A Davos, l'Europe veut éviter le "drame", la "catastrophe" d'un Brexit

Le Premier ministre britannique, David Cameron, pendant le forum économique mondial à Davos.

Le Premier ministre britannique, David Cameron, pendant le forum économique mondial à Davos. . DR

Plusieurs leaders européens, dont Manuel Valls, ont espéré à Davos que l'Union parviendrait à éviter le "drame" d'un Brexit, mais la France a prévenu que cela ne se ferait pas à n'importe quel prix.

Le 22/01/2016 à 10h23

"Voir partir la Grande-Bretagne de l'UE serait un drame (...) nous devons tout faire pour que la Grande-Bretagne et le peuple britannique restent dans l'UE, évidemment pas à n'importe quel prix", a déclaré jeudi le Premier ministre français devant le Forum économique mondial, avant de s'entretenir avec son homologue britannique David Cameron également présent à Davos.

Un Brexit serait "une catastrophe", a abondé le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schaüble, présent à ses côtés avec les chefs de gouvernement grecs et néerlandais pour débattre du futur de l'Europe. Depuis Paris, François Hollande en a remis une couche: "La France souhaite que la Grande-Bretagne reste dans l'Union européenne, c'est l'intérêt de l'Europe et du Royaume-Uni (...) mais je serai particulièrement vigilant pour que la zone euro puisse poursuivre son approfondissement".

Le Premier ministre britannique a engagé son pays dans la voix d'un référendum d'autodétermination sur la participation à l'Union européenne. S'il parvient à obtenir de ses partenaires européens quelques réformes institutionnelles, ce référendum pourrait avoir lieu en 2016 et M. Cameron ferait campagne pour le maintien, alors que la pression politique monte en Grande-Bretagne. Mais plusieurs demandes de M. Cameron semblent exagérées pour certains Européens, dont la France.

Deux faciles, deux difficiles 

Le Royaume-Uni veut changer l'UE dans quatre domaines. "Il y a deux sujets faciles à traiter: la simplification de l'UE, qu'elle se concentre sur l'essentiel, sans légiférer dans tous les sens. Là, on est en phase avec eux", explique une source diplomatique française. "Sur le renforcement de la compétitivité, supprimer les barrières au marché intérieur, on n'a pas de problème avec ça", a-t-elle ajouté.

Mais il y a "deux autres sujets plus difficiles: l'articulation entre la zone euro et le reste de l'UE. Ce qui est important, c'est que la zone euro ne soit pas empêchée de continuer à s'intégrer", selon elle. Et, ajoute-t-elle, "un des points sans doute le plus difficile" concerne les prestations sociales aux immigrants issus de l'UE. M. Cameron voudrait imposer un moratoire de quatre ans avant tout versement.

"Il n'y aura pas de compromis sur les valeurs fondamentales comme la non-discrimination et la liberté de circulation", a prévenu mardi le président du Conseil européen, Donald Tusk. Ce quatrième point est "absolument crucial", a déclaré jeudi à Davos M. Cameron, répétant qu'il voulait des avancées dans les quatre domaines.

Ces délicates questions doivent être débattues en février lors d'un sommet et si les institutions européennes espèrent conclure, la France est beaucoup plus réservée: il "faudra plus de temps", a estimé M. Valls. Le Premier ministre néerlandais Mark Rutte, qui exerce la présidente tournante de l'UE, s'est dit lui "plutôt optimiste" pour ce sommet.

"J'espère vraiment qu'on pourra (...) trouver un accord lors de la réunion du Conseil européen en février", a déclaré M. Cameron à Davos. "S'il n'y a pas d'accord valable sur la table, je ne suis pas pressé. Je peux tenir mon référendum à n'importe quel moment jusqu'à fin 2017", a ajouté le dirigeant britannique.

Plan Marshall pour la Syrie 

L'Europe a clairement été au centre des débats de ce deuxième jour de travail du Forum économique mondial, qui réunit chaque année les principaux leaders mondiaux dans le village suisse enneigé. Outre le Brexit, tout un éventail de menaces plane sur l'Europe, à tel point que M. Valls a parlé d'un risque de "dislocation du projet européen" à "très court terme", dans "les mois qui viennent", évoquant pêle-mêle "crise des réfugiés, terrorisme, montée des populismes" et Brexit.

Sur les réfugiés, "nous sommes tous d'accord que le flux est trop élevé et que nous devons l'inverser", a déclaré M. Schauble, appelant à financer massivement les pays d'origine par un plan Marshall. "Nous avons besoin d'un plan Marshall, pas pour l'Europe mais pour les régions qui ont été détruites", comme la Syrie, l'Irak, a déclaré le représentant du gouvernement allemand. "Nous devrons investir des milliards dans les pays d'origine".

"L'Union européenne est en train de tomber en morceaux" du fait de la crise migratoire, a de son côté affirmé le financier milliardaire américain George Soros. "C'est la panique dans la politique d'accueil de l'Europe", car "nous avons passé le point de bascule au-delà duquel l'afflux (de migrants) baisse la capacité d'intégration des pays", a-t-il déclaré devant quelques dizaines de participants au Forum qu'il a réunis jeudi soir pour leur livrer sa vision du monde.

Le 22/01/2016 à 10h23