Casablanca plus blanche que jamais! Nabila Rmili cherche à lustrer son début de mandat par un coup de ravalement des façades des principales artères de la métropole. Portée par son enthousiasme, la nouvelle maire s'est même quelque peu emmêlée les pinceaux sur Twitter.
En annonçant sa fierté de «cette campagne lancée par la ville et que plusieurs habitants ont déjà adopté: 1400 immeubles peints tout en blanc», elle a laissé croire que les travaux avaient effectivement démarré. «En réalité, les immeubles en question ont à peine été identifiés dans le cadre d'une vaste campagne de salubrité publique, lancée par les services de Casa Prestations», nous explique une source proche du dossier.
Entre obligation et adhésionCe dont Nabila Rmili devrait être fière, en revanche, c'est d'être la première présidente du Conseil de la Ville à activer un décret communal qui remonte à 2014. Ayant trait à l'entretien des façades dans le périmètre urbain, cette réglementation stipule que tous les immeubles de la métropole sont censés exécuter des travaux de ravalement au minimum une fois tous les cinq ans. «Mais rares sont les syndics de copropriété qui réalisent ces travaux spontanément. Cette fois-ci la ville cherche à les sensibiliser et à les mobiliser dans le cadre de cette opération visant à redonner à Casablanca son visage attractif», nous explique un élu de la ville.
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Au-delà de la sensibilisation, le décret prévoit une procédure qui pourrait accuser du retard. Un délai de trois mois est effectivement accordé aux syndics des immeubles notifiés pour effectuer ce ravalement de façade, sinon ils reçoivent un avertissement à partir duquel ils auront un délai de deux semaines pour exécuter les travaux. Pour les récalcitrants, le processus se clôture par «la réalisation des travaux par les services communaux, aux frais des copropriétaires». Mais encore faudra-t-il trouver les fonds nécessaires pour financer ces travaux, et surtout assurer le recouvrement de la facture envoyée aux syndics…
«Il faut admettre que tout repose sur la bonne volonté et l'adhésion des citoyens. Surtout que 1400 immeubles ne représentent qu'une partie des façades concernées par cette première phase incluant exclusivement les principales artères», nuance une source proche de la Commune. «Actuellement, nous en sommes à peine au stade d'identification des immeubles. Même les notifications n'ont pas encore toutes été remises car elles supposent la signature des présidents des communes», confirme cet élu qui espère voir les seize présidents d'arrondissement de Casablanca prendre leurs responsabilités.
Signature & actionCe sésame présidentiel reste incontournable pour l'exécution de toute sanction en rapport avec l'application des réglementations communales en matière de préservation de la santé, de la sécurité publique, de la propreté, de l'urbanisme et de l'exploitation des biens communaux. Autant dire de tout ce qui touche à la vie publique… à la rue.
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«Un effort considérable a été consenti dans le recensement de toutes les infractions et dans la méthodologie de verbalisation, mais les sanctions sont souvent restées dans les parapheurs des présidents, sans doute pour des considérations électoralistes», souligne un vieux routier du Conseil de la Ville, selon lequel «le nouveau Conseil a un boulevard devant lui, en ce début de mandat, pour se montrer plus ferme et sanctionner quand il le faut. Cela permettrait non seulement de recouvrir des arriérés fiscaux dont la ville a cruellement besoin mais aussi d’instaurer une culture de respect des exigences communautaires».
De plus, le Conseil actuel est visiblement mieux outillé que l'ont été ses prédécesseurs. «La Police Administrative Communale, en inertie depuis une dizaine d'années, a connu un essor extraordinaire depuis sa généralisation sur tout le territoire de Casablanca en juillet 2019. C'est actuellement une des business unit modèle de Casa Prestations. Celle qui a le mieux réussi son déploiement», affirme cet interlocuteur.
Une police spécialeTravaillant directement sous la supervision du président du Conseil, la Police administrative intervient dans tous ce qui affecte la vie quotidienne des Casablancais. Urbanisme, hygiène, sécurité publique et occupation du domaine publique communal… Tels sont les principaux champs d'intervention des brigades de cette police communale, dont le bilan sur les deux dernières années est honorable.
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Dirigés par Adil Najjar –un haut fonctionnaire expérimenté, débauché par l'ancien Wali Khalid Safir, à l'origine du projet–, ces policiers pacifistes sont plus enclins à dégainer un smartphone qu'une arme de service. Armés de leurs tablettes, les 150 agents assermentés de la PAC ont ainsi quadrillé, ces 30 derniers mois, les arrondissements de la métropole, effectuant des milliers d'inspections et d'interventions, avec en prime le recensement de tout ce qui a pignon sur rue. «82.899 visites aux établissements commerciaux à Casablanca ont été effectuées à ce jour, permettant l’élaboration d’une base de données réunissant tous les renseignements utiles et nécessaires», nous explique une source autorisée à Casa Prestations.
Il faut dire que cette unité est une des rares à avoir effectivement réussi sa digitalisation et tirer profit de tous les chantiers numériques de la métropole. «Un suivi régulier et permanent des activités de contrôle et des réclamations est effectué via des applications. Ces dernières sont adossées à une plateforme centralisée afin de dresser un programme d’action hebdomadaire et élaborer des statistiques précises», nous expliquent les responsables de Casa Prestations. Ceux-ci ajoutent qu’«un centre de contrôle des opérations assure, via un système de géolocalisation, le suivi en temps réel des activités sur le terrain par des superviseurs au niveau de chaque arrondissement.»
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Même durant la crise sanitaire, les brigades de la police administrative communale ont été au front: avec les autorités locales, elles ont mené 8.796 opérations conjointes sur le terrain, lors de la première période du confinement, en terme de sensibilisation contre le Covid-19 et ont été félicitées par les différentes instances.
Peu de moyens, beaucoup d'élogesLes éloges à la Police Administrative Communale proviennent aussi d’institutions internationales. La Banque mondiale, qui suit de près l'essor de la métropole, a relevé dans son dernier rapport «le travail conséquent accompli par la PAC et son impact potentiel évident sur les finances de la commune, étant donné qu’une partie des recettes de la commune dépend directement de son action: redevances d'occupation du domaine public notamment, taxes sur les opérations de construction…». Cependant, cette même mission de la Banque mondiale a également permis «de faire état du manque de moyens financiers dont souffre cet organe, ce qui impacte son intervention».
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Malgré ce budget limité, de l’ordre d’une quinzaine de millions de dirhams, la Police administrative communale de Casablanca arrive à s'installer dans le paysage urbain. Ce sont d'ailleurs ses brigades qui sont au premier front de la campagne de salubrité publique, voulue par la maire de la ville.
Elles accompagnent les arrondissements dans les opérations de terrain tout en veillant à élaborer un inventaire des anomalies et à constituer une cartographie des perturbations qui affectent la salubrité publique: chaussées, panneaux, câblage, obstacles, poubelles, immeubles abandonnés… Tout est recensé par les agents de la PAC. «Des recommandations, moyennant un rapport sur la salubrité publique, sont présentées à chaque président d’arrondissement à l’issue de chaque opération de territoire, afin de prendre les mesures nécessaires», affirme notre source à Casa Prestations.
En s'appuyant sur cette Police Administrative Communale, Nabila Rmili a sans doute compris l'atout que représente cette structure instaurée par la loi organique 113-14 relatives aux communes. Pour l'heure, elle est la seule présidente du Conseil d'une grande ville à disposer d'un tel organe. Mais il est question de capitaliser sur l'expérience pilote de Casablanca pour la généraliser aux autres mairies du Royaume. Un chantier que ne manquerait pas de lancer la Direction générale des collectivités territoriales du ministère de l'Intérieur. Surtout qu'aux manettes de cette direction, il y a Khalid Safir, qui a lui-même été l'initiateur de ce projet du temps où il était le wali de la métropole…