Vidéo. Grand Format. Assises de la fiscalité: entretien exclusif avec le ministre des Finances, Mohamed Benchaâboun

Le360

Loi-cadre de programmation fiscale, baisse des taux, normalisation du système dérogatoire, simplification de la fiscalité locale, calendrier de la réforme, etc. Le point sur le bilan des troisième Assises de la fiscalités avec le ministre de l’Economie et des Finances, Mohamed Benchaâboun.

Le 05/05/2019 à 11h53

Le ministre de l’Economie et des Finances, Mohamed Benchaâboun, se dit satisfait du bilan du rendez-vous de Skhirat dans la mesure où l’objectif tracé au départ, celui de disposer d’une plateforme qui fait l’objet d’un consensus et qui débouche sur une loi-cadre de programmation fiscale, a finalement été atteint. Cette loi-cadre trace la feuille de route de la réforme fiscale pour les cinq années à venir.

Parmi les engagements actés lors des Assises de la fiscalité, figure celui relatif au réaménagement du barème d’imposition de l’Impôt sur le revenu (IR) au fur et à mesure de l’élargissement d’assiette de cet impôt, ainsi que l’amélioration de la part de l’IR professionnel pour soutenir les personnes à bas revenu et les classes moyennes. «La moitié des gains issus de l’élargissement de l’assiette ira à la réduction de l’impôt, en faveur notamment des classes moyennes. L’autre moitié ira aux dépenses sociales», indique l’invité du Grand Format, votre émission de débat sur Le360.

L’une des mesures phares actées lors des Assises de Skhirat: les incitations fiscales feront l’objet d’un encadrement légal de bout en bout. «Toute mesure incitative sera jugée en fonction de son impact économique et social. Elle doit faire l’objet d’une évaluation ex-ante et ex-post pour s’assurer de la réalisation des objectifs à l’origine de chaque incitation», explique Mohamed Benchaâboun.

Quid alors de la batterie de mesures incitatives déjà existantes, au nombre de 295, qui totalisent près de 30 milliards de dirhams de dépenses fiscales (manque à gagner pour le budget de l’Etat dû au système dérogatoire: exonérations, abattements, etc.)? Réponse du ministre: «nous avons déjà mobilisé les équipes au sein du ministère pour procéder à l’évaluation de chacune des incitations. Si l’objectif escompté est atteint, la mesure sera maintenue voire même renforcée… Il ne faut pas multiplier les dérogations, mais nous ne sommes pas contre l’accompagnement de tous les secteurs par des mesures qui pourraient les aider à investir plus, à créer des emplois et à participer à la dynamique économique souhaitée… Les incitations fiscales qui peuvent se traduire par des distorsions au niveau des recettes, notamment pour ce qui concerne la TVA, seront progressivement abandonnées à l’avenir».

Concernant le dossier de la conformité aux standards internationaux, il convient de rappeler qu’en mars dernier, le Maroc a échappé à une rétrogradation de la liste grise à la liste noire des paradis fiscaux de l’Union européenne.

Le royaume s’est engagé entre-temps à normaliser trois régimes fiscaux spécifiques: les zones franches d’exportation, les entreprises exportatrices et Casablanca Finance City. «Le Maroc ne fera rien qui pourrait nuire à son économie et à son industrie. Le Maroc doit aussi sauvegarder ses intérêts avec ses principaux partenaires, notamment l’Union européenne», insiste Mohamed Benchaâboun.

La normalisation des activités manufacturières ou industrielles orientées vers l’export se fera dans le cadre d’une logique globale et cohérente de notre système fiscal et ce, dans le cadre du projet de loi cadre qui va donner de la visibilité à l’ensemble des opérateurs économiques, a-t-il ajouté.

Le ministre tient toutefois à rassurer que les engagements pris par l’Etat marocain avec un certain nombre d’opérateurs économiques et industriels importants, pour ne pas citer Renault, Peugeot, etc, seront respectés.

«Le Maroc a signé une cinquantaine d’Accords de libre-échange. Nous ne pouvons pas ignorer les mutations qui s’opèrent à l’international en matière de bonne gouvernance fiscale, notamment en ce qui concernent les pratiques d’impôt sur le revenu», indique Mohamed Benchaâboun.

S’agissant de la fiscalité locale, les Assises de Skhirat ont abouti à acter sa simplification en harmonisant ses bases d’imposition et ses procédures avec la fiscalité de l’Etat, notamment pour la taxe professionnelle. Il a été également décidé d’intégrer la fiscalité de l’Etat, la fiscalité locale et la parafiscalité dans un seul code général des impôts. «Les collectivités locales ne sont pas structurées pour gérer la matière fiscale. Les taxes locales seront gérées par la direction générale des impôts», précise le ministre.

Interrogé sur le calendrier d’implémentation des recommandations des Assises de Skhirat, le ministre de l'Economie et des finances assure que les nouvelles règles, qui doivent être respectées dans les cinq années à venir, seront insérées dans la loi-cadre. «Ces règles, dit-il, constitueront une sorte de filtre par lequel transiteront les lois de finances. La programmation fiscale consiste à inscrire les futures lois de finances dans une trajectoire qui mène vers un objectif (taux) ciblé à un horizon de cinq ans. La justification ou la non justification d’une baisse des taux d’imposition sera dorénavant annexée aux projets de loi de finances.

Par Wadie El Mouden avec Khalil Essalak et Khadija Sabbar
Le 05/05/2019 à 11h53