Référendum en Suisse: le port du voile intégral désormais interdit, la population très divisée

Le voile intégral désormais interdit en Suisse.

Le voile intégral désormais interdit en Suisse. . DR

En votant contre le port du voile intégral dans l'espace public, la Suisse rejoint la France, l'Autriche, la Bulgarie, la Belgique et le Danemark, après des années de débat.

Le 09/03/2021 à 21h00

Dimanche 7 mars 2021, les Suisses ont voté à une courte majorité en faveur de l'interdiction de se dissimuler le visage. Si le texte n'évoque ni la burqa, ni le niqab, les affiches de campagne qui représentent une femme voilée intégralement, et barrées des slogans "Stopper l’islamisme radical", "Stopper l’extrémisme" ne laissaient, quant à elles, pas de doute sur l'objet du référendum.

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Autrement dit, est-il précisé, il sera donc désormais interdit de se couvrir complètement le visage en public -ce qui vaut aussi pour des manifestants cagoulés- mais des exceptions sont prévues pour les lieux de culte par exemple.

Un vote qui divise profondément les Suisses Le texte, initialement proposé par le parti populiste de droite UDC, a provoqué une vive polémique en Suisse, pays très partagé sur la question, preuve en est le score de 51,21% des voix remporté par cette mesure à l’issue des votes.

Toutefois, si l’UDC flirte avec l’extrême droite, il n’en demeure pas moins que comptent aussi parmi les partisans de cette mesure nombre d’électeurs de la gauche laïque et des féministes qui ont voté contre l’islam radical.

Réagissant à cette nouvelle mesure et se faisant le porte-voix de ses partisans, le président de l'UDC Suisse, Marco Chiesa a ainsi déclaré sur la chaîne Blick.tv, "Nous nous réjouissons. Nous ne voulons pas qu'il y ait un islam radical dans notre pays".

Un avis partagé par Mohamed Hamdaoui, député au Grand Conseil bernois, fondateur de la campagne "A visage découvert" à l'agence ATS et qui se revendique musulman laïque. Celui-ci juge ainsi que ce résultat, "est un immense soulagement" et que "ce vote est révélateur d'une prise de conscience". C'était "l'occasion de dire stop à l'islamisme" et pas "aux musulmans, qui ont évidemment toute leur place dans ce pays", a-t-il souligné.

Ce que craignent les détracteurs de cette loiCette décision très contestée fait craindre, dans le camp adverse, une banalisation de "l’ambiance xénophobe et raciste" à l’encontre des musulmanes, selon Myriam Mastour, membre du collectif Les Foulards violets, qui se réjouit toutefois du faible écart entre le oui et le non, alors que les premiers sondages donnaient l'initiative de l'UDC largement favorite.

Par ailleurs, les opposants à cette mesure, dont font notamment partie le gouvernement fédéral et le parlement, jugent que le port du voile intégral ne devrait pas être un sujet de débat en Suisse. Ceux-ci estiment en effet à quelques dizaines seulement les femmes ainsi vêtues, en général des converties. Car en Suisse, les personnes ainsi vêtues sont surtout des riches touristes fréquentant les boutiques chics de Genève ou Zürich. En effet, selon les chiffres de l'Office des statistiques de 2019, environ 5,5% de la population suisse est musulmane, essentiellement avec des racines en ex-Yougoslavie, où cette tradition vestimentaire est absente.

"L'interdiction du voile intégral n'est pas une mesure visant la libération des femmes. Il s'agit au contraire d'une dangereuse politique symbolique qui viole la liberté d'expression et de religion", accuse Cyrielle Huguenot, responsable des droits des femmes à Amnesty International Suisse, citée dans un communiqué.

En Suisse, au lendemain de ce vote contre le port du voile intégral, ils étaient quelque 150 manifestants -essentiellement des jeunes- à se rassembler à Berne contre l'initiative, en brandissant des pancartes sur lesquelles étaient inscrits les slogans, "Il faut décoloniser la femme musulmane", ou encore "Ma tête m'appartient" .

Une polémique qui n’est pas sans rappeler celle provoquée en 2009 par le vote pour l'interdiction de la construction de minarets sur les mosquées, qui, si elle avait suscité une vague de colère dans les pays musulmans, avait a contrario remporté l'approbation des partis nationalistes européens.

Par Zineb Ibnouzahir
Le 09/03/2021 à 21h00