Vidéo. Cahiers tunisiens. Les industriels marocains dénoncent la politisation d’une affaire de dumping

adil gadrouz

S’estimant victimes de concurrence déloyale de la part des importateurs de cahiers tunisiens, les membres de l’Association des fabricants de cahiers au Maroc (AFCM) mettent à nu les allégations et les contradictions de la partie tunisienne suite à la plainte déposée il y a une semaine devant l’OMC.

Le 17/07/2018 à 18h18

L’affaire des cahiers importés de Tunisie a pris une nouvelle tournure suite à la plainte déposée, il y a une semaine, par le pays maghrébin auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), réclamant l’ouverture de consultations avec le Maroc au sujet des droits antidumping instaurés par le royaume depuis mai dernier. «La demande de consultations présentée par la Tunisie à l’OMC contre cette mesure antidumping provisoire est surprenante et contestable», affirme Jalil Benddane, président de l’Association des fabricants de cahiers au Maroc (AFCM) qui s’exprimait lors d’une conférence de presse, tenue ce mardi 17 juillet à Casablanca. Les industriels marocains, aujourd’hui au nombre limité de trois alors qu’ils étaient une douzaine il y a dix ans, montent au créneau face aux tentatives de politisation d’une affaire «technique», voir d’une «procédure purement administrative».

Voici les arguments mis en avant par l’AFCM lors de ce point de presse, en présence des dirigeants des trois unités industrielles que compte aujourd'hui le marché marocain:

- L’enquête antidumping est toujours en cours et la mesure n’en est qu’à son stade provisoire. L’autorité marocaine doit encore confirmer de manière définitive sa décision. A ce titre, l’autorité a souhaité étendre la durée de son enquête conformément aux règles anti-dumping de l’OMC ainsi que celles, marocaines, pour bénéficier de davantage de temps et apprécier les points jugés complexes de cette enquête. Par conséquent, déposer une plainte à l’OMC contre une décision qui n’est que provisoire semble avoir uniquement pour but d’entraver le bon déroulement de l’enquête et de tenter de «politiser» une procédure administrative en cours.

- Au cours d’une procédure anti-dumping, les exportateurs sont, en règle générale, très mobilisés pour contester les arguments avancés par l’industrie nationale à tous les stades de l’enquête. Or, force est de constater que les exportateurs tunisiens semblent uniquement vouloir se défendre en demandant de l’aide auprès de leur gouvernement. S’il n’y a vraiment pas de pratiques de dumping de la part des exportateurs tunisiens, pourquoi ne le prouvent-ils pas auprès de l’autorité marocaine? La procédure est toujours en cours et toutes les parties peuvent présenter eurs commentaires et arguments à l’autorité marocaine. Il serait donc plus pertinent pour les exportateurs tunisiens de focaliser leurs efforts dans la procédure administrative.

- L’antidumping est un instrument foncièrement technique et non politique. L’imposition de mesures anti-dumping est conditionnée par des règles strictes. La finalité de ces mesures est de rétablir les conditions d’une concurrence loyale sur le marché marocain. Dès lors que des pratiques de dumping sont avérées et qu’elles causent un dommage à l’industrie nationale, il est indispensable de sanctionner ces comportements déloyaux de la manière la plus ferme, soutient l’AFCM.

- La décision des autorités marocaines d’imposer des mesures antidumping provisoires sur les importations de cahiers scolaires originaires de Tunisie a été adoptée sur la base de données communiquées par les exportateurs tunisiens et dans le strict respect du débat contradictoire. Selon l’AFCM, la Tunisie semble oublier que:

 ° Les prix à l’export pratiqués par les exportateurs tunisiens sur le marché marocain sont extrêmement bas et restent systématiquement les moins élevés en comparaison avec les autres importations.

° Les prix des cahiers numérotés sur le marché tunisien sont fixés par le gouvernement et ne peuvent donc servir de référence pour le calcul de la valeur réelle. Toute position contraire serait jugée illégale au regard des règles antidumping OMC et marocaines.

° Les flux d’importations de cahiers originaires de Tunisie au Maroc n’ont fait que se renforcer au cours de ces dernières années. Les dernières statistiques au premier trimestre 2018 qui démontrent encore un accroissement des importations traduisent le comportement des exportateurs tunisiens d’écouler massivement leurs produits sur le marché marocain et justifient la nécessité d’imposer des mesures anti-dumping pour contrer ces comportements, poursuit l’AFCM.

° Il a été déterminé à titre préliminaire et de façon impartiale que ces importations tunisiennes de cahiers ont causé –et causent toujours –un dommage à l’industrie marocaine du cahier.

° Il est consternant de réaliser que les importations tunisiennes de cahiers s’accaparent près de 90% des importations totales de cahiers au Maroc, empêchent tout développement des autres importations, note l’AFCM.

° Il est également consternant de réaliser que le marché marocain représente plus de 80% du volume total des exportations tunisiennes de cahiers dans le monde, ajoute la même source.

- Si les exportations tunisiennes vers le Maroc ont procuré de très larges bénéfices aux producteurs tunisiens pendant des années au détriment des emplois marocains, les industriels marocains se demandent si ces marges de profit ont été réellement acquises de manière loyale ou si c'est au détriment d’une branche de production marocaine qui est compétitive et génératrice d’emplois à l’echelle nationale.

- Le Maroc doit-il contribuer à l’économie tunisienne en permettant que des comportements déloyaux continuent de s’exercer sur son territoire ou, au contraire, adopter une position ferme contre tout exportateur - tunisien ou d’une quelconque autre origine - qui adopterait des comportements déloyaux de sorte à causer préjudice au tissu industriel marocain, s’interroge l’AFCM.

En définitive, par la voix de leur association, les producteurs marocains de cahiers scolaires réitèrent leur appel à ce que les débats relatifs à cette procédure administrative soient circonscrits aux seuls aspects techniques du dossier et que "l’impartialité de la procédure soit préservée face aux pressions politiques que tentent d’exercer la Tunisie", conclut l’AFCM.

Par Wadie El Mouden et Adil Gadrouz
Le 17/07/2018 à 18h18