Cela fait quatre mois qu’elle vit enchaînée dans une prison du Soudan, à Omdurman. Son crime? Avoir renoncé à l’Islam. Pour cela, elle a été condamnée à mort. Avant son exécution, prévue dans les deux ans suivant sa condamnation et comme si cela ne suffisait pas, il lui sera infligé 100 coups de fouet. Elle est médecin, s’appelle Meriam Ibrahim, est âgée d'à peine 27 ans et était enceinte au moment de sa détention. La jeune femme vient ainsi de mettre au monde, mardi, son enfant dans cette prison qui sent la mort pour le triste sort réservé à certains prisonniers mais, aussi, l’hygiène désastreuse qui la macule et les maladies qui y grouillent. Une petite fille qui a survécu dans cet enfer et dont la naissance est, d’après l’avocat de la maman, "une bonne nouvelle par rapport à l'épreuve terrible que Meriam a pu vivre". La petite fille, que les parents avaient prévu de prénommer Maya, a du moins encore un père libre, Daniel, qui devrait, d’après Me Mohaned Mustafa Elnour, pouvoir rendre visite à sa femme aujourd’hui.
100 coups de fouet pour adultère La loi islamique adoptée par le Soudan en 1983 prévoit en effet la peine de mort pour les musulmans qui épousent une autre religion. Or, Meriam Ibrahim est née de père musulman et se trouve ainsi être, pour s’être convertie au christianisme, sous le coup de cette loi. Le verdict est tombé, le 15 mai dernier, à Khartoum. La peine promise à cette jeune maman est celle de la pendaison, après la séance de torture prévue auparavant. Pourquoi ces 100 coups de fouet? Parce que son mariage avec un chrétien du Sud Soudan est considéré comme un acte d'adultère.
Le verdict? La jeune femme l'avait accueilli sans sourciller. Il lui aurait suffi, avait spécifié le juge de la charia islamique, d’abandonner sa nouvelle religion et de rentrer dans l’Islam pour échapper à la mort. "Nous vous avions donné trois jours pour abjurer votre foi mais vous avez insisté pour ne pas revenir vers l'islam. Je vous condamne à la peine de mort par pendaison", lui avait en effet lancé le juge Abbas Mohammed Al-Khalifa. Mais Meriam Ibrahim avait déclaré préférer la mort: elle est chétienne, avait-elle déclaré en soulignant n'avoir jamais fait acte d'apostasie. La naissance de sa petite fille la fera-t-elle flancher? Peut-être. Toujours est-il que la jeune femme n’a cédé jusqu’ici ni à la pression ni à la peur. Sa petite fille ? Une miraculée. Non seulement pour avoir survécu aux conditions d’hygiène de la prison, mais aussi parce que les oulémas ont longtemps discuté du fait de savoir si l’enfant porté par une mère condamnée pour apostasie était de même apostat ou s’il fallait attendre sa naissance pour l’exécution.
Meriam Ibrahim était déjà, d'après les militants des droits de l'Homme, maman d'un petit garçon de 20 mois au moment de sa détention. Son enfant aurait été emprisonné avec elle. Sa condamnation avait fait se soulever Amnesty International, plusieurs puissances européennes, et les Etats-Unis. La nouvelle de la naissance de sa petite fille ranimera sûrement la flamme militante qui s'était quelque peu affaiblie pour renverser la vapeur, peut-être, durant le temps qui lui a été accordé d'allaiter son enfant avant l'exécution.