Au Maroc, les petites et moyennes entreprises (PME) constituent le moteur de l’économie nationale. Actives dans des secteurs stratégiques tels que le textile, l’agroalimentaire ou l’automobile, elles génèrent emplois, innovation et intégration dans les chaînes de valeur mondiales. Pourtant, leur accès au financement demeure un obstacle majeur, révélant un paradoxe inquiétant pour un tissu entrepreneurial pourtant dynamique, relève le quotidien L’Economiste.
Une enquête menée par la Banque européenne d’investissement (BEI) dans le cadre du Trade and Competitiveness Programme (TCP), cofinancé par l’Union européenne, met en lumière une réalité contrastée. Près de la moitié des PME marocaines n’ont toujours pas accès au financement formel. Parmi les 150 dirigeants interrogés, seulement 49% ont obtenu un prêt auprès d’une institution financière, tandis que 35% ont dû se tourner vers des sources informelles (amis, famille ou réseaux personnels) jugées «risquées, peu durables et inadaptées aux besoins importants». Pire encore, 15% ont essuyé un refus pur et simple, soulignant un décalage persistant entre les besoins des entrepreneurs et l’offre du système bancaire.
Les obstacles ne se limitent pas à l’accès au crédit, indique L’Economiste. Les conditions imposées par les banques sont perçues comme rigides et inadaptées: 57% des dirigeants critiquent des taux d’intérêt trop élevés, 50% estiment que les garanties exigées sont excessives et 26% jugent leurs fonds propres systématiquement insuffisants.
Les freins administratifs aggravent la situation: plus de la moitié des PME évoquent des procédures lourdes, tandis qu’un quart déplorent le manque d’accompagnement et l’insuffisance d’informations sur les dispositifs existants. Ces contraintes structurantes limitent non seulement la croissance, mais freinent également l’internationalisation. Si 40% des PME marocaines exportent déjà, elles le font à une échelle limitée, faute de moyens pour répondre aux normes, certifications et exigences logistiques des marchés étrangers.
Le contraste avec l’Europe est frappant. Selon le rapport EIB Investment Survey 2025, 86% des entreprises de l’Union européenne ont investi en 2025, privilégiant le remplacement d’actifs plutôt que l’expansion de capacité, alors que cette dernière est une priorité pour 37% des entreprises américaines, lit-on. Au Maroc, le problème reste fondamentalement différent: il ne s’agit pas de choisir entre renouveler ou développer ses infrastructures, mais d’accéder simplement au financement nécessaire pour assurer la survie et la croissance de l’entreprise.
La transformation numérique et l’innovation technologique creusent également le fossé. Alors que l’Europe et les États-Unis accélèrent l’adoption de technologies avancées et d’intelligence artificielle, les PME marocaines restent en retrait, malgré leur présence dans des secteurs à fort potentiel compétitif. L’intégration de l’IA et des outils numériques pourrait pourtant constituer un levier majeur pour renforcer leur productivité et leur position sur les marchés internationaux.








