Livreurs de fast-food ou la précarité sur deux roues

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Revue de presseKiosque360. A Casablanca, le marché de la restauration rapide et de la livraison à domicile se fait florissant. Plusieurs chaînes de restauration, ainsi que des intermédiaires, ont investi ce domaine aux dépens des livreurs, honteusement exploités dans des conditions indignes.

Le 11/12/2019 à 21h10

Il suffit seulement d’un clic sur votre portable pour vous connecter à un restaurant, commander votre hamburger, pizza ou autre et vous faire livrer en un temps record. Toutes les chaînes de restauration rapide, voire certains snacks populaires de Casablanca, ont recours, aujourd’hui, à des applications mobiles pour livrer le client à l’adresse désirée, chez lui, sur son lieu de travail... Ce marché est devenu si florissant que de nombreuses sociétés intermédiaires ont été créées pour exercer dans ce domaine. On trouve, parmi elles, des centres d’appel et des sous-traitants qui recrutent des livreurs pour le compte des sociétés de livraison. Dans cette course effrénée au service de restauration rapide, tout ce petit monde ressort gagnant sauf les principaux concernés par ce nouveau job: les livreurs. 

Il s’agit, généralement, de jeunes chômeurs ou d’étudiants qui exercent ce métier précaire, et non sans risques, pour quelques dirhams de plus. Encore faut-il, pour être «recruté», disposer d’une moto en son nom et d’un portable. Non seulement ces employeurs font travailler les livreurs avec leurs propres moyens, mais ils leur font payer les frais de carburant, l’entretien et la réparation de la moto en cas d’accident. La seule chose que les livreurs n’achètent pas pour travailler, ce sont les sacoches de livraison mises à disposition par leurs employeurs fictifs. Ils ne possèdent pas de contrat de travail et perçoivent des miettes équivalant à quelque 700 dirhams par mois, avec une prime de 5 dirhams pour chaque repas livré.

Le quotidien Al Massae rapporte, dans son édition du jeudi 12 décembre, que les livreurs qui travaillent dans les petits restaurants ont pour principal gagne-pain les pourboires que leur donnent les clients (entre 30 et 100 dirhams par jour). Il en est de même pour ceux qui travaillent dans les grandes chaînes et qui ne comptent que sur la générosité des clients pour joindre les deux bouts. Le journal Al Massae, qui a interviewé plusieurs livreurs, révèle qu’ils ne bénéficient pas de couverture sociale, ni d’autres avantages sociaux, quelle que soit leur ancienneté. Lesdites chaînes de restauration versent dans l’exploitation honteuse de la précarité de jeunes gens qui ne sont mêmes pas indemnisés pour les heures supplémentaires qu’ils effectuent lors des fêtes et des vacances. Pourtant, ce commerce rapporte gros puisque des chaînes comme Jumia, Food et Glovo ont investi ce marché par le biais d’intermédiaires interposés.

Pour recevoir les commandes, les livreurs, munis de leurs motos et leurs portables, se réunissent devant les McDonald’s, Burger King et autres. Le client passe d’abord par un centre d’appel qui le redirige vers le restaurant pour enregistrer sa commande, ensuite envoyée sur l’application du livreur. Ce dernier, qui dispose de l’adresse et du téléphone du client, doit le livrer dans les meilleurs délais, s’exposant parfois à des risques très graves, outre ceux de la circulation. D’autant que ces livreurs travaillent à des heures tardives et doivent parfois livrer les repas dans des quartiers difficiles.

Par Hassan Benadad
Le 11/12/2019 à 21h10