Eaux territoriales. Aux Îles Canaries, la décision marocaine d’assurer sa souveraineté ne passe pas

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Un parti nationaliste canarien, Nuava Canaria, monte au créneau pour dénoncer ce qu’il qualifie de «prétentions expansionnistes» du Maroc après l’adoption par le gouvernement de deux projets de lois et un projet de décret relatifs au domaine maritime du Royaume.

Le 10/07/2017 à 16h48

Aux Îles Canaries, des voix s'élèvent contre la décision prise par le gouvernement marocain de consolider sa souveraineté sur ses eaux territoriales situées au large du Sahara. Premier à monter au créneau, le parti nationaliste canarien Nueva Canarias, un parti régionaliste minoritaire, comptant un seul député au Congrès des députés en Espagne.

Cette formation réclame rien de moins que la comparution du ministre des Affaires étrangères et de la coopération, Alfonso Dastis, devant le Sénat. Et pour cause, elle estime que le gouvernement espagnol doit s’expliquer quant à "l’expansionnisme maritime" du Maroc face aux îles Canaries et «les mesures que le gouvernement central compte prendre à cet égard».

Sénatrice du parti Nuava Canaria, María José López, dénonce à ce titre "l’attitude passive" du gouvernement espagnol. «Derrière ces prétentions expansionnistes se cachent des intérêts économiques clairs (…) qui iront à l’encontre des intérêts canariens, aussi bien au niveau des ressources naturelles que de la protection de l’environnement» de l’archipel, a-t-elle souligné.

Parlant de «provocation de l’exécutif marocain», María José López va jusqu’à se ranger du côté du Polisario. Ces «mesures adoptées par le Maroc ne sont pas seulement préoccupantes pour les Canaries, mais constituent également une attaque directe à la souveraineté du territoire du Sahara Occidental», affirme-t-elle.

Dans ce qui ressemble à une réponse à la sénatrice, le ministre espagnol des Affaires étrangères et de la coopération, Alfonso Dastis, a assuré que le nouvel arsenal juridique marocain "n’affecte en rien" la délimitation des frontières entre les espaces maritimes du Maroc et de l’Espagne, qui "continuera d’être de commun accord" entre les deux pays. Lors d'une conférence de presse, tenue lundi à Las Palmas de Grande Canarie l, Dastis a précisé que ces nouveaux textes de loi constituent un "ajustement technique" répondant à la nécessité pour le Maroc d’actualiser sa législation dans ce domaine. Les lois marocaines en vigueur jusqu’à présent sont antérieures à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982. "Le gouvernement espagnol a été en contact avec son homologue marocain sur cette question", a encore indiqué le ministre espagnol.

Présentés par le ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale lors du Conseil de gouvernement du jeudi 6 juillet, les textes décriés visent à inclure l'espace maritime situé au large des côtes du Sahara marocain dans l’arsenal juridique national, «pour cimenter la tutelle juridique du Maroc sur ces eaux et barrer la route à toutes les allégations remettant en cause la souveraineté du Royaume sur cet espace», avait souligné le porte-parole du gouvernement, Mustapha El Khalfi, lors d'un point de presse à l’issue de cette réunion.

Ils visent également à actualiser et à compléter les coordonnées géographiques relatives aux lignes de base et aux lignes de fermeture de baies sur les côtes marocaines, sur la base de données scientifiques nouvelles, de sorte à permettre au Maroc de délimiter ses eaux territoriales de manière plus précise et plus conforme aux dispositions du droit international de la mer, en perspective du dépôt du dossier final de demande d’extension du plateau continental.

Ces textes ont également pour but de délimiter la zone économique exclusive au large des côtes des provinces du sud et de l’incorporer, clairement, dans l’arsenal juridique national. Il s’agit également d’abroger le recours à la ligne médiane comme seul repère de la démarcation des frontières maritimes et d’introduire le principe de l’équité qui est plus conforme aux intérêts du Maroc et plus compatible avec le droit international.

Par Youssef Bellarbi
Le 10/07/2017 à 16h48