Grand Format. Le directeur général des impôts, Khalid Zazou, déballe tout sur la contribution professionnelle unique

Le360

Invité de l’émission Grand Format Le360, Khalid Zazou, directeur général des impôts par intérim, dresse un premier bilan du lancement de la CPU et évoque les perspectives d’évolution de ce nouveau régime fiscal, directement associé au vaste chantier de généralisation de la couverture sociale.

Le 29/04/2021 à 01h35

Instituée par la Loi de finances 2021, la Contribution professionnelle unique (CPU) intervient dans un contexte particulier marqué par une crise sanitaire inédite liée à la pandémie de Covid-19. Celle-ci a révélé la nécessité d’accélérer la généralisation de la couverture médicale à tous les Marocains, a souligné Khalid Zazou, en rappelant les orientations du dernier discours du Trône et les recommandations des Assises nationales du commerce (avril 2019) et de la Fiscalité (mai 2019).

La CPU, qui regroupe deux éléments (l’impôt sur le revenu professionnel et la couverture médicale) vise avant tout à assurer la migration vers l’Assurance maladie obligatoire (AMO) au profit d’une large catégorie de la population, en particulier les commerçants et les artisans. A ce titre, la DGI est appelée à jouer un rôle d’intermédiaire entre les contribuables concernés et la CNSS.

Avec ce nouveau régime, la partie «impôt sur le revenu» reste quasiment inchangée. La base imposable retenue pour l’année 2020 sera maintenue en 2021, année transitoire dans la mise en œuvre de la CPU. «Nous veillerons à ce que l’imposition (hors cotisation AMO) correspond aux capacités contributives de chaque contribuable», tient à rassurer le directeur des impôts.

Seuls sont concernés par la CPU les contribuables qui étaient soumis au régime du bénéfice forfaitaire antérieurement à 2021, ceux qui ne tiennent pas de comptabilité, à savoir les commerçants et les artisans dont le chiffre d’affaires annuel est inférieur à 2 millions de dirhams par an (ou 500.000 dirhams pour les prestataires de services).

La DGI estime le nombre des contribuables ciblés par la CPU à 500.000, drainant chaque année l’équivalent de 3% de recettes fiscales au titre de l’IR. A ce jour, pas moins de 120.000 commerçants et professionnels ont déjà adhéré au nouveau régime, soit 80% de la population-cible qui déclarait régulièrement ses revenus sous l’ancien régime du bénéfice forfaitaire.

Interrogé sur les craintes suscitées par la CPU auprès de certaines associations de commerçants, Khalid Zazou se montre compréhensif, évoquant le caractère nouveau de ce dispositif. «2021 est une année transitoire. Ce qui importe le plus pour le commerçant, c’est de maintenir les canaux de communication et d’éviter de lui imposer des amendes, pénalités ou majorations», a-t-il expliqué, faisant référence à l’article 236-2 du Code général des impôts qui donne au ministre des Finances le pouvoir d’accorder une modération des majorations et amendes, lorsque les circonstances le justifient.

«La CPU est une mesure à caractère social avant tout. Ce n’est pas logique que l’on parle d’amendes ou de pénalités, surtout dans les circonstances exceptionnelles que nous traversons», soutient-il.

Pour les professionnels et artisans impactés par la crise sanitaire, la DGI est disposée à leur accorder un dégrèvement partiel ou total de l’impôt, en activant l’article 236-1 du Code général des impôts.

«Nous allons prendre en considération la situation des contribuables dont l’activité était à l’arrêt, ou touchée par les effets de la pandémie. Pour bénéficier de ce dégrèvement d’impôt, le contribuable doit déposer une demande auprès de l’administration fiscale, accompagnée des justificatifs nécessaires», indique Khalid Zazou.

En dehors de ceux touchés par les effets du Covid, d’autres contribuables auront également droit à un traitement spécifique de la part de la DGI. C’est le cas, par exemple, lorsqu'un bien à usage commercial se trouve entre les mains d’héritiers en situation d’indivision. En effet, la partie afférente à l’impôt reste intacte. Mais seule une personne, soit l’héritier principal, pourra bénéficier de l’AMO.

«Une solution sera trouvée pour permettre aux autres héritiers de bénéficier d’une couverture médicale, soit dans le cadre de la CPU, soit dans celui de l’autoentrepreneur», annonce le directeur des impôts. Idem pour les contribuables exerçant dans le cadre d’un contrat de gérance libre.

Par ailleurs, le mode de calcul du bénéfice forfaitaire suscite un vif débat dans les rangs des associations des commerçants. Ceux-ci réclament une actualisation des coefficients appliqués par le fisc, lesquels n’ont pas bougé depuis près de dix ans. Interrogé à ce sujet, Khalid Zazou affirme que la DGI, fidèle à son approche participative, reste à l’écoute des observations des représentants des différentes catégories des contribuables, et n'a pas exclu l’éventualité d’apporter des ajustements au dispositif de la CPU dans le cadre de la prochaine loi de finances 2022.

Par Wadie El Mouden
Le 29/04/2021 à 01h35