Femmes, attention à ne pas vous dénigrer vous-mêmes en utilisant des stéréotypes sexistes!
Par Soumaya Naamane Guessous le 06/05/2022 à 12h02
Les stéréotypes sexistes, fondés sur le genre, sont nombreux: la femme est faible et l’homme fort. Dieu l’a créée ainsi. On rejette tout l’apport de l’éducation sur les comportements des hommes et des femmes.
«La beauté de l'homme consiste dans son esprit, l'esprit de la femme consiste dans sa beauté.» (Proverbe arabe.)
Une phrase qui paraît anodine, mais qui méprise les femmes: on les réduit à un corps sans esprit, dont le rôle n’est que la séduction!
Un stéréotype néfaste!
Le stéréotype (assura namatya) est une idée, une opinion toute faite sur une personne ou un groupe qui passe pour une vérité.
En psychologie, le stéréotype est constitué de mots, d’expressions toutes faites, de comportements, de gestes, de pensées, n’ayant pas toujours de lien avec la réalité. Nous les répétons sans vérifier leur sens ou leur véracité.
Le langage est le miroir de la société. Il renseigne sur la culture, l’identité, le cadre de référence des personnes, les mentalités… Chaque mot reflète notre mode de pensée et influence les autres.
Nous utilisons des expressions toutes faites, nuisibles à des personnes ou à des groupes de personnes, à leur dignité…
En psychologie sociale, le stéréotype est une représentation sociale standardisée, qui catégorise un groupe de personne, façonnée par une idée reçue, une opinion généralisée. Les stéréotypes touchent des ethnies, des races, des étrangers, des religions, des cultures et justifient la xénophobie, le racisme, les discriminations…
Le stéréotype s’appuie sur des préjugés, des clichés.
Les préjugés sont des opinions négatives sur une personne ou un groupe, qui se base sur un stéréotype. Nous en utilisons beaucoup, quitte à nous mépriser nous-mêmes: «jamais les Marocains maytafrouhe (ne réussiront)».
Une expression raciste, courante: le blanc comprend avec un clin d’œil et le noir avec un coup de poing.
Les stéréotypes sexistes, fondés sur le genre, sont nombreux: la femme est faible et l’homme fort. Dieu l’a créée ainsi. On rejette tout l’apport de l’éducation sur les comportements des hommes et des femmes.
La femme est très sensible, émotive, c’est pour ça qu’on lui interdit la visite des cimetières.
Au garçon on dit que ses sœurs sont un danger pour son honneur. Il doit les surveiller, d’où sa supériorité. Adam et Eve, un autre stéréotype! Toute femme est une Eve potentielle, dangereuse pour l’homme. Pourtant, contrairement au Judaïsme et au Christianisme, l’Islam impute la faute aux deux. Mais le langage incrimine toujours Eve.
Lamra bla ‘qel (écervelée), elle est bavarde, menteuse. Prend son avis et fait le contraire. Méfie-toi de souk nsa (milieu des femmes), dont Abderrahmane El Mejdoube dit qu’il est matiar (maudit) (poète marocain d’El Jadida, XVIe siècle).
Les femmes sont tombées du sac d’Iblis (Satan). Lamra dalâ âouja (tordue). Kalma derjale (parole d’homme) car les femmes ne sont pas crédibles. On dit chghale la’yalate (une affaire de femmes) quand une affaire échoue.
L’homme est une setra (protection) pour la femme. Quelque soit ses réussites et ses performances, sans mari, elle est dévalorisée. Arrajale mataytâbche (on ne critique pas l’homme): être homme est déjà une valeur.
Klame la3yalate (langage de femme) quand une personne radote. Hammam la’yalate (hammam de femmes) si plusieurs personnes parlent en même temps. Char mra ou lkhir mra: le bien et le mal dépendent de la femme. Si un couple réussit, c’est grâce à la femme, s’il échoue, c’est de sa faute. Car hta mouche matayahrabe mine dar alârse (le chat ne fuit pas une cérémonie de mariage). Le mari ne quitte pas son foyer s’il est bien traité par l’épouse. Mais on ne dit pas que l’épouse ne fuit pas…
Un stéréotype en faveur des hommes: Dieu les a dotés d’une puissance sexuelle insatiable. Cela justifie une sexualité masculine hors-mariage alors que la religion l’interdit pour l’homme et pour la femme. Ça justifie l’adultère: rajale ghir kelbe (un chien); le mari est un courant d’air dans la maison, on ne peut le retenir. A la maison, ton mari t’appartient; dans la rue il appartient à toutes les femmes…
Ignorance ou fantasme? Au Maroc, il y a 10 femmes pour chaque homme, alors qu’il y a moins de 1% de femmes plus que d’hommes. Ce qui justifie la polygamie et la multiplicité des partenaires et rend les hommes précieux.
Souvent, face à un chauffard: c’est normal, c’est une femme!
Un autre stéréotype qui a dévalorisé les femmes pendant des siècles: les menstruations. L’humanité ne comprenait pas pourquoi un homme qui saigne peut mourir et pas une femme. D’où des abus dont on en garde encore des traces: la femme perd la tête une semaine par mois et ne peut avoir des postes de responsabilité. Si elle est pilote, elle fait crasher l’avion… La nomination des femmes à des postes jadis masculins a provoqué la colère ou la dérision des hommes et aussi de nombreuses femmes! D’où des blagues misogynes: la policière a poussé zgharite (youyou) au lieu de siffler un chauffard. Une femme adoule devait marier un couple. Le marié s’est amouraché d’elle… Une femme ne peut être gouverneur, car si elle a ses règles, elle ne peut faire les prières dans les mosquées… Quand une femme est stricte, on dit: elle a ses règles ou quoi?!
Nous n’avons parlé ici que des stéréotypes véhiculés par le langage et non pas de ceux qui foisonnent dans les médias, les publicités, les manuels scolaires, un certain discours religieux, politique… Le comble, c’est que les femmes elles-mêmes participent à leur propre dénigrement.
Que de mères disent à leurs fils: fais attention aux filles. Elles peuvent te coller un bâtard. Au lieu de leur apprendre à être responsables de leurs actes, à respecter leurs partenaires et à les protéger.
Les stéréotypes sexistes sont violence et discrimination à l’égard des femmes.
Nous pouvons les déconstruire pour accorder aux femmes la valeur qui leur revient.
Je préfère le stéréotype positif qui dit que derrière tout grand homme, il y a une femme. Mais également: derrière toute grande femme, il y a un homme!