Nous vous en informions à la mi-juillet déjà. Général à la retraite, mis «au placard» par un certain Ahmed Gaïd Salah, aujourd’hui unique homme fort du régime algérien, et coupable parmi d’autres, selon l’opinion publique de son pays, des massacres ayant eu lieu lors de la décennie noire, Khaled Nezzar, ancien ministre de la Défense, tente en ce moment même de revenir par tous les moyens au devant de la scène.
Dans ce qui s’apparente à une revanche contre son ennemi de toujours, Khaled Nezzar vient de trouver une belle parade: une stratégie de communication inspirée de celle adoptée par Donald Trump depuis sa campagne électorale ayant mené à son élection à la tête des Etats-Unis. Comprenez: des propos acerbes et sans ménagement contre le régime, sous forme de posts, sur ce réseau social élitiste qu’est Twitter.
Khaled Nezzar qui, nous apprenaient des sources sûres, s’est rattaché les services de Hamadouche Mehenna, en charge du journal électronique Algérie patriotique, vient de matérialiser ce plan visant à casser du sucre dans le dos de Gaïd Salah. On se contentera simplement de mentionner que ce support médiatique est la propriété d’un certain Lotfi Nezzar, qui n’est autre –heureuse coïncidence!– que le propre fils de Khaled Nezzar.
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Ainsi, ce dernier balance depuis quelques jours tweet sur tweet contre les lambeaux qui restent du régime, laissés par le président déchu Abdelaziz Bouteflika. Et pas plus tard qu’hier, lundi 22 juillet, Khaled Nezzar a tweeté des phrases peu amènes, critiquant sans ménagement la politique répressive de Gaïd Salah. «Les décideurs du moment se sont déjà trompés de cible, jetant en prison sans vergogne un moudjahed de la première heure [martyr de la guerre d’indépendance d’Algérie, Ndlr] et des manifestants pacifiques, pour avoir exprimé leur désir pleinement justifié, de voir partir celui qui bloque le processus de changement réclamé par tous», écrivait Khaled Nezzar.
La veille, celui qui a été ministre algérien de la Défense s’était targué d’avoir été un opposant de la première heure de l’actuel régime, et même d’avoir sorti un livre pour le dénoncer. «Opposé à Bouteflika dès 1999 par des propos clairs, opposition affichée et sanctionnée par un livre que je viens de rééditer. Je le dis et redis, que les décideurs du moment ne se trompent pas de cible et ne m'assimilent pas au clan. Celui qui en a fait partie c'est Gaïd Salah!», peut-on encore lire.
Un jour plutôt, Khaled Nezzar a prodigué ses conseils quant à la fonction de ministre de la Défense, qui devrait être dissociée de celle de chef d’état-major. Il en a également profité pour parler d’un retrait volontaire de la chose publique qu’il aurait décidé, au lieu d’une éviction orchestrée par le même Gaïd Salah, qu’il critique aujourd’hui. «La dissociation des deux fonctions est salutaire pour notre outil de défense. Mon retrait volontaire fin 1993 visait justement à éviter aux autorités militaires la tentation de faire irruption dans les fonctions politiques suprêmes», nous éclaire Nezzar.
Voilà qui prouve une fois de plus la stratégie de repositionnement de cet ancien ministre de la Défense, poursuivi en Suisse pour crimes de guerre. Un plan qui lui avait été murmuré par le même Hamadouche Mehenna. Celui-ci, en fin stratège, avait estimé, selon nos sources, que toute confrontation directe avec Ahmed Gaïd Salah, qui a entre-temps fait main basse sur les appareils judiciaire et sécuritaire, risquerait de se révéler problématique. D’autant que l’opinion publique est actuellement également très remontée contre la famille Nezzar, sous l’effet d’une campagne de discrédit orchestrée de longue date, et qui avait été savamment menée lors de l’ère Bouteflika.
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Dans cette logique, Mehenna souligne que le recours à des médias comme Algérie patriotique, ou encore les quotidiens Al-Watan et Liberté, pour réagir contre Gaïd Salah exposera ces supports aux représailles de ce dernier. Le vice-ministre de la Défense n’hésitera pas une seconde à s’en prendre aux équipes de ces médias, et à leur accoler des accusations fallacieuses, comme celle d’une «atteinte à l’intérêt national». Pour cet homme, qui conseille Khaled Nezzar, perdre ces trois médias, érigés en porte-voix des protestants, serait «une erreur monumentale».
Hamadouche Mehenna a donc, en conséquence, jugé plus pertinent pour le journal électronique Algérie patriotique de maintenir son positionnement pro-manifestants, et d’attendre le moment opportun pour «en finir avec Gaïd Salah, une fois [celui-ci] à genoux».
Il a recommandé à Khaled Nezzar de mener une campagne de communication «à la Trump», soit en créant son propre compte Twitter, pour distiller ses messages. Algérie patriotique prendra ensuite le relais en veillant à amplifier ces messages à travers des médias algériens et étrangers. A charge pour le général Khaled Nezzar d'écrire des tweets réguliers (et percutants) contre Gaïd Salah.
Le plan du tandem Mehenna-Nezzar est donc en cours.