Deux solutions sont possibles. Soit la Cour rejette le pourvoi en cassation introduit par le procureur général conservateur Zbigniew Ziobro et clôt définitivement le volet polonais des poursuites qui continuent aux Etats-Unis, soit elle renvoie l'affaire devant un tribunal pour être rejugée.
Même dans cette dernière hypothèse, et même si le tribunal en question se prononce pour son extradition, Polanski ne risquera pas d'être mis par la police polonaise dans un avion pour les Etats-Unis, car il vit en France qui n'extrade pas ses ressortissants. Mais il ne pourrait plus retourner en Pologne.
"Nous espérons une décision mardi mais la Cour peut toujours la renvoyer à plus tard", a dit à l'AFP l'un des avocats du cinéaste, Jerzy Stachowicz. Il a refusé d'indiquer si Roman Polanski, 83 ans, pourrait paraître à l'audience.
Le pouvoir conservateur polonais a rouvert en mai la procédure d'extradition de l'artiste contestant ainsi une décision du tribunal de deuxième instance de Cracovie qui avait tranché en faveur du réalisateur le 30 octobre 2015.
En présentant cette décision, le juge Dariusz Mazur s'était livré à un virulent réquisitoire contre la justice américaine. Selon lui, des juges et procureurs américains avaient "gravement violé les règles d'un procès équitable" dans l'affaire Polanski.
Ziobro avait affirmé à l'époque qu'il ne fallait pas favoriser Polanski en raison de sa carrière artistique. "Le droit est le même pour tous", a-t-il dit, alors que, selon lui, le réalisateur est soutenu "par la crème de la société mondaine et une partie des médias libéraux".
AssainissementSon initiative semble s'inscrire dans l'orientation générale du gouvernement populiste de Droit et Justice (PiS) qui déclare mener une oeuvre d'assainissement du pays en prenant pour cible les élites libérales.
Dans son pourvoi en cassation, le procureur général, qui est aussi ministre de la Justice dans le gouvernement populiste de Droit et Justice (PiS), a reproché au tribunal de Cracovie d'avoir "renoncé à élucider suffisamment" certaines circonstances légales en vigueur aux Etats-Unis et "jugé de manière sélective et trop unilatérale en faveur de Roman Polanski".
En 1977, en Californie, Roman Polanski, à l'époque âgé de 43 ans, avait été poursuivi pour avoir violé Samantha Geimer, 13 ans.
Après quarante-deux de prison, puis sa libération sous caution, le cinéaste qui avait plaidé coupable de "rapports sexuels illégaux" avec une mineure s'était enfui des Etats-Unis avant l'annonce du verdict, craignant d'être lourdement condamné, malgré un accord conclu avec la justice américaine.
La ligne de défense de ses avocats polonais consistait à démontrer que la demande d'extradition n'était pas fondée, compte tenu de cet accord et du temps passé par Polanski en prison en Californie, puis en 2009-2010 en résidence surveillée en Suisse. Ce dernier pays a refusé son extradition demandée par les Etats-Unis.
Samantha Geimer a réclamé à plusieurs reprises l'abandon définitif des poursuites, voulant tourner la page une fois pour toutes. Elle affirme dans ses mémoires avoir pardonné à Polanski: "Je ne lui ai pas pardonné pour lui, je l'ai fait pour moi".
Dans son autobiographie, le cinéaste donne sa version du reportage effectué pour "Vogue Hommes" avec des photos d'ados "sexy, effrontées", et prête à son modèle un comportement provocateur, dont l'expérience "ne faisait aucun doute".
Il versera 225.000 dollars à la jeune fille, dont la vie a elle aussi été bouleversée par cette affaire, avec la pression incessante des médias, de la police et de la justice.
Né en France de parents polonais, l'auteur de "Rosemary's Baby" et de "Chinatown" vit en France avec son épouse, l'actrice Emmanuelle Seigner, mais se rend souvent en Pologne. Il n'est jamais retourné aux Etats-Unis, pas même pour recevoir l'Oscar du meilleur réalisateur en 2003 pour "Le Pianiste".