Emanant de plusieurs personnalités et organisations comme le Collectif contre l'islamophobie en France, l'appel à manifester a été lancé le 1er novembre dans le quotidien "Libération", quatre jours après l'attaque d'une mosquée à Bayonne (sud-ouest) et sur fond de débat ravivé sur le port du voile et la laïcité. Le climat a aussi été alourdi par une série d'attentats jihadistes en France depuis quelques années, notamment ceux du 13 novembre 2015 à Paris. Le message initial était de dire "STOP à l'islamophobie", à la "stigmatisation grandissante" des musulmans, victimes de "discriminations" et d'"agressions".
"On vient alerter, dire qu'il y a un niveau de haine à ne pas dépasser. On est ouverts à la critique mais il ne faut pas dépasser certaines limites dans l'agression", a déclaré à l'AFP un manifestant, Larbi, un entrepreneur de 35 ans. "On veut se faire entendre, prôner une société mixte et le vivre ensemble, ne pas être écartés de la société" a déclaré à l'AFP Asmae Eumosid, une femme voilée de 29 ans venue de la banlieue parisienne.
"On entend tout et n'importe quoi sur l'islam et sur les femmes voilées aujourd'hui. On essaie de stigmatiser les musulmans, de les mettre à l'écart de la société", a assuré cette ingénieure dans l'automobile. A Marseille (sud-est), quelques centaines de personnes - familles musulmanes, mais aussi syndicalistes et militants de gauche - étaient également rassemblées dimanche après-midi sous des pancartes "l'islamophobie tue". La foule a scandé "nous sommes tous des enfants de la République".
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Claudine Rodinson, retraitée de 76 ans, venue avec une poignée de militants du parti d'extrême gauche Lutte ouvrière, ne comprend pas ceux qui "à gauche, ont perdu leur dignité". "Il y a une propagande scandaleuse faite contre les musulmans, un amalgame entre terrorisme et islam", dénonce-t-elle. Depuis l'appel à manifester, la classe politique se déchire sur cette thématique. La notion-même d'"islamophobie" ainsi que l'identité de certains signataires de l'appel ont conduit une partie de la gauche, dont le Parti socialiste, à ne pas s'y associer.
Le PS a annoncé travailler à l'organisation d'une prochaine manifestation contre le racisme. Mais dans le cortège parisien, plusieurs élus de la France insoumise (gauche radicale) étaient bien présents au côté de leur chef de file Jean-Luc Mélenchon. Celui-ci a appelé avant le départ de la marche à ne pas "confondre quelques personnes avec la valeur de la cause qui est servie". Egalement dans la rue, Ian Brossat, porte-parole du Parti communiste, estime qu'"il y a un climat de haine contre les musulmans". "On ne peut rester les bras ballants", ajoute-t-il, fustigeant au passage les attaques de la présidente du Rassemblement national (extrême droite) Marine Le Pen.
Celle-ci avait estimé samedi qu'il s'agissait d'une manifestation "main dans la main avec les islamistes". Plusieurs membres du gouvernement ont également eu des mots très durs sur cette initiative, qualifiée d'"insupportable", "clientéliste et communautariste" par le secrétaire d'Etat en charge de la Jeunesse, Gabriel Attal. Evoquant des "ambigüités", Elisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire, a estimé que la marche dressait les gens "les uns contre les autres".