La justice se montre intraitable face aux «justiciers» de Safi

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Revue de presseKiosque360. Le tribunal de première instance de Safi vient de se pencher sur l’affaire de l’agression d’un couple par un groupe de «moralisateurs autoproclamés». Après la comparution des 14 agresseurs, dont 13 en état d’arrestation, le tribunal a décidé de renvoyer le procès à mardi prochain.

Le 07/06/2018 à 00h19

Les environs des douars de Jamaat Shaim et Oulad Mhaya, relevant de la province de Safi, ont été le théâtre en début de ce ramadan, le 30 mai plus précisément, d’une agression collective contre un chauffeur de transport clandestin et une jeune cliente qui lui tenait compagnie. Le couple a été sévèrement molesté dans le véhicule de transport pour atteinte présumée aux mœurs. Une «agression qui n’est pas sans rappeler celles que les organisations extrémistes avaient multipliées juste avant la période post-attentats du 16 mai 2003», écrit le quotidien Al Ahdath AL Maghribia de ce jeudi 7 juin. Le quotidien qualifie même de «Daechiens de Safi» ces prétendus «justiciers», aujourd’hui derrière les barreaux.

Mardi dernier, le tribunal de première instance de Safi a appelé à la barre les 13 accusés en état d’arrestation, ainsi qu’un 14e prévenu poursuivi en état de liberté pour non-assistance à personnes en danger. Les plaignants, à savoir le chauffeur et la jeune femme qui l’accompagnait, mais aussi les familles des deux camps et leurs avocats, étaient également présents au tribunal.

Pour rappel, une vidéo a circulé à grande échelle sur les réseaux sociaux, montrant une femme au visage ensanglanté, prise à partie par un groupe de cagoulés, dont certains étaient munis d’armes blanches, qui l’ont sauvagement lynchée. Soupçonnée d’avoir eu des rapports sexuels avec un «khattaf» (taxi clandestin), elle a subi la loi de la siba, si tant est que loi et siba vont de pair. Suite à une enquête de la gendarmerie royale, tous les protagonistes de la vidéo ont été arrêtés le lendemain des faits et présentés au procureur du roi près le tribunal de première instance de Safi.

Ce dernier a refusé, ce mardi, d’accorder la liberté provisoire aux 13 agresseurs, dont un père et son fils, après avoir procédé à leur identification conformément aux procès-verbaux dressés par la section judiciaire de la gendarmerie royale de Safi. Leur procès débutera mardi prochain, le temps que les avocats peaufinent leurs dossiers.

Selon Al Ahdath, les agresseurs, pour la plupart des petits agriculteurs et bergers de la région, n’ont trouvé mieux pour se défendre que de dire qu’ils avaient mis en garde le «Khataf» à maintes reprises contre ses comportements immoraux, avant de passer à l’acte et commettre leur agression. C’est cette substitution à l’autorité qui risque de leur coûter cher, en plus d’une agression à main armée, du vol et de la destruction des biens d’autrui.

Par Mohamed Deychillaoui
Le 07/06/2018 à 00h19