Rien ne va plus dans le camp Bouteflika. Le président-candidat à un 5e mandat, 82 ans et gravement affaibli depuis son AVC, ne cesse d’essuyer les marques de refus de cette candidature. Devant l'ampleur exceptionnelle des manifestations populaires qui attirent chaque vendredi davantage d'Algériens dans la rue, même les soutiens de Bouteflika commencent à fredonner "sauve qui peut". Le propre neveu et protégé de Bouteflika n'a pas résisté à l'appel de la rue.
PDG de la banque BDL, Mohamed Krim, qui doit toute sa carrière à la famille Bouteflika, a fait une sortie pour le moins inattendue sur Facebook. Dans une vidéo, et s’adressant hier au personnel féminin de sa banque à l’occasion du 8 mars, il s’est dit totalement solidaire… avec la vague populaire de protestations contre la candidature de Bouteflika, l’Algérie ayant été vendredi sujette à sa troisième semaine de manifestations, la plus impressionnante de toutes.
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"Permettez moi en cette occasion de féliciter le peuple algérien pour ce Hirak el moubarak (Mouvement béni) considéré comme un sursaut national". Rien que cela. Les manifestations populaires contre le mandat de trop peuvent aisément se comprendre dans un pays qui aspire au changement. Mais la sortie de Mohamed Krim, qui doit toute sa carrière à sa parenté avec Bouteflika, en dit long sur, et c’est peu dire, le malaise ressenti au sein même du cercle le plus proche du président.
Mohamed Krim est loin d’être le seul à se désolidariser d'Abdelaziz Bouteflika.
Entre le 6 et le 7, soit en 24 heures seulement, le président algérien a été lâché par trois puissantes associations liées à la guerre d'indépendance et dont il est pourtant un ancien combattant et qui lui étaient acquises dans le passé, comme le résume une dépêche de l’agence AFP.
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C’est ainsi que, jeudi, dans un communiqué, l'Organisation nationale des Enfants de Chouhadas s’est déclarée officiellement en faveur du mouvement populaire contre le cinquième mandat. Cette dissidence arrive au lendemain de la défection de la puissante Organisation nationale des Moujahidine, autre traditionnel soutien du candidat du FLN, et qui contre toute attente a apporté un soutien inattendu à la contestation. Mercredi, l'association des anciens du MALG (service de renseignement de l'Armée nationale de Libération durant la guerre d'indépendance) a également retiré son soutien à la candidature de Bouteflika, se félicitant de l'"élan irrésistible" et la "volonté exprimée" par les manifestants et dénonce les "manoeuvres" pour "perpétuer un système qui a atteint des limites et risque de mener le pays aux plus graves périls".
A ceux-là s’ajoutent plusieurs branches locales ou syndicats affiliés à l'UGTA (Union générale des travailleurs algériens), se démarquant du patron de cette centrale syndicale, Abdelmadjid Sidi-Saïd, soutien indéfectible du chef de l'Etat. Des démissions ont été également annoncées au sein du Forum des chefs d'entreprise, cette organisation patronale étant dirigée par Ali Haddad, très proche de Saïd Bouteflika.
Ajoutez à cela les corps des médecins, des avocats, des journalistes, des enseignants et des étudiants qui se mobilisent dans la rue comme sur les réseaux sociaux, et vous avez toutes les composantes d’un pays qui crient leur ras-le-bol.
Autant dire que le navire du régime Bouteflika prend de l'eau de tous les côtés. La question est de savoir pour combien de temps encore peut-il résister à un naufrage inéluctable.