Le démantèlement complet du business du Centre monétique interbancaire (CMI) n’a pas constitué pour Naps une fin en soi. L’établissement de paiement, créé en 2017, a décidé de réclamer une compensation financière pour près d’une décennie de «pratiques anticoncurrentielles» dont il estime avoir été victime. «Mais de quel ordre est cette indemnisation et qui devra la verser?», s’est interrogé le quotidien L’Economiste dans son édition du lundi 17 novembre.
Cité par le quotidien, le management de Naps avait laissé entendre sa volonté de demander réparation pour le préjudice subi depuis la création de la société, sans toutefois préciser le montant ni les modalités de cette compensation. Ce n’est qu’avec la publication des états financiers 2024 de Naps que le chiffre a été dévoilé. Le CMI a versé 15 millions de dirhams, complétés par le transfert gratuit d’un millier de contrats commerciaux. Ce geste a pour objectif de compenser les pertes subies et d’assurer la continuité d’un portefeuille dont la rentabilité annuelle devra dépasser 5 millions de dirhams de commissions pour que l’accord soit jugé équilibré. À titre de comparaison, cette indemnité reste supérieure au bénéfice net enregistré par Naps sur l’exercice 2024, qui atteint à peine un peu plus de 10 millions de dirhams, selon l’attestation d’examen signée par le commissaire aux comptes Mohamed Hdid.
D’après L’Economiste, cet accord a été conclu directement entre les deux parties, sans intervention du Conseil de la concurrence ni de Bank Al-Maghrib. L’objectif était d’éviter un procès long et coûteux, susceptible d’aboutir à une indemnisation bien plus élevée. La transaction a donc été réglée à l’amiable, dans la plus grande discrétion.
Cette procédure a provoqué un véritable séisme dans le secteur du paiement électronique pour les TPE et le e-commerce. La saisine du Conseil de la concurrence par Naps a entraîné le démantèlement du quasi-monopole du CMI, acteur historique qui détenait près de 98% des parts de marché depuis sa création en 2004. L’opérateur a été sommé de céder l’intégralité de son portefeuille de contrats commerciaux aux établissements de paiement, qu’ils soient filiales de banques ou non, avant le 31 octobre 2025.
«La mise en œuvre de cette décision s’est révélée complexe», explique L’Economiste. Confronté à l’ampleur de la tâche, le CMI a demandé un délai supplémentaire de six mois, porté jusqu’au 30 avril 2026, pour transférer un portefeuille d’environ 55 000 contrats. Ce sursis a été accordé par l’autorité nationale de concurrence, mais le Conseil devrait cette fois se montrer intransigeant.
Le processus reste en cours, notamment en raison de la nécessité de valoriser les contrats entre le CMI et les banques actionnaires. Une fois cette étape finalisée, les contrats seront cédés simultanément, chaque établissement de paiement reprenant ceux des clients de la banque dont il est filiale. L’ensemble de l’opération devra être bouclé au plus tard le 31 janvier 2026.
Depuis juin 2025, les nouveaux acteurs ont commencé à déployer leurs services, et environ 3 000 nouveaux contrats et TPE ont déjà été installés chez les commerçants. Toutefois, le hub des facturiers et portail de paiement en ligne Fatourati restera sous le contrôle du CMI.
Dans ce cadre, le CMI s’est engagé à transférer tous les contrats d’adhésion des commerçants aux systèmes de paiement par carte et en ligne aux établissements de paiement ou filiales bancaires spécialisées. L’opérateur doit également céder les contrats liés à son activité de passerelle de paiement en ligne et veiller à la viabilité économique, à la valeur et à la compétitivité des contrats pendant la période transitoire de 12 mois. Durant cette période, le CMI s’interdit de démarcher de nouveaux clients ou de signer de nouveaux contrats, mais conserve la latitude de gérer et de protéger les contrats existants jusqu’à leur cession effective.








