcheurs utilisant des barques de pêche.

Selon les témoignages recueillis, ces derniers se retrouvent régulièrement avec des gros poissons dans leur filet, comme l’espadon. Mais au lieu de les remettre à la mer vu que la pêche de cette espèce est interdite en ces temps, ils les ramènent tout de même au port avec le reste de leur prise du jour.

Pour les quelques pêcheurs sondés, le fait de ramener une ou deux pièces, ne peut être considéré comme une pêche illégale, tant qu’ils n’utilisent pas de grandes embarcations qui, elles, peuvent faire des captures nettement plus importantes.

Le hic est qu’avec la centaine de barques qui sortent en mer chaque jour à Al Hoceima, on peut facilement se retrouver avec de grandes quantités d’espadon au niveau du port et de son marché.

Pour le cas de Mohcine Fikri, il se serait approvisionné le jour du drame auprès de plusieurs intermédiaires avec qui il avait l’habitude de travailler. La mission de ces derniers consiste à guetter, pendant plusieurs jours, les «belles prises des pêcheurs». Une pièce par-ci, une autre par-là… ils arrivent à constituer rapidement un stock important qu’ils revendent à des grossistes, comme le défunt Mohcine Fikri, moyennant une marge d’environ 10% du prix.

Le jour du drame, le grossiste aurait ainsi récupéré près de 1,2 tonne d’espadon à un prix avoisinant les 50 DH le kilo. La valeur globale de la marchandise saisie lors de son acquisition serait de 60.000 DH.

Il faut aussi préciser que même si cette quantité peut paraître importante à la pesée, il suffit de quelques dizaines d’unité pour en rassembler autant, vu que l’espadon est un poisson dont le poids peut facilement dépasser les 200 Kg.

Bien entendu, dans le cas des prises des dernières semaines à Al Hoceima, il s’agit principalement d’espadon en bas âges et dont le poids reste inférieur à 100 kg. Une vingtaine de pièces permettait néanmoins d’atteindre les 1,2 tonne qu’aurait acheté Mohcine Fikri. Ce dernier comptait revendre son poisson dans plusieurs villes du royaume, et pas seulement à Al Hoceima où la concurrence entre grossistes serait plus importante que la demande réelle du marché. Selon des sources sur place, la marchandise du défunt Fikri était même destinée au marché de Casablanca.

La question qui reste maintenant posée est celle liée au contrôle. En effet, selon les pêcheurs, toutes les ventes étaient opérées au niveau du port au vu et au su de tout le monde. Pourquoi ce n’est que vendredi dernier, et qui plus est à l’extérieur du port, que les autorités ont décidé de contrôler la marchandise de Mohcine Fikri? L’enquête en cours permettra peut-être d’y répondre.

Par Younes Tantaoui et Mohamed chafi
Le 03/11/2016 à 13h39