Terrorisme. L'Irak condamne trois Français à mort pour appartenance à Daech

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Trois Français ont été condamnés à mort dimanche pour appartenance au groupe Etat islamique (EI), a indiqué à l'AFP un magistrat de la cour de Bagdad qui les a jugés, un verdict inédit pour des ressortissants de ce pays.

Le 26/05/2019 à 16h36

Il s'agit de Kévin Gonot, Léonard Lopez et Salim Machou, arrêtés en Syrie par une alliance arabo-kurde anti-EI avant d'être transférés avec neuf autres Français en Irak en février.

Selon la loi irakienne, qui prévoit la peine de mort pour quiconque a rejoint une organisation "terroriste", qu'il ait combattu ou non. Les trois hommes ont 30 jours pour faire appel.

Jusqu'ici, trois Français ont déjà été reconnus coupables d'avoir rejoint l'EI en Irak: Mélina Boughedir, 27 ans, Djamila Boutoutaou, 28 ans, et Lahcène Gueboudj, 58 ans. Tous trois ont été condamnés à la prison à perpétuité, équivalente à 20 ans de détention en Irak, alors que la France refuse la peine de mort.

Les verdicts de dimanche pourraient relancer le débat sur l'épineuse question du retour des jihadistes, qui suscitent un vif rejet dans l'opinion publique en Europe.

Léonard Lopez, Parisien de 32 ans converti à l'islam, a répondu aux questions du juge en arabe lors de l'audience de dimanche, après quatre mois d'interrogatoires, sur la base desquels la cour a rendu son jugement.

Contacté par l'AFP à Paris, son avocat Me Nabil Boudi, a dénoncé une "justice expéditive". "On condamne à la peine capitale un ressortissant français, sur la base uniquement d'une série d'interrogatoires passés dans des geôles de prison à Bagdad", a-t-il affirmé.

"Le ministère des Affaires étrangères nous avait pourtant garanti que les Français auraient tous droit à un procès équitable même en Irak", a-t-il encore dit à l'AFP alors que les défenseurs des droits humains dénoncent "de vrais risques de torture" et "aucune garantie pour des procès équitables".

Léonard Lopez a fait partie, au début des années 2000, des plus actifs sur le site jihadiste francophone de référence d'alors, Ansar Al-Haqq.

En juillet 2015, sous contrôle judiciaire pour son activité sur ce site, il est parti avec sa femme et leurs deux enfants. D'abord à Mossoul puis en Syrie, selon les enquêteurs français.

Condamné en son absence en juillet 2018 à cinq ans de prison dans le dossier Ansar al-Haqq, celui qui se faisait appeler Abou Ibrahim al-Andaloussi au sein de l'EI est sous le coup d'un mandat d'arrêt.

Mais il est surtout connu des services de renseignement pour avoir cofondé l'association Sanabil, dissoute par le gouvernement français fin 2016 car elle contribuait sous couvert d'aide aux détenus à radicaliser des prisonniers.

"Tous ceux qui ont été impliqués directement ou indirectement dans les attentats depuis janvier 2015 ont été en lien direct ou indirect avec Sanabil", assurait à l'époque un enquêteur.

Kévin Gonot, 32 ans, né à Figeac dans le sud-ouest de la France, a dit dimanche au juge "regretter" d'avoir rejoint l'EI.

Il a été arrêté en Syrie avec son demi-frère Thomas Collange, 31 ans, sa mère et son épouse, une nièce des frères Fabien et Jean-Michel Clain qui ont revendiqué les attentats de novembre 2015 à Paris (130 morts) avant d'être tués récemment en Syrie.

Kévin Gonot affirme que son père, qui avait également rejoint l'EI selon ses "aveux" publiés par la justice irakienne, a été tué à Raqa, ancienne "capitale" de l'EI en Syrie.

Entré illégalement en Syrie via la Turquie selon ses dires, il a d'abord rejoint le Front al-Nosra (ex-branche d'Al-Qaïda en Syrie) avant de prêter allégeance au "calife" autoproclamé de l'EI, Abou Bakr al-Baghdadi.

Celui qui se faisait appeler Abou Sofiane au sein de l'EI a indiqué avoir été blessé au ventre lors de la bataille de Kobané, en Syrie, en 2015.

Il a assuré au juge avoir ensuite été transféré à Mossoul, la "capitale" de l'EI en Irak de 2014 à 2017, pour y être hospitalisé et non pour y combattre.

En France, il a déjà été condamné en son absence à neuf ans de prison, selon le Centre d'analyse du terrorisme (CAT).

Salim Machou, 41 ans, a appartenu à la brigade Tariq ibn Ziyad, une unité de l'EI menée par un ancien légionnaire français, Abdelilah Himich, selon le CAT.

Cette "cellule de combattants européens, vivier d'auteurs d'attaques", a compté jusqu'à "300 membres", selon les autorités américaines.

Salim Machou a, rapporte le CAT, hébergé à Raqa Jonathan Geffroy, un Français capturé en Syrie et remis à la justice française qui a fait de nombreuses révélations, notamment sur les frères Clain.

Neuf autres Français doivent encore être jugés en Irak. Il s'agit de Fodil Tahar Aouidat, Mustapha Merzoughi, Yassine Sakkam, Karam El Harchaoui, Vianney Ouraghi, Brahim Nejara, Bilel Kabaoui, Mohammed Berriri et Mourad Delhomme.

Récemment, Bagdad, qui a déjà condamné plus de 500 étrangers, hommes et femmes, pour appartenance à l'EI, s'est proposé de juger également le millier d'étrangers actuellement aux mains des Kurdes en Syrie. L'Irak demande pour cela à leur Etats d'origine une somme de deux millions de dollars par personne.

Le 26/05/2019 à 16h36