En Algérie, la légitimité de la «guerre d’indépendance» dont se prévalaient les généraux de l’armée algérienne, et qui leur a servi pour accaparer le pouvoir (politique et économique) depuis maintenant plus d’un demi-siècle, a volé en éclats. Seul le général Gaïd Salah, revéillé en «sursaut» par Abdelaziz Bouteflika qui l’a mis sur orbite après une longue traversée du désert, n’a pas encore assimilé cette leçon.
Ainsi, et alors que la revendication d’un régime civil est devenue le credo des manifestations hebdomadaires qui ont cours à travers toute l’Algérie depuis maintenant quelque huit mois, Gaid Salah tente, par tous les moyens, de s’accrocher au pouvoir et rester seul maître à bord. Mais sa posture d’actuel homme fort du pays est en réalité intenable, car après avoir décapité l’armée, puis jeté en prison bon nombre de généraux, de femmes et hommes politiques ainsi que des hommes d’affaires, il s’est montré complètement sourd aux revendications de la rue algérienne, qui exige son départ et le lui signifie clairement en le traitant, deux fois par semaine et sur la place publique, de tous les noms d’oiseaux.
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Or, pour botter en touche, faire diversion et gagner du temps afin de pousser les Algériens, croit-il, à accepter une élection présidentielle taillée à la mesure de son ample treillis vert olive de général bédonnant, Ahmed Gaïd Salah a lancé depuis quelques semaines une cabale sans merci contre l’ancien chef d’état-major algérien et ancien ministre de la Défense, le général à la retraite Khaled Nezzar, actuellement établi en Espagne. Et qui la lui rend bien. C’est dans le cadre de ce règlement de comptes entre les deux pontes de l'ANP (armée nationale populaire) qu’un mandat d'arrêt international a été émis contre Nezzar, le 6 août dernier par le tribunal militaire de Blida. Un mandat d’arrêt ordonné par Gaïd Salah et qui concerne aussi l’homme d’affaires et propriétaire du journal "Algérie patriotique", Lotfi Nezzar, fils de Khaled, lui aussi exilé en Espagne
Mais Khaled Nezzar, qui a tourné casaque récemment au profit des revendications de la rue algérienne, ne compte pas se laisser faire et subir le même sort que d'anciens puissants généraux, comme Mohamed Mediène dit Toufik et Athmane Tartag dit Al Bachir, embastillés par Gaïd Salah. Nezzar est actuellement en train de chercher à se procurer des documents de voyage pour pouvoir aller rencontrer son avocate suisse, Magali Buser, à Genève et se prémunir ainsi contre le mandat d'arrêt de Gaid Salah. Il se prépare également à séjourner provisoirement à Paris afin de défier Gaid Salah qui compte entraver sa liberté de mouvement en Europe.
En plus des Nezzar, père et fils, Mehenna Hamadouche, qui dirige le journal "Algérie patriotique", est lui aussi dans le viseur des services de renseignement algériens qui le soupçonnent de fréquenter Khaled Nezzar dans son exil barcelonais. Mais pour parer à toute éventualité, Hamadouche, qui se trouve en France depuis trois mois, a activé ses nombreuses relations à Alger en vue de faire accréditer la thèse selon laquelle il aurait cessé tout contact avec Nezzar depuis son installation en Espagne.
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Pourtant, "Algérie patriotique" vient de sortir récemment un article au vitriol qui s’en prend avec véhémence à Gaid Salah, qualifié de "tyran", "sénile" et "inculte", tout en mettant en exergue le fait que nombre de "patriotes algériens" d'Algérie et de France soutiennent Khaled Nezzar. Enfonçant davantage le clou, le journal appelle les Algériens à continuer à revendiquer la mise en place d’une assemblée constituante comme unique moyen de sortie de crise politique, voire d'observer une grève générale et une désobéissance civile pour chasser Gaïd Salah.
Cet appel, par voie de presse, rassemble comme deux gouttes d’eau à celui lancé à travers une vidéo par Khaled Nezzar, au lendemain de l’émission du mandat d’arrêt contre lui, exhortant ses "frères d’armes" à se défaire de l’actuel chef de l’ANP, et les Algériens à ne pas accepter une élection présidentielle pilotée par Gaid Salah et ses affidés. Ce qui sonne comme une lapalissade, puisque la rue algérienne semble plus que jamais déterminée à maintenir la pression jusqu’à chasser définitivement les militaires du pouvoir.