Professeur égorgé en France par un jeune islamiste tchétchène: lourdes peines pour des accusés

Cette photographie montre une photo de Samuel Paty lors de la cérémonie de remise du prix "Samuel Paty", organisée par l'Association des professeurs d'histoire et de géographie (APHG), à l'université de la Sorbonne à Paris le 19 octobre 2024

Cette photographie montre une photo de Samuel Paty lors de la cérémonie de remise du prix Samuel Paty, organisée par l'Association des professeurs d'histoire et de géographie (APHG), à l'université de la Sorbonne à Paris le 19 octobre 2024. AFP or licensors

Après sept semaines d’audience, la cour d’assises spéciale de Paris a prononcé des peines sévères vendredi soir à l’encontre des accusés impliqués, à des degrés divers, dans l’assassinat du professeur Samuel Paty par un jeune islamiste radical tchétchène en 2020.

Le 21/12/2024 à 07h27

Naïm Boudaoud, 22 ans, et Azim Epsirkhanov, 23 ans, amis de l’assassin qui a été tué par la police le jour de l’attaque, ont été reconnus coupables de complicité d’assassinat et condamnés à 16 ans de réclusion criminelle.

La veille de l’attentat, les trois jeunes gens sont allés à Rouen, dans l’ouest de la France, pour y acheter un couteau (pas celui qui a servi à décapiter Samuel Paty) qui sera retrouvé sur la scène de crime.

A l’audience, Naim Boudaoud et Azim Epsirkhanov ont répété que le tueur, Abdoullakh Anzorov, leur avait expliqué que ce couteau était «un cadeau» pour son grand-père.

Le jour de l’attentat, le 16 octobre 2020, Naim Boudaoud, le seul sachant conduire, a accompagné le tueur dans un magasin de pistolets airsoft puis l’a déposé à proximité du collège où enseignait Samuel Paty.

Si les deux jeunes gens ont constitué «le soutien logistique dont Anzorov avait besoin», il n’a pu être démontré qu’ils avaient connaissance de son projet mortifère, a indiqué le parquet qui a abandonné la complicité pour ne retenir que l’association de malfaiteurs terroriste (AMT), passible de 30 ans de réclusion.

Campagne de haine

Les deux auteurs de la «campagne de haine» qui ont fait de l’enseignant «une cible», Brahim Chnina, 52 ans, et Abdelhakim Sefrioui, 65 ans, ont pour leur part été reconnus coupable «d’association de malfaiteurs terroriste» (AMT) et condamnés respectivement à 13 et 15 ans de réclusion criminelle.

«J’ai compris que vous avez fait de la politique», s’est exclamé depuis son box M. Sefrioui avant d’être sèchement interrompu par le président, tandis que la famille de Brahim Chnina, très nombreuse sur les bancs du publics, éclatait en sanglots et cris de désespoir.

Vincent Brengarth, un des avocats de M. Sefrioui, a annoncé aussitôt que son client faisait appel de sa condamnation. Ouadie Elhamamouchi, un autre avocat du prédicateur, a estimé que son client était désormais «un prisonnier politique». «Je me désolidarise de ces propos-là», a cependant nuancé Me Brengarth, montrant des failles dans la défense du prédicateur.

Brahim Chnina, père de la collégienne qui a menti en accusant le professeur d’avoir discriminé les élèves musulmans de sa classe lors d’un cours sur la liberté d’expression où il a présenté une caricature de Mahomet, a posté des messages et une vidéo hostiles au professeur dès le 7 octobre.

Abdelhakim Sefrioui, fondateur de l’association (aujourd’hui dissoute) pro-Hamas «Collectif Cheikh-Yassine», a qualifié Samuel Paty de «voyou» dans une autre vidéo.

Mais rien ne prouve qu’Anzorov a vu la vidéo de M. Sefrioui, ont souligné ses avocats, ajoutant qu’ils n’avaient pas non plus rencontré l’assassin de Samuel Paty.

Brahim Chnina et Abdelhakim Sefrioui qui se sont rendus ensemble au collège de Samuel Paty le 8 octobre n’auraient pas agi de conserve, ont également avancé leurs avocats pour contester l’accusation d’AMT qui pèse sur eux.

«La cour a considéré que (MM. Chnina et Sefrioui) avaient préparé les conditions d’un passage à l’acte terroriste», a indiqué M. Zientara.

Intention terroriste

Les parties civiles avaient été outrées par les réquisitions «trop clémentes» du parquet, tandis que la défense demandait l’acquittement de la plupart des accusés en contestant l’ «intention terroriste» des mis en cause. Mais la cour a fait le choix de la sévérité.

Le parquet national antiterroriste (Pnat) avait requis des peines comprises entre 18 mois de prison avec sursis et 16 ans de réclusion criminelle contre les huit accusés âgés de 22 à 65 ans.

Les quatre autres accusés, dont une femme, appartiennent à la «jihadosphère» qui était en contact avec Abdoullakh Anzorov sur les réseaux sociaux.

La cour a condamné Priscilla Mangel, 36 ans, à trois ans de prison avec sursis pour provocation au terrorisme et à un an de prison Yusuf Cinar, 22 ans, reconnu coupable d’apologie du terrorisme.

Elle a également condamné Ismaël Gamaev, 22 ans, (le seul des huit accusés à avoir reconnu sa culpabilité) à cinq ans de prison dont 30 mois avec sursis et à trois ans de prison dont deux avec sursis le Réunionnais Louqmane Ingar.

Par Le360 (avec AFP)
Le 21/12/2024 à 07h27