Gaza: La responsabilité des médias en question

Des membres de la Croix Rouge viennent aident les victimes du bombardement d'un marché de Chajaya.

Des membres de la Croix Rouge viennent aident les victimes du bombardement d'un marché de Chajaya. . AFP PHOTO/MARCO LONGARI

L’agression israélienne meurtrière contre Gaza relance la polémique autour de la responsabilité des médias. Petit éclairage sur un autre conflit qui n’a pas livré tous ses secrets.

Le 10/08/2014 à 21h00

Maintenant que le bruit des armes s’est tu, à la faveur d’un cessez-le-feu fragile entre Palestiniens et Israéliens, une véritable course à l’échalote est relancée sur le thème des responsabilités des médias. Encore une fois, le rôle des "faiseurs d’opinion" est remis sur le tapis, pour ne pas dire en doute. L’"opinion publique internationale" a-t-elle été manipulée par les historiens de l’Instant ? Question problématique, à laquelle nous n’avons que quelques bribes de réponse. Comme celle de cette jeune pacifiste américaine qui, interrogée par la chaîne qatarie Al-Jazeera, à l’occasion d’un sit-in pro-palestinien devant la Maison blanche, a lancé cette critique à fleuret moucheté à l’adresse de certains médias américains jugés "partiaux" : "Pourquoi, à chaque fois qu’il s’agit de la résistance palestinienne, on veut bien faire des gros plans sur les roquettes lancées à partir de Gaza, en reléguant au second plan les carnages du quartier Choujayia ; alors que, dans le cas d’Israël, on assiste à un effet amplificateur du calvaire de civils terrés dans les sous-sols des colonies ?", s’interroge cette jeune activiste américaine, qui s’indigne devant "l’insoutenable usage disproportionné" de la force par Israël contre des civils sans défense et dont le seul "crime" est d’être nés Palestiniens.

Récapitulons : Israéliens et Palestiniens se battent à armes inégales. Il faut donc bien se garder de parler de "guerre" au sens classique du terme. A l’évidence, nous ne sommes pas face à deux armées. D’un côté, Tsahal -une superpuissance militaire régionale- et, de l’autre, des factions palestiniennes se battant avec des armes artisanales. Or, ne voilà-t-il pas que le terme de «guerre» revient, comme un leitmotiv, dans la bouche de reporters nécessairement Anglo-Américains et, accessoirement, Français.

Laissons de côté les CNN, FOX News, et autre CBS - traditionnels alliés d’Israël- et intéressons-nous plutôt au "cas" de certains confrères français, Le Figaro, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est accusé d’avoir fait une couverture "biaisée" du conflit de Gaza. Et, figurez-vous, c’est un intellectuel de confession juive, le philosophe Savotore Schiffer (voir article du 360, paru le 4/8/2014), qui a infligé au Figaro une cinglante volée de bois vert, en raison d’une interview avec le philosophe pro-israélien Alain Fielkenkraut, où ce dernier n’a à aucun moment condamné l’agression criminelle israélienne, ni même reconnu le droit à l’existence d’un Etat palestinien, ce qui lui a valu d’être traité de "négationniste" par l’auteur de "Grandeur et misère des intellectuels", Schiffer. Voilà un cas -évidemment pas le seul- qui en dit long sur cette déconcertante complicité médiatico-intellectuelle avec un Etat israélien qui continue de piétiner le Droit international, au détriment d’un peuple qui n’aspire qu’à la création d’un Etat palestinien souverain aux côtés de celui d’Israël. "Au Proche-Orient, il n’y a pas un Etat de trop, mais un Etat de moins", avait souligné Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne. N’est-ce pas là le sens et l’essence même des accords d’Oslo, basés sur le principe de deux Etats vivant en paix?

Par Ziad Alami
Le 10/08/2014 à 21h00