Reportage le360. Bousculade près d'Essaouira: ce qui s'est passé

Le360

Le 20/11/2017 à 14h15

VidéoAu moins 15 personnes, des femmes et des enfants, sont décédées dimanche lors d'une bousculade survenue lors d'une opération de distribution d'aide alimentaire, dans un village de la région d'Essaouira. Le360 s'est rendu sur les lieux.

«Cette année, on s’attendait à 800 personnes. 5000 sont venues», expliquent les autorités locales. Ces personnes sont venues de plusieurs localités, y compris d’Agadir et elles ne se sont pas uniquement déplacées pour le panier de denrées alimentaires, d’une valeur de 150 dhs, mais également pour «pouvoir prendre la baraka du cheikh», comme l’ont expliqué au 360 plusieurs témoins. 

Le cheikh en question s’appelle Abdelkebir Al Hadidi et il préside «l’association d’apprentissage du Coran de la province d’Essaouira». Nombre de personnes interrogées lui attribuent une aura qui se communique à travers le sac de denrées alimentaires distribuées.

L’ambiance dans le village de Boulaalam, à 70 kilomètres au sud d’Essaouira, était au deuil ce dimanche 19 novembre 2017. Tôt le matin, au moins 15 personnes, des femmes pour la plupart, sont décédées suite à une bousculade survenue à un point de distribution de denrées alimentaires. Quelque 10 autres personnes sont toujours hospitalisées à Marrakech. Deux d’entre elles sont dans un état grave.

A Boulaalam, misère et chagrin sont visibles sur les visages. Pour la fille d’une des disparues, interrogée par Le360, il y aurait eu plus de morts. «Il y a au moins 20 victimes», affirme-t-elle. «Les barrières devant lesquelles nous étions postées en attendant les aides ont cédé. S’en est suivi une grande bousculade. Des femmes, dont ma mère, tombaient et étaient retenues prisonnières des barrières. Les personnes qui étaient debout piétinaient celles par terre. Je suppliais les gens d’arrêter, de pousser, mais personne n’écoutait», nous raconte-t-elle. Elle n’hésite pas à mettre en cause le mécène, cheikh El Hadidi, notaire de profession.

Même son de cloche pour le fils d’une autre victime. «Ce n’est pas la première fois que de pareils faits se produisent. L’année dernière, cinq personnes sont mortes dans les mêmes circonstances et à cause de ce même mécène. Cette année, j’ai perdu ma mère et elle est tout ce que j’avais au monde. Ma femme a elle aussi été grièvement blessée et elle ne peut rien avaler», affirme-t-il.

Pour cet autre témoin oculaire, il y avait tout simplement trop de monde, au mauvais endroit, au mauvais moment. «Des femmes sont venues de plusieurs localités, de Chichaoua, Sidi Mokhtar, G’zoula et de bien d’autres régions. C’était difficile à organiser et dès les premiers mouvements de foule, le chaos a régné», dit-il.

La pagaille aurait commencé dès le samedi à 23 heures, heure à laquelle les demandeurs d’aide alimentaire se sont rassemblés, pour ne prendre fin que le lendemain à midi, nous dit cette survivante. «S’il n’y avait pas eu un garçon pour me repêcher, je serais morte étranglée à cette heure-ci», nous dit-elle.

Une commission de l'Inspection générale de l'administration territoriale relevant du ministère de l'Intérieur a entamé dimanche soir, une série de rencontres avec les autorités locales de la province d'Essaouira. Ces rencontres s'inscrivent dans le cadre de l’enquête administrative globale ouverte par le ministère. Elles ont pour objectif de permettre de s'enquérir de l'ensemble des circonstances relatives à cet incident, de réviser, d'auditer et d'évaluer toutes les mesures adoptées à ce sujet, ainsi que de détecter tout éventuel dépassement ou dysfonctionnement et par conséquent, d'établir les responsabilités, indique un communiqué du ministère relayé par l'agence MAP.

L'opinion publique nationale sera informée de toutes les conclusions et des mesures prises à la lumière des résultats des investigations.

Par M'hand Oubarka
Le 20/11/2017 à 14h15