Les spécialistes n'ont de cesse de le répéter, à ce jour, la guerre en Ukraine et ses impacts constituent la principale raison de la hausse des prix du pétrole, mais d’autres facteurs peuvent également expliquer la situation actuelle, notamment l’incapacité des pays exportateurs de l’or noir d’augmenter leur production.
Le mardi 7 juin dernier, le prix du litre d'essence et du gasoil a augmenté de 60 centimes par rapport au mois de mai. Le prix du litre d’essence à Casablanca frôle désormais la barre des 17 dirhams, et se distribue jusqu’à 16,83 dirhams le litre, celui du diesel affiche jusqu’à 14,68 dirhams.
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Vendredi soir à Londres, le prix du Brent de la mer du Nord a atteint 122 dollars par baril et celui du West Texas Intermediate (WTI) était proche de 121 dollars. Des prix qui incorporent une importante prime de risque géopolitique très liée à la guerre en Ukraine.
Contacté par Le360, Francis Perrin, chercheur spécialiste des problématiques énergétiques auprès du Policy Center for the New South explique que cette tendance haussière des prix devrait se poursuivre durant les prochains mois, à cause de la guerre qui continue à ce jour, et des sanctions occidentales contre la Russie, dont la production pétrolière est en baisse depuis le mois d’avril.
«La Russie était au début de cette année le second producteur de pétrole dans le monde derrière les Etats-Unis. Elle a depuis glissé à la troisième place après les Etats-Unis et l’Arabie Saoudite. La décision de l’Union européenne d’imposer un embargo pétrolier presque total contre la Russie à la fin 2022 a aussi contribué à faire monter les cours de l’or noir», souligne le chercheur.
Autre facteur, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, l’OPEP+ a du mal à augmenter sa production pour atteindre les objectifs que cette coalition se fixe depuis plusieurs mois. Selon les pays, ce sont des problèmes techniques ou géopolitiques qui contrarient la volonté de l’OPEP+ d’accroître «prudemment» sa production.
Un avenir incertainAlors que certains analystes avancent que le prix des carburants au Maroc pourrait atteindre les 25 dirhams, le litre, durant les prochains mois, notre chercheur estime qu’il est très difficile de donner un chiffre précis dans l’état actuel des choses.
Francis Perrin explique ainsi qu’il est impossible de prévoir l’évolution des prix du pétrole compte tenu de l’instabilité géopolitique et géoéconomique au niveau mondial. Il est néanmoins probable que les prix vont rester à des niveaux très élevés pendant plusieurs semaines, ils pourraient même augmenter davantage.
«La guerre en Ukraine s’inscrit dans la durée, les sanctions contre la Russie ne vont pas être levées de sitôt et le marché pétrolier mondial va donc rester tendu. Il est impossible de donner des chiffres sérieux sur les prix du pétrole et des carburants à l’avenir», regrette-t-il.
Seul espoir à l’horizon de voir les prix se stabiliser, ou légèrement baisser est d’augmenter la production pétrolière, une démarche déjà annoncée par les 23 pays de l’OPEP+ mais qui a encore du mal à se traduire sur le terrain.
«L’OPEP+ a décidé d’augmenter un peu plus sa production en juillet et août 2022 (+648 000 barils par jour pour chacun de ces deux mois, contre +400 000 b/j chaque mois depuis août 2021). C’est une bonne chose mais, comme indiqué ci-dessus, entre ce qu’annonce l’OPEP+ et ce qu’elle produit effectivement, il y a une différence et cela dure depuis plusieurs mois», explique Francis Perrin.
L’avenir du marché pétrolier reste donc tributaire de la volonté des grands producteurs au niveau mondial, à leur tête l’Arabie Saoudite qui pourra décider en fonction du contexte géopolitique d’augmenter ou pas sa production et intervenir ainsi pour stabiliser les prix.
«Il sera intéressant de voir ce qui va se passer à partir de septembre 2022. En effet, les réductions de production mises en place par l’OPEP+ depuis avril 2020 se terminent en septembre. Que feront alors des pays tels que l’Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis et l’Irak qui ont les moyens de produire plus? C’est un élément clé pour les prochains mois», a expliqué pour finir le spécialiste des problématiques énergétiques.