Le pays a par ailleurs subi une panne d’internet «quasi totale», a déclaré dimanche NetBlocks, une organisation basée à Londres qui surveille l’accès au web dans le monde entier.
Les violences, qui ont éclaté le 15 avril à Khartoum et dans la région du Darfour (ouest), ont fait des centaines de morts et des milliers de blessés, selon l’Organisation mondiale de la Santé. Elles ont provoqué la fuite de milliers de personnes et entraîné la mobilisation de plusieurs pays pour évacuer leurs ressortissants.
La France a commencé une «opération d’évacuation rapide» de ses ressortissants et de son personnel diplomatique du Soudan, a annoncé dimanche le ministère des Affaires étrangères. Des ressortissants européens et venant de «pays partenaires alliés» sont également pris en charge.
Hélicoptères Chinook
Le président américain Joe Biden avait annoncé plus tôt que l’armée avait «mené une opération pour extraire le personnel du gouvernement américain de Khartoum», selon un communiqué publié tard samedi soir heure de Washington.
L’opération a fait intervenir trois hélicoptères CH-47 Chinook et permis l’évacuation d’un «peu moins d’une centaine» de personnes dont plusieurs diplomates étrangers, a précisé un haut responsable du département d’Etat, John Bass.
Il a en outre rejeté toute «coordination» avec les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), qui se battent contre l’armée régulière soudanaise et avaient affirmé auparavant avoir «coordonné» l’opération avec les Etats-Unis.
Cette opération n’a pas concerné les autres ressortissants américains se trouvant au Soudan, qui seraient plusieurs centaines, pour lesquels une évacuation n’est pas prévue «pour le moment», selon John Bass.
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Samedi, l’Arabie saoudite avait évacué du Soudan 91 citoyens saoudiens et environ 66 ressortissants de 12 autres pays vers le port de Jeddah.
Selon des témoignages recueillis par l’AFP, de fortes explosions ont secoué la capitale samedi et des échanges de tirs ont été entendus dans différents quartiers de Khartoum, dont les habitants sont privés en grande partie d’électricité et d’eau courante.
Les violences ont éclaté le 15 avril entre l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du Soudan depuis le putsch de 2021, et son adjoint devenu rival, le général Mohamed Hamdane Daglo , qui commande les Forces de soutien rapide (FSR), des paramilitaires redoutés.
Risque régional
Vendredi, l’armée avait annoncé avoir «accepté un cessez-le-feu de trois jours» pour l’Aïd al-Fitr, la fête musulmane qui marque la fin du mois de jeûne sacré du ramadan. Mais l’armée et les FSR n’ont pas respecté leurs engagements. Le bilan encore très provisoire s’élève à plus de 420 morts et 3.700 blessés, selon l’OMS.
Alors que les deux camps se livrent aussi à une bataille de communication, il est impossible de savoir qui contrôle les aéroports du pays et dans quel état ils se trouvent après avoir été le théâtre de violents combats depuis le premier jour du conflit.
Les deux généraux avaient pris le pouvoir lors du coup d’Etat de 2021, mettant un coup d’arrêt au processus vers une transition démocratique, après la chute du dictateur Omar el-Béchir, en 2019.
Les hostilités ont éclaté après qu’ils ont été incapables de s’accorder sur l’intégration des paramilitaires du général Daglo aux troupes régulières du général Burhane, après des semaines de négociations politiques sous égide internationale.
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A Khartoum, une ville de cinq millions d’habitants, de nombreux civils s’aventurent hors de chez eux uniquement pour obtenir des denrées alimentaires d’urgence ou pour fuir.
Cette semaine, l’Aïd el-Fitr a eu un goût amer pour eux. On célèbre habituellement cette fête «avec des pâtisseries et des cadeaux pour les enfants», mais cette année, ce sont «des coups de feu et l’odeur de la mort», confie Sami al-Nour, un habitant de Khartoum.
Les conditions de vie sont probablement pires au Darfour, théâtre déjà d’un terrible conflit dans les années 2000, personne ne pouvant se rendre dans l’immédiat dans cette région. Sur place, un docteur de Médecins sans frontières (MSF) évoque une «situation catastrophique».
Au Soudan, troisième producteur d’or d’Afrique et pourtant l’un des pays les plus pauvres au monde, les services de santé sont à genoux depuis des décennies et un tiers des 45 millions d’habitants souffre de la faim.
L’arrêt des opérations de la plupart des organisations humanitaires va aggraver la situation. Et le conflit menace désormais de gagner du terrain au-delà des frontières du Soudan, selon des experts.