Argent des partis – EP13: les militants choyés durant les congrès nationaux

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Rendez-vous de renouvellement des instances décisionnelles des formations politiques, les congrès nationaux, qui doivent se tenir tous les quatre ans, sont l’occasion de dérouler le tapis rouge aux militants dits "de base". Voici ce que cela coûte aux écuries politiques.

Le 07/03/2021 à 14h54

Entre 2016 et 2018, l’Etat a distribué plus 18 millions de dirhams à sept grands partis politiques, au titre du soutien à l’organisation de leurs congrès nationaux. Mais ces assemblées générales des écuries politiques coûtent généralement nettement plus cher. C’est l’occasion pour les directions des partis de choyer leurs militants "de base" pour ce conclave "all-inclusive", qui dure généralement deux à trois jours.

Ces congrès nationaux rassemblent généralement des milliers de congressistes, représentants les adhérents du parti, issus des différentes régions où se tiennent auparavant des congrès territoriaux. Ce sont ces représentants qui ont en charge de désigner les nouvelles instances des partis (conseil national, bureau politique, pour citer les structures les plus répandues dans l’organigramme des formations marocaines). Sauf que, la plupart du temps, les jeux sont déjà faits: les secrétaires généraux sont élus par acclamation... Quand ils ne sont pas candidats uniques. 

La compétition entre aspirants au poste et zaïms qui s’accrochent à leur feuteuil se joue généralement au cours des travaux préparatifs. On peut se remémorer, par exemple, la bataille pour l’organisation du congrès du Parti authenticité et modernité (PAM) qui a failli aboutir à un moment à l’organisation d’un double congrès. L’épilogue de ce feuilleton a, in fine, abouti à une candidature unique: celle de Abdellatif Ouahbi à l’assemblée du parti, qui s’est finalement tenue en février 2020. Le coût financier de ce conclave ne sera divulgué que dans le prochain rapport de la Cour des comptes. Mais il devrait sans doute coûter bien moins cher que le congrès de 2016, au cours duquel Ilyas El Omari s'était offert un plébiscite à 5,7 millions de dirhams.

En termes de dépenses pour l’organisation des congrès, le record est détenu par le parti de l’Istiqlal. Plus de 9 millions de dirhams ont été engagés pour le duel opposant Nizar Baraka à Hamid Chabat, qui avait marqué les milieux politiques par la violence des affrontements entre les militants des deux bords. Le sacre de Aziz Akhannouch, en tant que président du Rassemblement national des indépendants (RNI) en 2017, avait coûté 8 millions de dirhams, soit 5 millions de plus que la subvention débloquée par les pouvoirs publics.

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Le parti qui arrive le mieux à optimiser les dépenses de son congrès national n’est autre que l’Union socialiste des forces populaires (USFP). Après sa prouesse consistant à imposer son parti dans la coalition gouvernementale en 2017, Driss Lachgar s’est relativement contenté des fonds publics pour organiser le Congrès du parti de la Rose, au cours duquel il s’est assuré un deuxième mandat à sa tête. Il n’a eu à mobiliser que quelque 600.000 dirhams, soit 18% du coût global de l’évènement.

A contrario, Nabil Benabdellah a dû bien frapper à de nombreuses portes pour réunir le 1,6 million de dirhams d’appoint qu’il a dû investir pour le congrès du Parti du progrès et du socialisme (PPS). C’est que l’Etat catégorise désormais ce parti, fondé par Ali Yata, comme un hizbicule, et ne lui a accordé que 468.000 dirhams pour son congrès. Un conclave que le camarade Nabil a malgré tout voulu comme assez grandiose, en y injectant 2 millions de dirhams. C’est qu’un troisième mandat successif se paie cher: il faut gâter un minimum les militants qui se déplacent de loin…

Par Fahd Iraqi et Youssef El Harrak
Le 07/03/2021 à 14h54