Hier, le 4 novembre 2021, la chaîne algérienne Al Hayat a gratifié son public d’une émission à mi-chemin entre le grotesque et la dangerosité.
Dans cet OVNI audiovisuel baptisé Crisis, où l’on débat donc de sujets de crise comme le laisse supposer le nom de l’émission, trône le dénommé Said Medioui El Mokhtar , un vieux militaire à la retraite qui se fait vraisemblablement chier pendant ses vieux jours et à qui on a donné l’opportunité d’occuper son temps libre en éructant des âneries à la télévision.
Faute d’avoir trouvé des invités qui daignent se baisser à son niveau, ou peut-être en raison d’un ego démesuré qui ne saurait souffrir d’être contredit lors d’un vrai débat, l’animateur de sa propre émission débat donc avec lui-même, et s’est attaqué hier, du haut de son vieil âge départi de sagesse, à la crise que traversent actuellement le Maroc et l’Algérie.
Hier donc, notre homme, habillé de son plus beau costume, a passé près de 25 minutes à éructer, vociférer, insulter et menacer le Maroc, mais aussi les Algériens qui ne se rangeraient pas à son avis.
Au bord de l’apoplexie, les yeux exorbités, la mâchoire peinant à retenir son dentier de foutre le camp, il a dangereusement vrillé en appelant à des représailles contre le Maroc suite à la mort de trois citoyens algériens dans une zone de guerre, située à l’est du dispositif de défense, où ils n’étaient donc pas supposés être. Et pire encore, le présentateur a ouvertement appelé les membres du Polisario à commettre des attentats à Casablanca, Rabat et Marrakech.
L'émission "Crisis", diffusée sur la chaîne algérienne Al Hayat, le 4 novembre 2021.
Notre animateur en herbe, qui s’est même dit prêt à reprendre les armes pour défendre son pays et «à qui ni le Maroc, ni Israël ne font peur», a commencé ce monologue surréaliste, en se moquant des Forces Armées Royales, tentant de minimiser leurs compétences, et a décrit le Maroc comme un pays qui ne dispose plus ni d’électricité, ni de gaz, ni même de nourriture, et qui serait en proie à des manifestations dans toutes ses villes. Selon notre expert, ce serait grâce à l’Algérie que les villes marocaines frontalières subsisteraient jusqu’à présent. Et on vous le donne en mille, le Maroc tenterait de détourner l’attention de son peuple mécontent en provoquant l’Algérie. Ça ne vous rappelle pas quelque chose?
Et pour mieux écorner l’image du pays, le spécialiste s’en est pris au prétendu point fort du Maroc, son tourisme. Attention, ça va faire mal… «Quel tourisme avez-vous? Des hôtels?», a-t-il lancé à l’égard des Marocains. «Nous, nous avons des paysages magnifiques, au Sahara et près de la mer»… Ah, oui parlons-en de ce tourisme de renommée mondiale en Algérie dont personne ne parle. Pourquoi ce secret est-il si bien gardé? «Nous ne pouvons pas donner ce que vous vous donnez! Ce serait haram au vu des mœurs de notre société», poursuit-il, ratant l’occasion de nous balancer un bon vieux «toutes des putes, sauf ma mère». Algérie: 1 - Maroc: 0.
«Réveillez-vous!», a-t-il ensuite braillé à l’adresse de ses concitoyens, se souvenant peut-être entre deux éclairs de lucidité des beaux jours où il éructait des ordres à ses troupes. Mais se réveiller pourquoi au juste? C’est déjà l’heure d’aller faire la queue pour acheter un sachet de lait? Courir désespérément d’un entrepôt à l’autre à la recherche de patates. Ce tubercule est le sujet national number one depuis plusieurs semaines, reléguant à une division inférieure l’escalade du régime contre le Maroc dans l’esprit de la majorité des Algériens.
«A partir d’aujourd’hui, je demande à tous les Algériens de combattre ces gens qui ont profité de l’Algérie et qui nous attaquent», a lancé le colonel défroqué. Et se gargarisant d’un extrait télévisé de l’entretien accordé par le président Abdelmadjid Tebboune à un média algérien il y a quelques semaines, il reprend en chœur sa phrase fétiche, tel un hymne national: «celui qui nous cherche nous trouve!», ou encore «celui qui nous attaque regrettera le jour où il est né». Allez, on va être sympa, jamais deux sans trois, en voici une autre de pépite: «on n’a pas besoin de la bombe atomique, on a besoin d’une grande armée avec la cohésion de son peuple. C’est ça notre bombe atomique!».
Et oui, le problème est bien là, pour mener une guerre contre le Maroc, encore faut-il convaincre la rue algérienne que ce conflit est justifié et qu’il en vaut la peine. Et comme tout le monde le sait, rien de tel que les menaces et les insultes pour convaincre la population dans un régime où la junte militaire dicte ses lois, hum hum… «une grande nation démocratique». Qualifiant de traitres à la nation, de gens ayant peur de perdre leurs visas ou de se voir refuser leurs crédits, les Algériens qui ne seraient pas d’accord avec lui, et autres agitateurs du Hirak, l’animateur a donc appelé à la cohésion nationale pour une bonne cause, la guerre. «Ceux qui prétendent que c’est une diversion politique pour arrêter le Hirak, votre pays est en danger! Il faut trancher aujourd’hui, qui est Algérien et qui ne l’est pas!»…
Ok très bien, et concrètement comment ça se passe pour faire la guerre au Maroc? On enfile ses bottes de pluie, on s’arme d’un couteau de cuisine et on court toujours tout droit jusqu’à heurter un mur de sable? Et puis, au fait, le peuple marocain, il nous a fait quoi au juste? Ne sommes-nous pas des peuples frères?
«Ça, ce n’est pas un peuple frère! C’est un peuple qui a tourné le dos à l’islam, aux Arabes. Le Maroc est un pays vendu à la France, à Israël et dont le peuple passe son temps à fumer du kiff et à ne rien faire. Il n’y a pas de peuple frère, ça c’est de la démagogie», vocifère notre ex-militaire, à qui on proposerait bien pour la peine un petit joint pour se détendre un peu, et qui considère qu’il n’a qu’un seul frère au Maroc, Zefzafi.
En bref, y a pas de mal à flinguer des fumeurs de joints doublés de grosses feignasses… nous les Marocains. «La riposte va être fulgurante, destructrice», promet-il. Car, poursuit-il à l’adresse du Maroc (on en tremble encore), «nous avons d’autres options. Fermer l’espace maritime, vous rendre vos immigrés pour qu’ils grossissent les rangs de votre front social, couper l’alimentation aux frontières, plus de gaz… et regardez avec Israël ce qu’ils vont vous donner!» ironise-t-il, un sourire en coin, suivi d’un long silence lourd de sous-entendus… Suspens à son comble. Terreur quant tu nous tiens!
Puis, notre ex-militaire, après avoir fait la ô combien brillante démonstration de la faiblesse du Maroc, et galvanisé ses troupes, s’est attaqué aux instances internationales pour mieux expliquer aux Algériens qu’il est temps de couper les ponts avec tout le monde. Pour ce va-t-en guerre, il est désormais hors de question pour l’Algérie de se laisser donner des leçons sur la liberté d’expression, les droits de l’homme ou encore la liberté de la presse par l’ONU ou l’Union européenne, premières instances selon lui à ne pas respecter ces lois universelles.
C’est là qu’on en arrive à la pépite des pépites de ce show, l’appel à commettre des attentats au Maroc. On aurait pu croire qu’après avoir appelé ses concitoyens à se lever tous unis pour faire la guerre au Maroc, l’homme présenterait une stratégie militaire digne de ce nom. Mais non, faute d’avoir les moyens de ses ambitions, cet ancien colonel a lancé un appel… au terrorisme. Et qui appelle-t-il au sacrifice suprême? On vous le donne en mille: les membres du Polisario. Ben oui, qui d’autres? Des militaires grabataires reliés à une machine qui fait bip-bip et qui s’alimentent par perf’? Le Polisario, c’est de la chair à canon toute trouvée pour faire le sale boulot que de vieux galonnés endimanchés, décriés par la rue, ne peuvent plus faire eux-mêmes.
La stratégie de ce haut stratège de l’armée est simple. «Le FLN a transposé la guerre en France. De la même manière, il faut que le Polisario transfère la guerre eu Maroc, à Rabat, à Casablanca, (…) à Marrakech», explique-t-il. Car, «l’indépendance ne se donne pas, elle s’arrache par la résistance, par la guerre. Acceptez le sacrifice suprême de mourir pour votre cause», jubile-t-il et «arrêtez d’attendre après les instances internationales qui ne peuvent rien pour vous, qui se jouent de vous. Il est temps de changer les choses. La seule solution est la guerre».
Voilà, voilà, voilà. Il ne faut pas espérer que le ministère de la Communication algérien fasse son job, à savoir lui couper la chique et sanctionner le média au sein duquel il officie. Non, le niveau de cet ancien colonel est à l’image d’un pays à la dérive.
Nous autres Marocains, et autres fainéants/kouffars de notre espèce, nous apprêtons à savourer pleinement ce petit week-end qui s’annonce bien, faute de coupures de gaz, de crise alimentaire et de guerre civile qui pourraient contrarier notre programme. En regardant ce guignol, on se dit que si les officiers supérieurs algériens sont nourris au même biberon, on peut dormir tranquille très longtemps. Le président Tebboune peut pérorer, les généraux séniles qui tiennent les rênes de l’appareil sont incapables d’engager un affrontement direct avec le Maroc. Ils se sont trop habitués à ce que les séparatistes du Polisario aillent au charbon à leur place.
Bons baisers de votre peuple frère…