Gaz butane: des subventions qui pèsent lourd sur le budget marocain

Des bonbonnes de gaz butane.

Revue de presseFace à une consommation en forte hausse et à la nécessité de financer la généralisation de l’assurance maladie, le gouvernement a engagé une réforme progressive visant à réduire ce coût historique. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien Les Inspirations Éco.

Le 27/10/2025 à 19h54

Depuis 1992, la bonbonne de 12 kg se vend encore 50 dirhams à l’épicerie, un prix figé depuis plus de trente ans. Cette stabilité, qui pouvait sembler rassurante pour le consommateur, pesait lourdement sur les finances publiques. «Avec l’émergence des besoins liés à la généralisation de l’assurance maladie, le gouvernement a dû revoir sa copie et repenser sa politique de subventions, en commençant par le gaz butane, produit particulièrement coûteux par rapport au blé tendre ou au sucre», écrit le quotidien Les Inspirations Éco dans son édition du 28 octobre.

Au cours des huit premiers mois de 2024, le Trésor a déboursé en moyenne 1,07 milliard de dirhams par mois pour maintenir le prix du gaz butane à un niveau abordable. Sans cette subvention, le coût réel de la bonbonne aurait été de 104 dirhams. Concrètement, l’État prenait en charge 53,47 dirhams par bouteille, avec un pic de 70 dirhams atteint en février. Sur l’ensemble de l’année, la subvention moyenne pour une bonbonne de 12 kg s’est élevée à 61 dirhams. L’effet de la réforme du prix a été immédiat. Les dépenses de soutien ont diminué de 10% en 2024, s’établissant à 15 milliards de dirhams. Selon le ministère des Finances, ces économies de 1,7 milliard de dirhams s’expliquent par la hausse du prix de vente de la bonbonne, par une croissance modérée de la consommation et par la dépréciation du dirham de 1,87% par rapport au dollar.

Le diagnostic, lui, reste inchangé. Les subventions du gaz butane représentent un coût colossal pour le budget de l’État. Depuis 2012, près de 167,2 milliards de dirhams ont été consacrés à ce poste. Comparé à d’autres pays subventionnant le gaz, le Maroc figure parmi les plus généreux. Les subventions du butane dépassent 4% des dépenses publiques, un niveau qui le place en tête mondiale et bien au-dessus de pays comme l’Inde, l’Égypte, l’Indonésie ou la Tunisie, où ces aides ne représentent généralement que 0,2% à 3% des dépenses publiques. La charge financière est donc considérable et, à terme, difficilement soutenable. Aujourd’hui, l’État prend en charge plus de 55% du prix de vente du gaz pour le consommateur.

«Les autorités reconnaissent également que le système actuel, fondé sur une subvention uniforme pour tous les ménages, est loin d’être optimal», souligne Les Inspirations Éco. Les classes moyennes urbaines A et B+ sont les principales bénéficiaires, multipliant les bonbonnes pour la cuisine, la salle de bain et le stockage. Le détournement du gaz par certains agriculteurs en zones irriguées est un phénomène largement connu, mais rarement sanctionné.

La consommation de gaz butane, elle, ne cesse de croître. Depuis le début des années 2000, elle a presque triplé, faisant du Maroc l’un des plus grands marchés mondiaux. La hausse s’explique par l’augmentation démographique, l’urbanisation, l’accessibilité du produit et l’amélioration des conditions de vie. De janvier à août 2025, la consommation a atteint 154,85 millions de bonbonnes de 12 kg, avec des pics saisonniers en janvier, avril et mai, et un creux en août. En 2024, la consommation annuelle a totalisé 235,7 millions de bonbonnes, soit une hausse de 1,5 million par rapport à l’année précédente.

Dans le cadre de la réforme des subventions, le gouvernement prévoit un ajustement progressif sur trois à cinq ans, afin de sécuriser le financement de la généralisation de l’assurance maladie. La première étape a été franchie en mai 2024, lorsque le prix de la bonbonne de 12 kg est passé de 40 à 50 dirhams. D’autres augmentations graduelles sont prévues, permettant de dégager des marges de manœuvre budgétaires tout en limitant l’impact sur les ménages.

Par La Rédaction
Le 27/10/2025 à 19h54