Vidéo. La Cour des comptes débarque à l’aéroport Mohammed V

Driss Jettou, président de la Cour des comptes. 

Driss Jettou, président de la Cour des comptes.  . Dr

La venue d’une mission d’audit de la Cour des comptes fait trembler les dirigeants des entités impliquées dans la gestion quotidienne de l’aéroport Mohammed V. L’opération d’assainissement prend désormais une toute nouvelle dimension.

Le 05/10/2019 à 15h25

Après deux jours de grève, les employés de la société GPI (General Private Interim), sous-traitant des services au sol à l’aéroport Mohammed V, pour le compte de RAM Handling, ont repris le travail jeudi 3 octobre. Le jour même, la filiale de la RAM a reçu une mission d’audit dépêchée par la Cour des comptes pour déterminer l’origine des dysfonctionnements qui ont entaché ces derniers mois la gestion de bon nombre de services aéroportuaires.

Chargés de contrôler au centime près où va l’argent public, les enquêteurs de la Cour des comptes vont devoir éplucher les différents contrats liant le handler national à son sous-traitant préféré. Ce n’est un secret pour personne que GPI s’adjuge les plus gros morceaux des prestations aéroportuaires: traitement de bagages, caristes, assistance aux passagers, etc.

«RAM Handling est-elle autorisée à confier l’ensemble des opérations d’assistance sol à un seul prestataire?», se demande ce fin connaisseur des rouages de l’activité aéroportuaire, non sans s’interroger sur le silence incompréhensible des autorités concernées (Office national des aéroports, Direction générale de l’aviation civile, ministère du Transport aérien, etc.).

D’aucuns estiment que le mouvement de grève des bagagistes aurait pu avoir un effet moindre si RAM Handling avait fragmenté les opérations sol entre plusieurs prestataires.

GPI n’a pourtant aucune expérience dans le domaine des services aéroportuaires.

Ne disposant pas de site web, les annuaires professionnels la présentent comme une société de recrutement, d’intérim et de travail temporaire. Son top management, au même titre que celui de RAM Handling, ont réussi jusqu’ici à préserver leur distance avec les médias, refusant de faire le moindre commentaire, y compris au moment où la crise de l’aéroport Mohammed V avait atteint son point culminant en période estivale.

Mardi 17 septembre 2019, lors d’une conférence consacrée au plan de développement de la compagnie aérienne, organisée par Premium Travel News, Le360 a interrogé le PDG de la RAM, Abdelhamid Addou, sur la gouvernance contestée du sous-traitant de RAM Handling, en se demandant s’il ne serait pas judicieux de gérer directement l’activité handling, à l’instar du concurrent immédiat, Swissport.

«Ram Handling est une belle entreprise. Nos indicateurs de performance sont meilleurs que ceux de Swissport. Nous sommes quand même un opérateur marocain. C’est scandaleux de dire qu’il faudrait peut être laisser la place à Swissport qui est un opérateur étranger. Nous devons défendre notre outil industriel marocain», a ainsi répondu le patron de la RAM.,avant d’ajouter: «toutes les entreprises de Handling dans le monde, qui ont une taille importante, sont obligées de sous traiter certaines activités. Il faut encourager l’outil marocain. C’est une évidence».

Au lendemain de la sortie du PDG de la RAM, Swissport sort un communiqué dans lequel il rappelle avoir été reconduit par l’ONDA en s’attribuant une licence pour 15 aéroports marocains, dont celui de Casablanca.

«Depuis 2012, nos agents de service et notre personnel de piste ont tous travaillé avec dévouement pour dépasser les attentes élevées de nos compagnies aériennes clientes au Maroc. Ce renouvellement de licence a été obtenu par tout notre personnel. Sur nos sites marocains, nous continuerons d’investir dans du personnel hautement qualifié et de déployer du matériel à la pointe de la technologie, dont beaucoup seront alimentés à l'électrique pour améliorer encore notre empreinte carbone», souligne le communiqué de Swissport Maroc, citant son PDG, Christophe de Figueiredo.

Reste maintenant à savoir jusqu’où ira la mission de la Cour des comptes. Sera-t-elle étendue aux autres sous-traitants, voire jusqu’aux centaines de marchés lancés chaque année par l’autorité aéroportuaire? Tous les ingrédients semblent en tout cas réunis pour ne pas exclure le scénario qui laisse prédire que de grosses têtes vont bientôt tomber, au fur et à mesure qu’avance l’opération d’assainissement de l’aéroport Mohammed V.

Par Wadie El Mouden et Youssef El Harrak
Le 05/10/2019 à 15h25