La politique africaine du roi Mohammed VI donne le tournis à Alger. Le voisin de l’est a invité, au lendemain de la rencontre entre le souverain et le président Muhammadu Buhari à Abuja, le vice-président nigérian, Yemi Osinbajo. A l’issue de la rencontre improvisée entre le président Abdelaziz Bouteflika et le vice-président du Nigéria, l’APS (agence de presse officielle algérienne) s’est empressée de rappeler les projets communs qui lient l’Algérie au Nigéria «en l’occurrence la route transsaharienne Alger-Lagos, le gazoduc transsaharien, reliant le Nigéria à l’Europe via l’Algérie et la liaison par fibre optique Alger-Abuja».
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L’accord du gazoduc entre l’Algérie et le Nigéria date de janvier 2002. Oui, bien 2002, comme en témoigne une annonce dans le site officiel du ministère algérien de l’Energie. A l’instar de très nombreux projets annoncés à cor et à cri en Algérie, le projet du gazoduc est mort-né. Pourtant, près de 15 ans plus tard, le président algérien se remémore soudainement ce projet et le ressert à son peuple. La presse algérienne a vite conclu que «le gazoduc entre le Maroc et le Nigéria semble compromis après le maintien de celui d’Alger-Lagos». Il ne faut pas être surpris qu’Alger déterre un projet mort-né dans l’espoir de contrarier les initiatives du Maroc. Il s’agit là du modus operandi le plus répandu dans la politique algérienne. Mais une chose est annoncer, et autre chose est réaliser.
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Présentant, mercredi 14 décembre, le projet de loi de Finances au titre de l’année 2017, le président nigérian Muhammadu Buhari s’est longuement arrêté sur les perspectives fructueuses des projets maroco-nigérians, ficelés lors de la visite historique du roi Mohammed VI à Abuja. La plus haute autorité du Nigéria s’est adressée aux parlementaires de son pays pour se féliciter des accords conclus entre Rabat et Abuja. Nous sommes loin des annonces sans lendemain. Et ce n’est pas tout. Le roi Mohammed VI a présidé mardi 13 décembre, à Casablanca, une séance de travail consacrée au gazoduc reliant le Nigéria au Maroc en présence de hauts responsables nigérians, désignés par le président Muhammadu Buhari. Ainsi, ce qui a manqué au projet algérien en 15 ans (des réunions concrètes pour étudier la faisabilité et les financements) a été fait en quelques jours grâce au pragmatisme et à la ténacité de Mohammed VI qui transforme en réalisations les projets les plus ambitieux.
Aveuglé par le succès retentissant de la visite royale au Nigéria, avec ce que cela comporte de retombées mutuellement avantageuses, conformément à l’approche royale de la coopération Sud-Sud, Alger, champion attitré des occasions ratées, essaie misérablement de vendre aujourd’hui des chimères aux Algériens. Avec des slogans pompeux, mais rarement transformées en actes, Alger s’est lancé dans une vaste entreprise tendant à crétiniser le peuple algérien frère. Car comment s’interdire de penser que le président Bouteflika insulte l’intelligence de son peuple en se souvenant soudainement d’un projet vieux de 15 ans ? Pense-t-il que les Algériens ne sont pas suffisamment intelligents pour comprendre que cette annonce se justifie par le lancement des travaux du gazoduc entre le Nigéria et le Maroc ?
Le syndrome Rahmat Rabi contamine toutes les annonces en Algérie
L’Algérie est en panne d’idées. Etat rentier, qui importe tout et n’exporte que les hydrocarbures, l’Algérie fait preuve de mobilité seulement quand il s’agit de contrer la marche du Maroc. A Alger, on multiplie les effets d’annonce à l’adresse du peuple à qui on cherche à faire avaler la pilule d’un pays qui avance, innove. En somme, une puissance régionale. La réalité est autre : le goût de cette pilule est amer et le réveil douloureux. Pour avoir une idée des illusions qui sont devenues le lot quotidien du voisin de l’est, sachez que le ministre algérien de la santé a annoncé en grande pompe qu’un laboratoire de son pays a inventé la pilule qui guérit du diabète et permet désormais aux diabétiques d’éviter le traitement par l’insuline. Commercialisé dans les pharmacies avec des slogans extraordinaires, ce médicament-miracle, nommé Rahmat Rabi, a conduit au coma de nombreux Algériens qui ont cru au traitement révolutionnaire promu par leur ministre de la santé… L’Etat algérien encourage et applaudit de pseudo-découvertes de charlatans !
Le faux médicament-miracle et les projets annoncés par l’APS, à l’issue de l’audience accordée par Bouteflika au vice-président nigérian, participent du même esprit qui sous-tend la politique algérienne au plus haut sommet de l’Etat : servir des chimères au peuple.