Mafia du foncier: des lois pour en finir avec l'impunité

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Revue de presseKiosque360. Suite à la lettre royale adressée au ministre de la Justice, le gouvernement a préparé deux projets de loi pour juguler le phénomène de la spoliation immobilière. Les juges, les Adouls et les avocats qui trempent dans ces actes frauduleux risquent des peines de 10 à 20 ans de prison.

Le 18/09/2018 à 21h16

La Commission de la justice, de la législation et des droits de l’Homme à la Chambre des représentants devait entamer, mardi 18 septembre, l’étude de deux projets de loi relatifs à la spoliation immobilière. Deux textes qui visent à protéger les intérêts du propriétaire, à garantir la sûreté immobilière et à lutter contre la spoliation des biens immobiliers, phénomène qui a d'ailleurs terni l’image du système foncier marocain. Suite à des instructions du roi Mohammed VI, le gouvernement a préparé deux projets de loi: le 32/18, qui modifie et complète la loi n° 22/01 relative à la procédure pénale et le 33/18, qui vise à modifier et compléter le système du code pénal.

Le quotidien Al Ahdath Al Maghribia rapporte, dans son édition du mercredi 19 septembre, que le gouvernement a approuvé les deux projets de loi en juin dernier, suite à la lettre adressée par le souverain au ministre de la Justice, en décembre 2016. En révisant le système du code pénal, l’Exécutif vise à appliquer des sanctions uniformes pour les crimes de falsification perpétrés par les professionnels du secteur, qu’ils soient notaires, Adouls ou avocats et comme le dispose le projet de loi 33/18: «Des sanctions allant de 10 et 20 ans de prison ferme, ainsi que des amendes variant entre 100 à 200 mille dirhams, seront infligées à chaque juge, fonctionnaire, notaire ou avocat qui, pendant l’exercice de sa fonction, falsifie des signatures, modifie un document, cite des personnes fictives, remplace des noms par d’autres, rajoute ou insère des données supplémentaires dans des registres publics». Le texte de loi considère que «ces peines constituent un facteur important de dissuasion et permettent de mettre fin à la spoliation immobilière. La quasi majorité de ces extorsions se font avec des moyens frauduleux ou des manœuvres dolosives en falsifiant les contrats, les procurations et parfois les cartes d’identité des véritables propriétaires. »

Le projet de loi 32/18 précise, dans sa note préliminaire, les prérogatives des autorités judiciaires spécialisées, en l’occurrence le Parquet, le juge d’instruction et les magistrats du siège. Ces derniers auront toute la latitude de prendre les mesures conservatoires nécessaires pour interdire l’exploitation de l’immobilier spolié par des moyens frauduleux. Ce texte vise ainsi à «donner la légitimité au pouvoir judiciaire» dans la prise des mesures conservatoires, sachant que certaines autorités judiciaires ont recours à ce procédé dans des enquêtes criminelles mais sont souvent confrontées à des oppositions, faute de cadre juridique régissant les saisies conservatoires. D’autant que «la pratique dans les litiges immobiliers soumis à la justice a démontré la nécessité de recourir à la saisie conservatoire pour protéger les droits des parties en conflit et garantir la bonne marche de l’enquête criminelle». Ladite note préliminaire confère au procureur du roi, au procureur général du roi et au juge d’instruction «le plein pouvoir de prendre les décisions conservatoires nécessaires pour protéger la propriété immobilière objet du litige en procédant au gel et à l’interdiction de l’exploitation du bien immobilier tout au long de la procédure pénale».

Le même projet permet au tribunal de «prendre automatiquement ou sur une requête du parquet ou encore des protagonistes les mesures conservatoires nécessaires pour geler le bien immobilier quand il s’agit d’une spoliation». Le tribunal a aussi la latitude de se prononcer sur les procédures conservatoires prises, y compris dans la décision du gel de l’immobilier tout au long de l’instruction du dossier

Par Samir Hilmi
Le 18/09/2018 à 21h16