Désigné conformément à la Constitution le 9 avril, une semaine après la démission du président Abdelaziz Bouteflika, pour assurer l'intérim à la tête de l'Etat durant 90 jours, Abdelkader Bensalah a appelé le 6 juin au "dialogue" afin de permettre l'organisation d'une présidentielle pour élire un nouveau chef de l'Etat.
Quelques jours auparavant, le Conseil constitutionnel avait constaté "l'impossibilité" d'organiser le scrutin le 4 juillet comme prévu, en l'absence de candidature recevable. Bien que la Constitution exige que Bensalah remette le pouvoir le 9 juillet, celui-ci a confirmé qu'il resterait en poste jusqu'à l'élection d'un nouveau président, ce dont l'a chargé le Conseil constitutionnel.
"Pas de dialogue avec le +gang+ (au pouvoir), Bensalah n'est pas président", ont scandé les étudiants qui ont défilé massivement dans les rues de la capitale pour un 16e mardi consécutif.
Avant tout scrutin, le mouvement de contestation réclame le départ du pouvoir des fidèles d'Abdelaziz Bouteflika - parmi lesquels figurent Bensalah - et des réformes politiques confiées à des institutions de transition.
"Nous sommes favorables au dialogue mais pas avec Bensalah. Il faut qu'il (le dialogue) soit mené par des personnalités honnêtes et crédibles", a expliqué à l'AFP Sara Abdelali, étudiante en droit.
"Nous ne sommes pas prêts à dialoguer avec Bensalah et avec le Premier ministre Noureddine Bedoui qui ont participé à la fraude électorale par le passé", a précisé Ayoub, 27 ans, étudiant en sciences islamiques.
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Pour les contestataires, la tenue rapide d'un scrutin, pour lequel ils n'offrent aucune garantie de transparence et d'équité, n'est qu'un moyen pour les piliers de l'appareil de Bouteflika de se maintenir au pouvoir.
En raison d'un déploiement policier massif autour de la Grande poste, point de ralliement des manifestations, les étudiants se sont rassemblés sur la Place des martyrs, vaste esplanade en contrebas de la Casbah, à environ 1,5 km de là. Ils ont ensuite défilé sans incident au milieu d'un important dispositif policier, avant de se disperser dans le calme en début d'après-midi.
La police les a notamment empêchés d'emprunter la rue longeant le tribunal d'Alger, où ils avaient ces dernières semaines l'habitude de faire une halte symbolique pour réclamer le jugement d'anciens responsables liés à Bouteflika. Depuis la démission de celui-ci, la justice a ouvert plusieurs enquêtes contre d'anciens ou actuels responsables politiques et fonctionnaires et contre des hommes d'affaires ayant bénéficié d'importants contrats publics.
Une soixantaine de personnes ont été entendues ces derniers jours au tribunal d'Alger dans des affaires de corruption visant un richissime homme d'affaires, Mahieddine Tahkout, proche de l'entourage de Bouteflika.
Parmi elles, 45 ont été inculpées, dont Tahkout, son fils et deux de ses frères appartenant à la direction de son groupe, trois de ses salariés et 38 fonctionnaires. Les dossiers de 11 ministres et préfets, anciens ou en poste, ont eux été transmis à la Cour suprême, seule compétente dans leur cas.
"Nous continuerons à descendre dans la rue jusqu'au départ de tous les voleurs", ont scandé les manifestants qui ont également lancé des slogans hostiles au chef d'état-major de l'armée, le général Ahmed Gaïd Salah, de fait l'homme fort du pays depuis le départ de Bouteflika.