Nouvellement introduite auprès des toxicomanes, «Lyrica» est une molécule qui peut être utilisée pour des usages thérapeutiques et médicamenteux. C’est donc un médicament qui, aujourd’hui détourné de cet usage, est devenu une drogue très bon marché, qui commence à circuler allègrement dans plusieurs quartiers populaires.
Par endroits, Lyrica a même réussi à supplanter «Lboufa», le nom marocain du crack, drogue dure qui se fume à l’aide d’une pipe à eau, dont l’aspect peut même être étrangement esthétiquement très plaisant. «Lyrica, ou Saroukh, est encore plus ravageuse et fait «décoller» les drogués, qui atteignent des paradis artificiels insoupçonnés, sans aucune garantie de retour», prévient Assabah, ce jeudi 5 octobre 2023.
«Un comprimé de ce médicament, prescrit aux adultes pour le traitement de certaines formes d’épilepsie, des douleurs neuropathiques ainsi que pour lutter contre certaines formes d’anxiété, se vend entre cinquante et soixante dirhams», explique le quotidien, malgré les restrictions strictes imposées aux pharmaciens «sur la vente de ce médicament».
Selon plusieurs interlocuteurs qu’Assabah a interrogés, «ce médicament se retrouve vendu clandestinement à des toxicomanes à cause de certains dealers qui l’achètent dans des pharmacies, après avoir présenté une ordonnance prescrite par un médecin traitant, ou à cause de la légèreté dont font preuve certains pharmaciens».
Abderrazak El Manfalouti, président du syndicat national des pharmaciens du Maroc, est pourtant formel: «Lyrica est un médicament qui ne peut être dispensé par les pharmaciens que sur la base d’une ordonnance sécurisée, conformément aux prescriptions d’un médecin, et en présence du patient, qui présente sa carte d’identité nationale».
Après la livraison du médicament, confirme-t-il, «le pharmacien enregistre toutes les données relatives au patient et à son médecin traitant, ainsi que leurs adresses, téléphones, ainsi que la date de consultation».
Le circuit pharmaceutique de ce médicament paraît donc extrêmement verrouillé. Pourtant, indiquent les interlocuteurs d’Assabah, Lyrica se retrouve vendu à l’unité au marché noir. Ils rappellent à ce propos l’exemple d’«une pharmacie à Casablanca, [dont le pharmacien] avait découvert la disparition de 35 boîtes de ce médicament».
Après cette découverte, explique Assabah, un employé de cette pharmacie a pris la fuite, et il est toujours activement recherché.
Selon Assabah, Lyrica «est un antiépileptique chimiquement apparenté à une substance présente dans le cerveau, l’acide gamma-amino-butyrique (GABA). Il est utilisé dans le traitement des douleurs neuropathiques, de l’épilepsie et des troubles liés à un stress post-traumatique, comme l’anxiété généralisée ou la bipolarité».