Diapo-vidéo. Bravant l'interdiction, des milliers d'Algériens manifestent contre le 5è mandat

DiaporamaDes milliers d'Algériens ont défilé ce vendredi dans le centre d'Alger, contre la perspective d'un cinquième mandat pour le président Abdelaziz Bouteflika, devant des forces de police apparaissant débordées.

Le 01/03/2019 à 16h05

Des milliers d'Algériens manifestent contre un 5e mandat de Bouteflika. . DR

En annonçant, le 10 février dernier, sa candidature à la présidentielle du 18 avril, Bouteflika, au pouvoir depuis 1999 et qui souffre des séquelles d'un accident vasculaire cérébral (AVC) depuis 2013, a mis fin à de longs mois d'incertitude, mais aussi déclenché une contestation d'une ampleur inédite en 20 ans, le visant directement -du jamais vu.

"Pouvoir assassin!", a scandé aujourd'hui une foule impressionnante, difficile à précisément évaluer, constituée de milliers de manifestants brandissant des drapeaux algériens, rassemblés près de la Place de la Grande-Poste, bâtiment emblématique du centre de la capitale.

Le cortège, composé d'hommes et de femmes de tous âges, a remonté le long de l'une des principales artères qui débouche sur la place.

Non loin de là, la police a utilisé des gaz lacrymogènes pour empêcher des manifestants d'accéder à la Place du 1er Mai, mais a rapidement été débordée par le flux de manifestants, convergeant des rues qui y débouchent de plusieurs quartiers, a constaté un journaliste de l'AFP.

Les manifestants ont pris le chemin de la Place de la Grande-Poste, aux cris de "Pacifiques!, pacifiques!".

Un autre long cortège de plusieurs milliers de personnes, parti de la Place des Martyrs, a réussi à forcer plusieurs cordons de policiers anti-émeutes qui ont tenté, à coups de jets de gaz lacrymogènes, de les empêcher de converger eux aussi vers la Grande-Poste.

"Le peuple veut la chute du régime", "Non au cinquième mandat!", "On ne va pas s'arrêter!", ont crié les manifestants.

Un journaliste et une photographe de la presse écrite algérienne ont été brièvement interpellés par la police, selon une journaliste de l'AFP sur place, à laquelle des policiers ont demandé de s'éloigner pour sa "sécurité".

D'autres rassemblements ont été signalés dans plusieurs localités algériennes, selon le site d'information TSA (Tout sur l'Algérie), à Oran, deuxième ville du pays, Tizi-Ouzou (90 km à l'est d'Alger), Bouira et Sétif (90 km et 200 km au sud-est).

Pour l'heure aucun incident notable n'a été signalé.

La mobilisation, qui s'annonce supérieure à celle de la semaine passée, était le principal enjeu de ce vendredi, alors qu'il ne reste moins de trois jours au camp présidentiel pour déposer dans les délais -jusqu'à dimanche minuit locale (23H00 GMT) - le dossier de candidature de Abdelaziz Bouteflika devant la Conseil constitutionnel.

"Nous sommes là pour encadrer la manifestation et éviter tout éventuel débordement", a indiqué à l'AFP un officier de police, alors qu'un hélicoptère tournoyait bruyamment au-dessus du centre-ville.

La réaction des forces de l'ordre, qui ont jusqu'ici largement laissé faire, même à Alger où toute manifestation est interdite depuis 2001, devait être également observée de près, alors que le camp présidentiel a fait savoir cette semaine qu'il n'entendait pas reculer face à la rue.

Certains observateurs craignent que les partisans du chef de l'Etat n'utilisent la manière forte pour s'éviter une campagne électorale avec le double handicap d'un candidat absent physiquement -Abdelaziz Bouteflika n'apparait plus qu'à de rares occasions et ne s'est pas adressé à la nation depuis son AVC- et contesté dans la rue.

La candidature de Bouteflika sera déposée le 3 mars, a annoncé son directeur de campagne, Abdelmalek Sellal. "Personne n'a le droit d'empêcher un citoyen algérien de se porter candidat. C'est un droit constitutionnel".

Le chef de l'Etat est cependant hospitalisé depuis dimanche dernier à Genève, officiellement "pour des examens médicaux périodiques" et son retour en Algérie n'a toujours pas été annoncé.

Comme d'autres membres du camp présidentiel, le Premier ministre Ahmed Ouyahia, a quant à lui, agité le spectre de la sanglante "décennie noire" de guerre civile (1992-2002) en Algérie et du chaos syrien.

Amnesty international a appelé jeudi les forces de l'ordre à "s'abstenir de recourir à une force excessive ou inutile pour disperser des manifestants pacifiques".

Toute la semaine, les rassemblements d'ampleur variable se sont succédé: mouvement citoyen, avocats, étudiants et journalistes, ont tour à tour manifesté. Hier, jeudi, une dizaine de journalistes algériens ont été détenus durant plusieurs heures après avoir participé à Alger à un rassemblement "contre la censure" dans la couverture de la contestation.

Rencontrés au cours de cette même journée du jeudi 28 février par l'AFP dans un quartier populaire d'Alger, plusieurs jeunes entendent bien marcher, comme la semaine passée pour "changer le système", estimant que "l'avenir n'existe pas en Algérie".

Le 01/03/2019 à 16h05