La cour d'assises spéciale de Paris a suivi les réquisitions de l'avocate générale, qui avait appelé à punir sévèrement un homme devenu selon elle un "extrémiste total", enfermé dans un seul horizon: "le jihad".
L'Algérien de 43 ans a été reconnu coupable de "tentative d'homicides volontaires avec préméditation sur des personnes dépositaires de l'autorité publique" et "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste". Sa peine de prison est assortie d'une période de sûreté des deux tiers, et il a également écopé d'une interdiction définitive du territoire français.
Ouvert lundi, le procès s'annonçait singulier au regard de la personnalité de l'accusé: un étudiant doctorant et multidiplômé qui a basculé dans la violence jihadiste le 6 juin 2017, stupéfiant tous ses proches qui le décrivaient comme un homme doux, avenant, ouvert et démocrate.
Il l'est devenu encore plus mardi lorsque l'accusé, interrogé par la cour, n'a exprimé ni excuses, ni regrets, ajoutant avoir toujours la "satisfaction du devoir accompli" trois ans après l'attaque, sous le regard médusé des deux policiers attaqués présents à l'audience.
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Il a également réaffirmé son adhésion entière à Daech et à son ancien chef Abou Bakr al-Baghdadi, et refusé de condamner les attentats de Mohammed Merah, Amédy Coulibaly et des frères Kouachi (auteurs d'attaques en France, NDLR), qu'il considère comme des "moudjahidines (combattants de l'islam, Ndlr) martyrs".
Ces propos ont visiblement interpellé la cour et pesé dans le verdict. "C'est rare, y compris dans des procès terroristes, d'avoir quelqu'un à ce point satisfait de son action", a souligné l'avocate générale.
"Enfermé dans l'idéologie"
Le 6 juin 2017 à 16h19, Farid Ikken avait bondi sur un groupe de trois policiers, frappant l'un d'eux avec un marteau en criant "C'est pour la Syrie!". Le policier, légèrement blessé à la tête, et un de ses collègues avaient ouvert le feu et l'avaient blessé au thorax, avant de l'arrêter.
Dans ses affaires et à son domicile, les enquêteurs ont retrouvé du matériel de propagande jihadiste en nombre et une vidéo enregistrée juste avant l'attaque où il prêtait allégeance à Daech.
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Farid Ikken nie toute volonté de tuer, affirmant avoir voulu blesser dans un "acte de résistance politique" destiné à "attirer l'attention de l'opinion publique française" sur les "milliers de musulmans tués à l'époque en Irak et Syrie par l'armée française" dans ses frappes contre Daech au sein de la coalition occidentale.
Ces bombardements occidentaux massifs qui ont, pour la seule bataille de Mossoul (Irak) en 2016-2017, citée en exemple par l'accusé, fait plus de 10.000 morts parmi les civils, d'après les enquêtes de plusieurs médias occidentaux et ONG.
Pour l'avocate générale, la tentative d'homicide ne faisait aucun doute. Si le policier visé n'a été que légèrement blessé, "c'est uniquement parce que sa collègue a crié et qu'il a replié la tête par réflexe" alors que le coup se dirigeait vers le milieu du crâne.
"Justice a été rendue", a estimé auprès de l'AFP le policier blessé après l'énoncé du verdict. "Il était important que l'intention de tuer, qui ne faisait aucun doute, soit reconnue. Maintenant, on a l'esprit tranquille".
A propos de Farid Ikken, l'avocate générale avait décrit un homme qui n'avait jamais réussi à se fixer professionnellement ni personnellement, restant un éternel étudiant précaire, "frustré" et de plus en plus solitaire. Des "échecs" qui l'ont conduit à "s'enfermer dans l'idéologie jihadiste", jusqu'à cette année 2017 où, étudiant à Paris, il s'est abreuvé de propagande et de sanglantes vidéos de victimes des bombardements en Syrie et Irak.
L'accusé, qui en prison ne communique avec personne et se reclut dans la prière et la lecture, avait récusé ses avocats et n'a pas souhaité s'exprimer mercredi. La veille, il avait expliqué qu'au moment de passer à l'attaque, il était enfermé dans "un huis clos psychologique", "bouleversé" par ces vidéos.