Plus pauvre, plus "bête"? Si les américains le disent!

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Une récente étude américaine établit une corrélation entre "pauvreté" et QI.

Le 30/08/2013 à 16h54, mis à jour le 30/08/2013 à 22h37

Il est vraiment des recherches dont le véritable enjeu reste pour le moins obscur. Surtout lorsque les hypothèses de départ qui les justifient paraissent pour le moins tendancieuses et aboutissent, de plus, à des pseudo résultats qui se contredisent. Aussi, une récente recherche menée aux Etats-Unis sur la corrélation entre niveau de vie et intelligence, pour traduire avec un tant soit peu de délicatesse le thème d’une recherche dite scientifique qui porte sur un éventuel lien entre "pauvreté" et "quotient intellectuel", est pour le moins étonnante, pour ne pas dire effrayante.

La recherche a commencé dans le New Jersey et a porté sur un échantillon de 400 personnes prises au hasard dans un centre commercial. Les revenus de ces personnes allaient de 70.000 dollars pour les plus élevés à 20.000 dollars pour les plus bas. A noter, déjà, qu’on n’en est pas encore, pour les plus "pauvres", au niveau d’un seuil alarmant de pauvreté, sans vouloir amoindrir ou dénigrer les problèmes qui peuvent se poser aux moins nantis dans une société de consommation outrancière. Mais, surtout, aucune information n’est donnée quant au nombre de personnes que sont supposés nourrir ces salaires annuels, information qui change quand même sérieusement la donne.

Résultats biaisés d’emblée ? Vraisemblablement...

Poursuivons. Les personnes ciblées ont été réparties en deux groupes. Lesquels ? On vous le donne en mille : les "riches" d’un côté, les "pauvres" de l’autre, pour les soumettre à des sortes de jeux de rôle censés aboutir à des "tests cognitifs" et de "contrôle de soi" révélateurs. Résultat : face à des petits imprévus comme une réparation de voiture, les tests de QI ne montrent aucune différence significative. Mais, dès que survient un problème financier plus conséquent, sachez que les "pauvres" enregistrent jusqu’à 13 points d’écart. Ce qui, évidemment, est problématique si vous êtes face à un Jean-Claude Van Damme qui ne doit pas être si allumé, après tout et, après tout aussi, on l’aime bien quand même. Faut suivre, c’est tout. Face à Einstein, qui n’était pas milliardaire, vous vous en sortez plutôt bien. 

Loin de se satisfaire de ces résultats édifiants d’une étude édifiante, les chercheurs se sont rendus en Inde, à croire qu’ils avaient un budget à brûler avant la deadline. Et, cette fois, ils mènent l’enquête auprès de cultivateurs de canne à sucre qui touchent le fruit de leur labeur une fois par an. On vous le donne en mille encore une fois : "ils sont plutôt riches un mois après la récolte et très pauvres un mois avant" ! Et sachez que leur QI décolle de 10 points après la récolte !

Conclusions ?

Conclusion de la recherche, s’il en est : la pauvreté diminue les capacités mentales. "Pour nombre de pauvres, ces problèmes deviennent tellement persistants qu'il est difficile de se concentrer sur autre chose comme s'éduquer, la formation professionnelle ou même l'organisation de son temps", constate Sendhil Mullainathan, économiste à l'Université de Harvard (Massachusetts, nord-est), qui a participé à l’étude. Oui, effectivement, quand on ne sait si l’on va parvenir à subvenir aux besoins de sa famille, on ne pense pas vraiment à aller s’enquérir du dernier prix Goncourt, à supposer encore qu’on sache lire… Mais ne nous laissons pas entraîner dans d’autres débats. Sachez quand même que, en cas de pauvreté, les capacités mentales baissent parce que trop sollicitées ! "Cela ne signifie pas que les pauvres sont moins intelligents que les autres mais que la pauvreté mobilise beaucoup d'énergie mentale", déclarent les scientifiques qui se veulent rassurants. Oui, c’est à en perdre son latin. Mais bon, l’étude est américaine et le latin est en l’occurrence le dernier souci…

Quand on sait que multitudes d’études faisant autrement preuve de réflexion ont démontré, d’une part, que les tests de QI sont culturellement biaisés et que, d’autre part, les personnes les plus démunies font preuve d’une ingéniosité et d’une capacité d’adaptation remarquables, capacité d’adaptation qui est d’ailleurs la définition même de l’intelligence, on peut vraiment se demander à quoi rime ce type de faux débat aux relents idéologiques inquiétants. Eh oui, "l'intelligence, c'est la faculté d'adaption", comme disait Gide, entre autres...

Par Bouthaina Azami
Le 30/08/2013 à 16h54, mis à jour le 30/08/2013 à 22h37