Vaccination anti-Covid-19: ce qu'en dit Azeddine Ibrahimi, directeur du laboratoire de biotechnologie de Rabat

Azzedine Ibrahimi.

Azzedine Ibrahimi. . DR

Directeur du laboratoire de biotechnologie relevant de la faculté de médecine et de pharmacie de Rabat, Azeddine Ibrahimi revient, dans cet entretien accordé à la MAP, sur le lancement dans les toutes prochaines semaines d'une campagne d'envergure de vaccination contre le Covid-19.

Le 11/11/2020 à 15h28

Quel est l'objectif de cette campagne de vaccination anti-covid-19 qui aura bientôt lieu au Maroc, conformément aux Hautes orientations de Sa Majesté le Roi Mohammed VI ?Il est très clair que pour plus ou moins combattre la pandémie du Covid-19, il faut avoir une immunité soit naturelle, soit acquise. L'immunité naturelle, c'est ce qui arrive en ce moment, c'est à dire que les gens qui vont être affectés par le coronavirus développent des anticorps leur permettant de combattre ce virus. Pour ce qui est de l'immunité acquise, il s'agit d'utiliser un vaccin. A ce propos, j'assure que cette opération est maîtrisable: le vaccin va, à travers un antigène, permettre au corps de développer des anticorps à même de combattre le virus, si on est contaminé. Ce procédé est intéressant, parce qu'il permettra d'avoir une immunité acquise pour combattre le virus, ce qui est essentiel pour apporter une solution radicale à même de faire face aux épidémies ou aux pandémies.

Comment une campagne de vaccination aussi massive sera-t-elle opérationnalisée?C'est très intéressant de parler de ce volet, parce qu'il y a ce risque de confondre beaucoup de choses, notamment le développement d'un vaccin, étape à part, et la vaccination de masse, qui en est une autre. Quand il y a une pandémie ou une épidémie, ce qu'on va faire au départ, c'est caractériser l'agent pathogène, puis proposer des antigènes qui vont créer des anticorps. Ensuite, on procède à des tests chez les animaux, et par la suite chez les humains, avant de développer un vaccin qui doit obligatoirement détenir les autorisations nécessaires de mise sur le marché, en particulier trois qualités essentielles que sont la toxicité, l'efficacité et la qualité de sa production. Ces critères vont permettre aux agents compétents de donner l'autorisation de mise sur le marché au vaccin. Au Maroc, l'administration en charge de cette mission est la Direction du Médicament et de la Pharmacie (DMP) [relevant du ministère de la Santé, Ndlr]. L'accent [au cours des différentes démarches accomplies par cette admistration, Ndlr] a été mis sur la manière de faire parvenir le vaccin dans de bonnes conditions: comment choisir et sélectionner les catégories de personnes? Quelles seront les premiers bénéficiaires? Et donc à partir de là, on passe à une autre étape, une autre dimension. C'est pour cela qu'on a besoin d'une approche collaborative avec, notamment, tous les acteurs concernés comme le ministère de la Santé, pour permettre une distribution efficace.

Sur quelle base les catégories ciblées en premier lieu par la vaccination ont-elles été choisies?Au Maroc, nous avons déjà une culture de la vaccination, donc nous en avons des rouages bien précis. Ainsi il faut rappeler que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a déjà émis des recommandations sur la manière d'effectuer des vaccinations de masse. Il y a donc une priorité accordée à des gens qui vont le recevoir en premier. Nous allons commencer par le personnel de la Santé, les agents de la Sûreté nationale et des autorités locales, car ils sont en première ligne dans la lutte contre cette pandémie. La deuxième partie [de cette campagne de vaccination de masse] ciblera les personnes qui sont plus ou moins vers un âge particulier et qui ont, par exemple, des pathologies ou des maladies chroniques, c'est essentiel. Tout cela dans un souci bien précis, parce que nous aurons un nombre réduit de doses au départ, d'à peu près 10 millions de doses, et on va essayer d'effectuer [cette campagne de vaccination], selon ces priorités. C'est quelque chose d'essentiel, qui va ouvrir la voie par la suite à avoir le vaccin [pour tous]. 

Comment répondre aux réticences de certains devant le vaccin anti-Covid-19?Il faut savoir que la communication est essentielle, avant toute campagne de vaccination de masse, afin de permettre aux gens de bien comprendre de quoi il s'agit, loin de toute théorie du complot. Heureusement que nous avons cette culture du vaccin au Maroc, parce que le principe du vaccin provient d'une découverte ancienne, qui a permis, en fin de compte à tout le monde d'avoir une bonne santé. Je rappelle aussi que pour la première fois, on est en train de développer un vaccin [contre le virus SARS-CoV-2] qui répond à un processus [qui a a] toujours été utilisé pour celui [du développement] de médicaments. (...) Il est obligatoire de passer par un processus d'autorisations, extrêmement sévère. En effet, aucune firme ne va risquer de proposer un vaccin qui n'est pas très bon, parce que cela va ruiner tout son business. En tant que Marocain, j'invite tout le monde à se faire vacciner pour la grippe saisonnière, surtout les gens qui sont en situation de précarité sanitaire. Je crois que chacun sera à même de comprendre que l'on ne se vaccine pas seulement pour sa propre santé, mais aussi pour celle des autres. J’espère que tous les Marocains vont s’impliquer dans cette campagne [de vaccination contre le Covid-19]. 

Par Oumaima Berguig (MAP)
Le 11/11/2020 à 15h28