Le calvaire des deux fillettes du jihadiste arrêté au Maroc

Les deux enfants âgés de 4 et 2 ans avaient été confiés à leurs grands-parents après l'arrestation de leur père.

Les deux enfants âgés de 4 et 2 ans avaient été confiés à leurs grands-parents après l'arrestation de leur père. . Assyla, page Facebook du comité de soutien de Valérie B.

Le cas de Valérie B., laissée en couche en France par son époux qui s’était remarié et voulait rallier Daach avec ses deux fillettes, suscite l'émotion dans l’Hexagone. De Trabes à Chtouka, en passant par le tribunal des affaires terroristes à Rabat, Le360 a mené l’enquête. Nouvelles révélations.

Le 29/10/2014 à 15h21

L’affaire du jihadiste qui voulait embarquer ses deux fillettes vers l’enfer de Daach ne cesse de connaître des rebondissements. Stations de radio à grande écoute et quotidiens à gros tirage de l’Hexagone se sont emparés du dossier. Sous un nom d’emprunt, Valérie B. leur a confié (comme elle l’a fait à Le360 au lendemain de l’arrestation de son mari) le calvaire qu’elle a vécu avec son époux qui, durant cette dernière année, est devenu adepte des idées extrémistes. Mais si les médias français s’intéressent de plus en plus à ce dossier, c’est que la mobilisation s’organise à Tarbes où elle vit. Un comité de soutien a été créé dans cette ville pour aider Valérie B. à récupérer ses enfants. Jointe à nouveau au téléphone par Le360, la mère privée de ces deux bébés nous explique que les grands-parents - auxquels la police marocaine a confié les deux fillettes après l’interpellation de Nabil R. à l’aéroport Mohammed V de Casablanca - lui font quasiment du chantage. Pour témoigner on the record, elle a insisté pour être accompagné d’une de ses amies, membre du comité de soutien.

Dépitée par le comportement de sa belle famille et devant la lenteur du recours judiciaire qu’elle a introduit pour retrouver ses enfants, Valérie B. a décidé d’envoyer un courrier au roi Mohammed VI. Ecoutez ses explications via sa conseillère officieuse en communication.

Le360 a voulu donner la parole aux grands parents. Contacté par téléphone, le père de Nabil R. s’est refusé à tout commentaire. Le membre des Forces auxiliaires à la retraite paraît même remonté contre la presse marocaine.

Ce black-out curieux de la part des parents du présumé jihadiste ne nous a pas découragé. Le360 a fait le déplacement à Tnin Chtouka, près d'El Jedida, pour tenter de rencontrer la famille et s’enquérir de l’état des deux petites Françaises. Les portes sont restées malheureusement fermées, mais nous avons pu en savoir plus sur Nabil R. à travers ses voisins. Vidéo.

Pendant ce temps, l’enquête judiciaire sur le présumé jihadiste, menée par le parquet spécialisé dans les affaires de terrorisme, se poursuit. Le département de l’Intérieur avait diffusé, dimanche dernier, un communiqué dressant le profil extrémiste de Nabil R., qui s’est entraîné au maniement des armes en France et qui projetait même d’exécuter des actes terroristes dans l’Hexagone. Au-delà de ce communiqué officiel, Le360 a eu accès à des sources judiciaires qui nous ont confié d’autres éléments au sujet de ce jihadiste en herbe.

Agé de 31 ans, Nabil R. a quitté clandestinement le Maroc à destination de l’Espagne en 2006. De la péninsule ibérique, il passe en France où il fait la connaissance de Valérie B alors qu’il travaillait comme chauffeur de poids-lourd. Ce n’est qu’au cours des deux dernières années qu’il se découvre une fibre jihadiste. Sa fréquentation à la mosquée Omar Ibn Khattab de Tarbes devient plus que régulière. L’homme y fait même l’imam pour la prière d’Al Fajr, anime des causeries de prédication appelant au jihad où il dénigre la France pour son intervention militaire au Mali, le tout en présence de ressortissants français convertis qui affichent des affinités avec Jabhat Nousra, active en Syrie. Pis encore, il noue via Internet des liens étroits avec des chefs de guerre de l’Etat islamique, d’origine marocaine, dont le chef de la cellule de Fnideq, démantelée le 14 août dernier.

Dans ses auditions devant le parquet, Nabil R. a affirmé que sa femme, laissée en France, assistait souvent à ses prêches extrémistes et les cautionnait. Une accusation qui fait sortir Valérie B. de ses gonds.

Toujours selon notre source proche de l’enquête, Nabil R. aurait confié qu’il avait obtenu une fatwa sur le net l’autorisant à répudier sa femme française (sous prétexte qu’elle avait renoncé à sa religion musulmane, après s’être convertie) et à prendre une nouvelle épouse, Oumama J., 19 ans, et à embarquer avec elle et ses deux enfants vers les terres du jihad. Projet que les services sécuritaires du royaume ont pu mettre en échec le 15 octobre dernier. Par rapport au deuxième mariage de son époux et à sa relation avec l’islam, Valérie B. nous donne une tout autre version des faits.

L’affaire de ce jihadiste qui a mis la barre très haut en matière d’extrémisme en voulant embarquer dans son aventure suicidaire ses enfants est donc loin d’être finie. Le360 en relatera au fur et à mesure les derniers développements.

Par Fahd Iraqi et Abderrahim Et-Tahiry
Le 29/10/2014 à 15h21