Mobile money: pourquoi le Maroc est toujours à la traîne

Photo d'illustration.

Seuls 12% des Marocains disposent d’un compte de paiement mobile.. DR

Revue de presse Le dernier rapport d’Afrobarometer met en évidence de profondes disparités dans l’adoption du mobile money à travers le continent africain. Alors que plusieurs pays d’Afrique subsaharienne affichent des taux d’équipement dépassant 80%, le Maroc figure parmi les derniers du classement. Ce décalage illustre un retard structurel, malgré un potentiel de croissance encore largement inexploité. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien Les Inspirations Éco.

Le 30/12/2025 à 19h25

Le dernier rapport d’Afrobarometer, consacré à l’usage des comptes de mobile money dans 35 pays africains, met en évidence de fortes disparités régionales. Le Maroc y figure à l’avant-dernière place du classement continental. Selon l’étude, reprise par le quotidien Les Inspirations Éco dans son édition du 31 décembre «seuls 12% des Marocains disposent d’un compte de paiement mobile, un taux qui place le Royaume juste devant la Tunisie». Cette performance contraste nettement avec la moyenne africaine, qui s’établit autour de 60%, et souligne un retard structurel du mobile money en Afrique du Nord, en particulier au Maroc.

Cette situation tranche avec celle observée dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne, où le mobile money s’est imposé comme un outil financier central. Le classement d’Afrobarometer met en lumière l’émergence de véritables marchés matures, caractérisés par une adoption massive, un usage quotidien et une intégration profonde dans les pratiques économiques. Le Kenya s’impose comme le leader incontesté du continent, avec environ 92% d’adultes équipés. Depuis son lancement en 2007, M-Pesa y structure largement l’économie quotidienne, des paiements courants aux salaires, en passant par les aides sociales. Dans ce pays, le compte mobile remplace fréquemment le compte bancaire traditionnel.

Derrière le Kenya, le Gabon affiche un taux d’adoption proche de 89%, porté par une forte urbanisation et par la domination des opérateurs télécoms dans les paiements de proximité. Le Ghana arrive en troisième position avec près de 88% d’utilisateurs, soutenu par un écosystème numérique complet où le mobile money joue un rôle clé aussi bien dans le commerce formel qu’informel. L’État ghanéen y recourt également pour certains paiements publics. Le Sénégal se classe quatrième avec un taux légèrement supérieur à 80%, le mobile money y étant utilisé comme levier d’inclusion financière, notamment dans les zones rurales. L’Eswatini complète le top 5 africain, avec un usage intensif à petite échelle, favorisé par la taille réduite du pays et par une bonne interopérabilité des services.

Ces pays leaders partagent plusieurs facteurs communs. Les cadres réglementaires y sont généralement favorables aux opérateurs mobiles, avec des modèles simples et flexibles, adaptés aux réalités locales. Les réseaux télécoms couvrent largement les territoires, y compris les zones rurales, grâce à des investissements continus. Les coûts restent accessibles pour les ménages modestes et les services proposés répondent à des besoins quotidiens concrets, tels que les transferts d’argent, les paiements et l’épargne de précaution. «Le mobile money s’intègre ainsi directement à l’économie réelle et soutient des revenus souvent irréguliers», explique Les Inspirations Éco.

À l’inverse, l’Afrique du Nord affiche les taux d’adoption les plus faibles du continent, avec une moyenne inférieure à 30%. Les paiements en espèces y demeurent largement dominants et les habitudes financières évoluent lentement. La bancarisation classique conserve une place centrale, tandis que les cadres réglementaires freinent encore l’innovation mobile. Les procédures d’autorisation sont souvent longues et complexes, et la valeur ajoutée du mobile money reste peu perçue par une partie des usagers.

À l’échelle continentale, le mobile money s’impose néanmoins comme la principale porte d’entrée vers l’inclusion financière. Alors que 37% des Africains disposent d’un compte bancaire, 60% possèdent un compte mobile. Ce modèle réduit les barrières d’accès, limite les déplacements et améliore la sécurité des transactions. Il permet aux ménages de mieux faire face aux chocs économiques, aux petits commerçants de fluidifier leurs paiements et aux États de renforcer la traçabilité des flux financiers. Malgré des défis persistants, notamment en matière d’interopérabilité, de cybersécurité et de protection des consommateurs, le mobile money apparaît comme un pilier structurant des services financiers africains de demain.

Par La Rédaction
Le 30/12/2025 à 19h25