Interdit de piscine, le "burkini" fait des vagues!

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Revue de presseKiosque360. Elle souhaitait se baigner en "burkini", combinaison de bain intégrale pour femmes voilées, elle s’est vu interdire l’accès à la piscine d'un hôtel à El Jadida. Un leader PJDiste s'empare de l'affaire.

Le 13/08/2014 à 08h14

Un incident qui promet de faire des vagues. Paraît-il, c’est grave. D’autant plus grave que le "cas’’, dont il est ici question, est sans précédent. La preuve, et pas des moindres : le député vedette du parti au pouvoir (PJD), Abdelaziz Aftati, est intervenu. Le ministre du Tourisme, Lahcen Haddad, a été interpellé et s’est vu contraint de rompre ses (petites) vacances pour statuer sur ce "cas" qui fera probablement jurisprudence. De quoi s’agit-il, alors? Une femme, en provenance de la capitale de l’Oriental, Oujda, se paie un séjour doré dans un hôtel 5 étoiles à El Jadida. Jusqu’ici, rien d’anormal. A part, peut-être, cette vague de chaleur qui fait monter le mercure. A travers la vitre de sa suite, une femme, couverte des pieds au visage, est irrésistiblement tentée par une petite baignade dans la piscine. Elle enfile son "burkini" -un maillot de bain "100% halal" et surtout, très, très tendance- et descend piquer un plongeon dans les eaux azurées et sérénissimes de la piscine. Grand bien lui fasse.

Seulement voilà : sa tenue de bain était peu ordinaire, autrement trop voyante, pour laisser indifférent. Aperçue par les maîtres nageurs, la dame a été priée de renoncer à sa baignade, sous le regard curieux des autres baigneurs. "Le burkini est interdit dans nos piscines", s’est-elle vu signifier par l’administration de l’hôtel. Mais voilà : cette dernière ne l’entend pas de cette oreille. Accrochée bec et ongles à son droit de se baigner comme bon lui semble, elle rameute les familles séjournant à l’hôtel qui lui ont témoigné leur solidarité et défié l’administration. Voilà pour la petite histoire, rapportée par le quotidien Akhbar Al Yaoum, dans son édition de ce mercredi 13 août. "Petite histoire", dites-vous. Elle n’en a pas l’air.

Allô, Abdelaziz…

L’histoire aurait pu donc s’arrêter là. Mais c’est sans compter sur la détermination de la dame au "burkini" qui a décidé de porter plainte auprès du député islamiste Abdelaziz Aftati, qui, faut-il le préciser, est originaire de la ville d’Oujda. Une plainte qui n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd, Aftati ayant saisi la balle au vol et décidé, à son tour, de porter plainte auprès de Lahcen Haddad, ministre du Tourisme qui, de toute évidence, aurait mieux à faire ! Dans cette plainte, dont la teneur a été dévoilée par Akhbar Al Yaoum, le tribun du PJD n’a pas mâché ses mots ni fait dans la dentelle, encore moins dans la nuance, traitant notamment le groupe hotelier de "laïque extrémiste", de "néo colon cynique". Des noms d’oiseaux dont notre député se serait bien passé, si seulement il avait conscience des opportunités de travail offertes par cet investisseur à des milliers de Marocains. Paraît-il, cette simple affaire de nippes serait plus importante que l’avenir de plusieurs milliers de familles marocaines. Mais passons, car ce dérapage verbal, au-delà de la légalité ou pas du maillot de bain dit "islamique", par lequel s’est illustré notre vaillant député, n’est pas sans précédent. Si, selon la logique de nos islamistes light, l’on peut se passer de Danone en le troquant contre "le raïb fait maison", on a de la peine à imaginer contre quoi va-t-on changer les hôtels. Surtout pas contre un "burkini"…

Par Ziad Alami
Le 13/08/2014 à 08h14