Un signe extérieur de richesse qui ne trompe pas: le Parti justice et développement (PJD) croule sous liquidités déposées auprès de la Trésorerie générale du Royaume, au point que cette dernière lui verse même une rémunération assez conséquente. Les produits financiers inscrits dans les comptes de la formation islamiste, entre 2017 et 2019, ont cumulé les 700.000 dirhams.
Mais n’allez pas croire que les frères consentent à encaisser ces produits d’intérêts, alors qu’il s’agirait de «Riba» (usure) selon leur doctrine extrémiste. Le PJD, en bon élève de la Realpolitik, se montre néanmoins pragmatique en réservant une utilisation spécifique à cette manne qu’il ne peut pas décliner. «Le parti s’interdit d’utiliser ces fonds pour financer ses affaires courantes. Ils sont orientés au financement des activités d’associations qui demandent du soutien. Ces dépenses sont détaillés dans un rapport annexe», explique le PJD aux magistrats de la Cour des comptes.
Il faut dire que la formation islamiste n’est pas en manque de sous. Etant la première force politique du Royaume, elle s’accapare la part du lion dans le financement octroyé par les pouvoirs publics. Le PJD empoche chaque année, depuis 2017, plus de 15,8 millions de dirhams de dirhams au titre des subventions servant à couvrir ses frais de gestion.
© Copyright : Source: Cour des comptes
De plus, les frères sont très disciplinés quand il s’agit de payer leurs cotisations. Le PJD est effectivement le parti qui récolte le plus d’argent auprès de ses adhérents: plus de 21 millions de dirhams chaque année. Ces cotisations ont néanmoins connu une légère régression en 2018, pour atteindre les 18 millions. Une baisse de régime qui pourrait s’expliquer par l’hésitation des adhérents, due à la lutte intestinale qui déchirait la formation qui devait changer de Zaïm.
Saâd Eddine El Othmani, porté secrétaire général, après avoir été nommé Chef du gouvernement, a su néanmoins renverser la vapeur. Les cotisations ont retrouvé leur rythme normal. Mieux encore, en bon Soussi, El Othmani a su dégager un excédent de près de 10 millions de dirhams. Une manne qui a d’ailleurs été réinvestie en immobilisations dès l’année suivante, durant laquelle le parti clôture ses comptes en équilibre.
Si le PJD est la formation politique la plus riche du Royaume, c'est aussi la plus dépensière. Ses frais de gestion dépassent les 27 millions de dirhams, dont plus de 7 millions de dirhams dédiés aux charges du personnel. Un record parmi les formations politiques!
© Copyright : Source: Cour des comptes
Quand il s’agit de congrès et manifestations, le parti dépense également sans compter, mais ce que le PJD aime faire par-dessus tout, c’est d’investir. Il a acquis entre 2017 et 2019 pour 22 millions de dirhams d’immobilisations et a surtout lancé début 2021 la construction d’un nouveau siège, qui devrait lui coûter dans les 38,5 millions de dirhams.
Le parti a donc su renforcer ses moyens financiers depuis qu’il est parvenu à devenir la première force politique du Royaume, il y a de cela dix ans. Il a aujourd’hui les ressources nécessaires pour continuer de défendre son rang, envié par bon nombre de ses challengers.