Quelques heures avant le début d'un mouvement de protestation prévu pour durer six semaines, un agriculteur palestinien a en effet été tué dans le sud de l'enclave par un tir d'artillerie israélien, selon le ministère local de la Santé. D'après un porte-parole de l'armée israélienne, deux "suspects" se sont approchés de la barrière de sécurité et des chars ont alors tiré dans leur direction.
Les dirigeants militaires et politiques israéliens ont prévenu que l'armée n'hésiterait pas à donner ordre d'ouvrir le feu à des tireurs d'élite en cas de tentative d'infiltration de Palestiniens en territoire israélien lors des manifestations prévues à partir de vendredi.
Les Gazaouis ont dressé des camps de tentes à proximité de la barrière qui clôt la frontière de Gaza avec Israël pour dénoncer le strict blocus imposé depuis plus de dix ans par I'Etat hébreu et la fermeture quasi permanente du point de passage vers l'Egypte. Ce mouvement de protestation, qui doit durer six semaines, est également dédié au "droit au retour" des Palestiniens qui, par centaines de milliers, ont été chassés de leurs terres ou ont fui lors de la guerre ayant suivi la création d'Israël en 1948.
Les rassemblements de vendredi, coup d'envoi de cette "marche du retour", coïncident par ailleurs avec la "Journée de la terre", hommage annuel rendu à six Arabes israéliens tués en 1976 lors de manifestations contre la confiscation de terres par Israël. Des commémorations sont également prévues en Cisjordanie occupée et dans la communauté arabe israélienne. Officiellement, ces six semaines de protestations sont organisées par la société civile. Mais elles sont soutenues par le Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza. Le mouvement islamiste a assuré qu'il veillerait à ce que personne n'approche dangereusement de la frontière.
Les responsables israéliens s'inquiètent néanmoins de la possibilité de voir des éléments incontrôlés mettre la situation à profit pour déclencher une confrontation. Israël et le Hamas se sont livré trois guerres dans l'enclave palestinienne depuis 2008 et observent depuis 2014 un cessez-le-feu tendu.
Les forces israéliennes ont attentivement suivi les préparatifs du mouvement de protestation. L'armée a indiqué avoir déployé d'importants renforts à la frontière pour empêcher des infiltrations notamment durant la célébration de Pessah, la Pâque juive, célébrée à partir de vendredi soir.
Le ministre de la Défense Avigdor Lieberman a menacé les Palestiniens qui tenteraient de passer en force en Israël ou d'endommager la barrière de sécurité, prévenant que "des centaines de tireurs d'élite (israéliens)" étaient déployés dans le secteur.
"La direction du Hamas joue avec votre vie", a écrit, en arabe, Lieberman sur son compte Twitter, s'adressant aux Gazaouis. "Tous ceux qui s'approcheront de la barrière (de sécurité) se mettront en danger. Je vous suggère de continuer votre vie quotidienne et de ne pas participer à une provocation".
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Les abords de la barrière sont régulièrement le théâtre de heurts coûtant la vie à des Palestiniens. L'une des préoccupations israéliennes est une tentative, spontanée ou non, de forcer la barrière, peut-être à l'occasion d'une marche massive avec des femmes et des enfants.
Alors que l'Etat d'Israël célèbrera en mai ses 70 ans, les Palestiniens attendent toujours la création de leur Etat, qui a rarement paru plus incertaine. Le droit au retour des réfugiés reste une revendication palestinienne fondamentale et, pour les Israéliens, un obstacle majeur à la paix.
Le statut de Jérusalem est également un important point de crispation, encore plus depuis que le président américain Donald Trump a décidé de reconnaître la ville comme capitale d'Israël et d'y transférer l'ambassade des Etats-Unis. Cette décision, prise le 6 décembre, puis l'annonce du transfert de l'ambassade américaine à la mi-mai, période qui coïncide avec le 70e anniversaire de l'Etat d'Israël, ont ulcéré les Palestiniens. Ces derniers veulent en effet faire de Jérusalem-Est, annexée par Israël, la capitale de l'Etat auquel ils aspirent.