Qui a dit que les Marocains ne s’intéressent pas à la politique? C’est une erreur monumentale de le croire. Le Marocain et la politique ne font qu’un. Je devrais même dire “ne font qu’une” car quand je dis Marocain, j’embrasse aussi la Marocaine. Et je devrais le faire d’autant plus que ces derniers jours cette dernière - qui finira sûrement un jour par devenir première - fait beaucoup parler d’elle.
D’abord, à travers la composition du nouveau gouvernement qui s’est avéré encore plus machiste et encore plus archaïque que le précédent. Huit femmes, oui, mais une seule vraie ministre! Les 7 autres, et qui sont probablement aussi intelligentes sinon plus que leurs confrères mecs, n’ont eu que des postes de “déléguées” ou de “Secrétaires”. Oui, Secrétaires d’Etat, oui, mais secrétaires quand même.
Et puis, il y a une ou deux semaines, elles ont fait parler d’elles à travers le livre collectif “Les hommes défendent l’égalité en héritage” auquel ont collaboré 100 intellectuels et artistes, tous mâles, mais qui n’en bousculent pas moins beaucoup de certitudes amorphes et de croyances figées de notre société. Et ce qui est encore plus sympa, c’est que parmi les co-auteurs de cet ouvrage révolutionnaire, se trouvent le patron de nos oulémas en personne et le fameux Abou Hafs, l’ex-salafiste converti au costume-cravate et à la modernité.
Pour revenir à la politique, je suis de plus en plus impressionné par l’intérêt presque démesuré qu’accordent nos concitoyens et nos concitoyennes à la politique en général et à celle des autres, en particulier. Et les autres, ce sont, entre autres, les étrangers. C’est dingue ce que les élections présidentielles françaises ont occupé, voire préoccupé, les Marocains et les Marocaines. Et va que je te critique “l’argentier” Macron ou le “souverainiste” Dupont-Aignan, ou que je tape sur la “fasciste” Le Pen ou sur le “faux socialiste” Hollande, ou que je salue “le courage ” de Mélenchon ou “le franc-parler” de Poutou...
Et ne croyez pas qu’il ne s’agit de microcosmes d’Anfa ou de Souissi. Je vous assure que j’ai entendu, pas loin que ce lundi, des discussions enflammées et bruyantes sur la défaite de Fillon et de Hamon au premier tour dans un café des Habous, sous les yeux incrédules et les oreilles ébahies de touristes français en visite dans le quartier. Moi, ce qui me fait plus marrer, c’est que la majorité d’entre nous n’a jamais voté et ne votera peut-être jamais.
Cela dit, et c’est là notre spécificité, cette passion et cet intérêt sont souvent passagers. En effet, la plupart du temps, le débat - si on peut appeler ça un débat - vire très vite vers des sujets plus terre-à-terre et plus terroir-terroir, comme par exemple, l’affaire de Saad Lamjarred ou celle plus récente du désormais tristement célèbre HD plus connu sous le nom de “Moul Ferrari”. Et à ce propos, chacun y est allé de son récit ou de son interprétation. Je ne vous parlerai pas de tous ceux, très nombreux, qui en veulent aux parents de ce “barhouch dial fchouch ” (ce gamin gâté) pour ne pas l’avoir bien élevé.
Et il y a ceux qui croient dur comme fer que cette histoire a été créée de toutes pièces pour, je cite, “nous faire oublier le fiasco du gouvernement” ou bien que ”c’est juste pour nous faire passer la pilule de la future augmentation de la bouteille de gaz butane”. Mais presque tous sont persuadés que ce gosse ne lui arrivera absolument rien, parce qu’au Maroc “les riches ne vont jamais en prison”. D’ailleurs, alors que toute la presse avait rapporté qu’il avait été arrêté et qu’il se trouvait en taule à Salé, j’en ai entendu qui juraient leurs Grands Dieux qu’il avait pris l’avion et qu’il se trouvait déjà en France bien en sécurité.
Tout cela pour vous dire et vous convaincre que malgré les apparences et malgré de fausses croyances, les Marocains et les Marocaines aiment beaucoup discuter politique, mais, en faire, ça c’est une autre affaire...
Bon, il est temps que je vous dise vivement une vraie implication dans nos vraies affaires publiques.
Et vivement mardi prochain.