Grand couteau à la main, Mounia Hamdouni s’emploie à parer un bloc de cotes. Ce faisant, elle charcute avec autant de talent les idées reçues sur la place de la femme dans le monde professionnel. Car oui, Mounia est bouchère, un métier inhabituel chez la gent féminine, qu’elle assure avoir embrassé par passion, sinon par vocation. «Depuis mon enfance, j’ai rêvé de devenir bouchère. C’est un métier que j’ai toujours aimé, et l’idée d’en faire le mien m’a toujours accompagnée, sans que je n’ose vraiment franchir le pas», confie-t-elle.
Et pourtant, la voilà dans son échoppe, tablier en place et toque sur la tête, en train de passer les morceaux de viande dans la trancheuse électrique, avant de placer le résultat dans l’étal vitré. Mais pour réaliser ce qu’elle nomme «un rêve d’enfant», la jeune femme a dû franchir une somme d’obstacles, le premier étant sa propre appréhension par rapport à un secteur considéré comme strictement masculin. «J’ai eu plusieurs doutes et craintes au départ. J’avais peur de ne pas pouvoir réussir dans un domaine totalement dominé par les hommes», poursuit-elle.
Le déclic arrive enfin avec… la pandémie du Covid-19. «Les conditions difficiles que j’ai vécues durant la crise du coronavirus m’ont convaincu de revoir ma position et de tenter enfin ma chance», se rappelle-t-elle. Armée de son courage, de quelques connaissances du métier et d’un petit pécule à investir, elle décide de se jeter dans ce grand bain qu’est le monde de la boucherie.
Bien lui en a pris. Aujourd’hui, Mounia est propriétaire de sa propre boucherie à Marrakech et, près de deux ans après son ouverture, elle peut s’enorgueillir d’une clientèle fidèle. Une belle récompense pour un parcours qui ne fut pas toujours facile. «Il a d’abord fallu maîtriser le métier de boucher dans ses différents aspects, et s’affirmer dans un univers éminemment masculin», où les interactions avec les fournisseurs ou les confrères sont parfois compliquées.
Lire aussi : Denise Masson, cette femme qui a traduit le Coran
«En tant que femmes, et dans n’importe quel domaine, nous sommes constamment confrontées à des difficultés et des doutes. Mais si l’on s’arme de volonté et de persévérance, il est possible de tout surmonter», tonne-t-elle.
En plus de gérer sa boucherie, Mounia se veut aussi «un modeste exemple pour toutes les femmes qui doutent de leurs capacités». «J’espère que mon expérience incitera davantage de femmes à poursuivre leurs rêves, clame-t-elle. Et je le dis à toutes les femmes : si vous avez une compétence ou un savoir-faire, vous devez les développer et les mettre au service de vos rêves. Travaillez dur, restez fortes, et vous pourrez les réaliser».